L'eau et les nuages

C'est un livre non choisi, à peine un livre offert, plutôt un livre qu'on m'a abandonné parce qu'il ne plaisait pas, un livre recueilli, donc.

Il est mince, presque une plaquette, la couverture est bleue, le titre évoque Bachelard, le sous-titre Roussel: comment je crée des histoires et comment mes histoires me créent.

C'est un livre austère qui commence sous les pêchers en fleurs au bord de la mer, c'est un livre de méditation, une longue conversation avec soi-même. Décide-t-on de sa vie ou est-elle menée par le hasard, le narrateur soutient la première thèse, mais une voix intérieure se moque de lui: sentiments et hasards, voilà ce qui mène la vie, affirme-t-elle.

De cette première conversation sort un premier livre, et c'est alors que le lecteur réalise que tout cela est un récit autobiographique et non une fiction.
Universalité des réactions face à la littérature: les collègues de Shen Congwen prendront ombrage de cette première nouvelle dans lesquels ils se reconnaîtront.
Jugement lapidaire de Shen Congwen: «Voilà qui est étrange! ce sont des gens qui s'accommodent sans se plaindre de leur petite vie mais qui ne supportent pas qu'un artiste la transpose.» (p.21)

Les femmes, toujours appelées "Hasard", comme s'il s'agissait d'un unique prénom, guident l'auteur d'une œuvre à l'autre, en fonction de ce que chacune lui apporte. Puis il s'en détache, menant toujours plus loin la réflexion sur lui-même et son art: exister (matériellement) ou vivre (spirituellement), Shen Congwen choisit en toute conscience la seconde voie.

Parce qu'il décrit les hommes et écrit pour les hommes, il est censuré pendant la guerre (car il ne fait pas de propagande),

J'entrepris de raconter des histoires fondées sur ce sentiment de «connaissance en profondeur»: c'est ainsi que naquit Le Long Fleuve. L'interdiction qui frappa cette œuvre ne fut pas fortuite, car pour décrire la guerre en répondant aux exigences de l'heure, il n'était pas nécessaire de creuser aussi profond.
Shen Congwen, L'eau et les rêves, p.44

puis par la Chine communiste (parce qu'il ne fait pas de propagande).

Que dois-je écrire sur la feuille blanche? Parce que j'ai prarlé de «l'homme», c'est la troisième fois ce mois-ci que je suis épinglé par la commission de censure , preuve que ma réflexion sur les rapports humains et les règles auxquelles obéit mon style ne sont effectivement plus en accord avec l'époque.
Ibid, p.56

Ces pages se terminent sur le silence de la voix moqueuse du début qui abandonne l'écrivain seul face à ses doutes sur l'avenir et ce qu'il convient de faire:

— Que m'importe le plus? Les fleurs de l'abricotier ou les hommes? les gens qui ont joué hier un rôle dans mon existence ou bien toutes ces formes d'existence à venir?
Ma question se perd dans le silence.
Ibid, dernières lignes.

C'est un livre austère qui manie l'abstraction à la recherche de la spiritualité.


A noter: l'excellente postface de la traductrice Isabelle Rabut, à lire en préface lorsqu'on ne connaît pas Shen Congwen (ce qui était mon cas; je regrette donc de n'avoir pas lu d'abord cette postface).

Histoire de l'Irak, par Charles Saint-Prot

Ce livre, publié en 1999, annonce en couverture couvrir 8000 ans d'histoire, de Sumer à Saddam Hussein.

Le pari est tenu d'une histoire à la fois succinte et détaillée, s'efforçant de démontrer la cohérence de l'histoire d'un territoire quel que soient les peuples qui s'y sont succédés. L'introduction explicite clairement cette volonté, et l'on reste sans voix devant le nombre de mythes et légendes venus de cette région: on croyait ne rien connaître de l'Irak, et tous les noms nous sont familiers, de Gilgamesh à Babylone en passant par Haroun-al-Rachid, Soliman le Magnifique ou la reine de Saba.

De tout temps, la situation géographique et la prospérité de la Mésopotamie ont été enviées. Elle a donc constitué l'enjeu de luttes acharnées. L'intensité des événements qui s'y sont déroulés depuis des millénaires est incomparable. Ici ont régné ou sont passés des hommes parmi les plus braves, les plus exaltés, les plus excessifs : Gilgamesh, le héros-fondateur, Sargon l'unificateur, Hammourabi le législateur, Assourbanipal le guerrier, Nabuchodonosor le conquérant, Cyrus le Perse, Alexandre le grand, Trajan le Romain, Julien l'Apostat, Ali et Hussem les martyrs Mansour le victorieux, Haroun al Rachid, Houlagou le barbare, Timour le boiteux, Saladin le libérateur, et de nombreux autres. Ici ont eu lieu des tragédies extraordinaires, des drames inouïs se sont enchevêtrés, le fracas de l'Histoire a été plus assourdissant que partout ailleurs.
[...]
L'incompréhension dont est victime l'Irak provient essentiellement du fait que, en l'espèce, la référence ne peut jamais être contemporaine. Sauf à courir le risque d'atteindre un haut degré d'amphigouri, il convient de toujours se souvenir que les Irakiens constituent un peuple de survivants. C'est une nation d'hommes qui ont dû affronter les plus terribles épreuves, faire face aux déferlements des plus barbares envahisseurs, se battre pied à pied pour ne pas disparaître.[...]
Depuis plus de six mille ans, les Irakiens ont vu se faire et se défaire des empires, brûler et ravager leurs villes et leurs campagnes, subir les occupations les plus rigoureuses. Après chaque destruction, ils ont reconstruit; après chaque reconstruction, ils ont été détruits.
Charles Saint-Prot, L'histoire de l'Irak, p.8-9

Le ton est donné, et c'est sans doute cette trop grande volonté de convaincre, ce phrasé mélodramatique, qui nuit au livre au fur à mesure qu'on approche d'événements contemporains: tant que l'histoire est lointaine, il est possible de la voiler des couleurs du mythe, mais quand les événements nous sont contemporains, quand il s'agit pour le lecteur de souvenirs, il est plus difficile — et plus dangereux en terme de crédibilité — d'omettre tel ou tel fait, comme par exemple l'embargo pétrolier de 1973 (il n'est pas véritablement omis, mais jamais le terme d'embargo n'est employé).

L'histoire se déroule, des débuts de l'écriture à la révélation de Mahomet. L'Islam est présenté comme la réponse simple attendue par une population fatiguée des querelles chrétiennes, des sectaires et des hérétiques:

Mais un bon nombre d'Irakiens, notamment dans les villes, préfère adhérer à l'Islam car, après une longue période de crise politique et morale, cette religion apparaît non seulement comme le fondement d'un nouvel ordre politique, mais encore comme une doctrine apaisante. Après des siècles d'ergotages dogmatiques et de divisions sectaires, elle apporte une réponse qui, selon beaucoup, ne constitue d'ailleurs pas une rupture puisqu'elle s'inscrit dans la continuité du monothéisme.
Ibid, p.50 (Nous sommes en 641).

Cette simplicité ne dure pas, la succession de Mahomet est délicate, la famille se déchire car Mahomet n’a pas laissé de fils.

La succession de Mahomet:
Mahomet, fils d'Amina, est élevé par son grand-père, Abdelmoutaleb. Le fils cadet de celui-ci (donc oncle de Mahomet), Abbas, est l'ancêtre de la dynastie des Abbassides qui règnera plusieurs siècles à Bagdad à partir de 749 (après la fin des Omeyyades).
Mahomet épouse Khadija, fille de son oncle Abou Taleb.
Le fils d’Abou Taleb, Ali, épouse la fille de Mahomet et de Khadija, Fatima.
D’autre part, Mahomet a épousé Aïcha, fille d’Abou Baker, et l’une des filles d’Omar. Ces deux beaux-pères vont revendiquer la succession de leur gendre.
Abou Baker sera le premier successeur (calife) de Mahomet à la mort de celui-ci, puis Omar succèdera à Abou Baker. Omar est assassiné, son successeur, Osman, un calife trop faible, également.
Ali, gendre de Mahomet, pense alors son heure venue. Cependant Aïcha veut le pouvoir et mène « la bataille du chameau », qu’elle perd.
Moawia ibn Sofyan, de la tribu des Béni Omeyya apparenté à l’ancien calife Osman, veut le pouvoir et lève une armée.
Ali, homme pieux, fait des erreurs stratégiques. En particulier, parce qu'il a à cœur d'éviter de faire se battre des musulmans entre eux, il accepte le principe d'un arbitrage entre ses droits et ceux de Moawia, alors qu’il est dit dans le Coran : «Si deux partis de Croyants se combattent, il faut rétablir la paix entre eux. Mais si l’un d’eux est rebelle contre l’autre, il faut le combattre jusqu’à ce qu’il revienne à l’obéissance de Dieu.» Ainsi, en acceptant un arbitrage, Ali laisse à penser qu’il y a un doute sur sa légitimité, alors que ce n’était pas le cas. Un certains nombre des partisans d’Ali, déçus, font sécession. On les appellera les «sortants». Ces kharidjites seront à l’origine de la première secte de l’Islam. Elle subsiste encore en Algérie saharienne, dans l’île de Djerba et dans le sultannat d’Oman. Ali perdra une autre bataille et sera finalement assassiné par un kharidjite.
Hassan, fils d’Ali, renonce à tous ses droits à condition que les siens soient autorisés à résider à Médine. Ses descendants seront les Hachémites (que l'on retrouve en Irak, à la Mecque, en Jordanie) et les Alaouites du royaume marocain. Moawia est le premier calife de la dynastie des Omeyyades qui résidera à Damas jusqu'en 750. Cependant, les partisans d’Ali, les chiites (chi’a Ali), ne désarment pas et reportent leurs espoirs sur le fils cadet d'Ali, frère d’Hassan, Hussein.
Hussein, à l’instar des enfants des premiers califes, Abou Baker et Omar, ne reconnaît pas le calife Moawia. Il sera tué à l’issue d’un siège mémorable qui restera dans les esprits comme la tragédie de Kerbala. Désormais, Hussein passe pour un martyr aux yeux des siens. Ses partisans seront les chiites, qui donneront naissance à d'autres "variantes": les Zéidites (au Yémen), les Ismaëliens, les Druzes et les Nosaïris (ou Alaouites).

Cependant le chiisme n'aurait pas vu le jour si Ali avait poursuivi son règne. En effet, il procède à l'origine d'une simple querelle dynastique et forme essentiellement une faction politique qui se veut la plus légitimiste. Ce n'est qu'après la mort d'Hussein que les partisans des Alides s'éloigneront de la tradition orthodoxe (sunnisme) en adjoignant à la doctrine un certain nombre de croyances dont la principale est la vénération des imams Ali, Hassan, Hussein et leurs neufs descendants directs. Selon les chiites, le douzième et dernier imam, Mohamed el Mounta-zar, ne mourut pas. Dissimulé aux yeux des hommes, cet « imam caché » reviendra un jour comme le messie (Mahdi) et démasquera l'injustice pour ramener l'humanité sur la voie d'Allah.
Ibid, p.58


Quelques siècles se passent, Charles Saint-Prot raconte avec une juste indignation les promesses des Anglais aux Arabes en 1915 et le reniement de leur parole au sortir de la guerre. Le territoire irakien est stratégique pour atteindre l’Inde, il le deviendra plus encore quand on y découvrira de très importants gisements de pétrole. Toute l’histoire de l’Irak au XXe siècle peut se lire comme une lutte pour l’indépendance économique et politique, face aux Anglais d’abord, puis face aux Américains. Les Kurdes à qui l'on avait promis un territoire sont présents en Turquie, en Iran et en Irak. Les Anglo-saxons prendront l'habitude de semer l'agitation parmi ces tribus archaïques chaque fois que le besoin s'en fera sentir.
Pour lutter contre les ingérences et les revendications de l’Occident, le parti baas s’efforcera d'une part d’unir les pays arabes, d’autre part il fera tout ce qui est en son pouvoir pour moderniser l’Irak, et en particulier pour apprendre à extraire et raffiner le pétrole sans l’aide des Anglo-saxons.

En l'espace de quelques années la production et les exportations de brut vont considérablement augmenter, passant de quelques deux millions de barils/jour en 1975 à trois millions et demi en 1980. En même temps, les revenus annuels de l'exportation de pétrole vont passer de 7,5 milliards de dollars à plus de 25 milliards. L'Irak qui dispose également des plus grandes réserves du monde, estimées à plus de deux cents milliards de barils, est devenu une puissance qu'il n'est plus possible de négliger. Cette situation irrite au plus haut point les Anglo-Saxons. Les États-Unis ne pardonneront jamais à Bagdad d'avoir donné l'exemple, puis pris la tête d'une sorte de front des pays arabes exportateurs lors de la création de l'Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole (OPAEP) en 1973, et déjoué ainsi une patiente politique de prise de contrôle du pétrole mondial qui est l'un des axes fondamentaux de leur stratégie hégémonique[1]. Quant aux Britanniques, ils pardonneront encore moins au gouvernement baassiste d'avoir mis fin à plus d'un demi-siècle d'influence en Mésopotamie en ayant par surcroît ouvert les portes de leur pays et du Golfe à la France.
Il ne faut pas chercher plus loin les raisons de la solide inimitié que ces deux puissances vont désormais entretenir contre l'Irak.
Ibid, p.204-205

Malgré toute la méfiance que font naître ces pages qui me paraissent manquer d’objectivité dans leur désir de justifier et défendre les Arabes, les quelques lignes que je viens de citer me paraissent pouvoir encore s’appliquer.

Charles Saint-Prot raconte ensuite la guerre de l'Irack contre l’Iran, puis l’invasion du Koweït. Il trouve toutes les excuses à Saddam Hussein. Selon lui, les Irakiens ont été manipulés ; Bush voulait la guerre.
(Cette thèse a également été défendue par Bob Woodwards en 2001 dans un livre intitulé The commanders.)
Ce qui me gêne, c’est que Charles Saint-Prot affirme beaucoup sans apporter de preuves. S’agit-il de suppositions ou de faits avérés, les preuves étant trop longues à apporter?

Le livre se termine ainsi (en 1999, rappelons-le : la guerre contre l’Irak est la guerre de libération du Koweït)) :

En tout état de cause, le nouvel ordre international que George Bush appelait de ses vœux n'a été qu'une nouvelle tentative de Washington pour dominer le monde. Le chef de la majorité républicaine au Sénat, Newt Gingrish n'en faisait pas mystère lorsqu'il déclarait, au début de l'année 1995, que « les États-Unis doivent mener le monde »[2]. Cette conception conduit tout droit à attiser les ressentiments et les insatisfactions des peuples et à creuser le fossé entre le nord et le sud. Elle procède d'une philosophie largement développée outre-Atlantique, notamment par Samuel Huntington dans un article paru en 1993 dans la revue Foreign affairs. Selon ce professeur de Harvard, le conflit entre les civilisations serait la dernière phase d'évolution des conflits de l'humanité. L'univers serait donc voué à voir s'affronter les cultures et les identités et condamné à un « choc des civilisations ». La guerre contre l'Irak, véritable guerre civilisationnelle[3] a peut être constitué la première étape de ce choc et le prélude à « une grande nuit de l'intelligence »[4], c'est-à-dire la barbarie. Surtout, la preuve est donnée qu'un monde unipolaire, soumis aux caprices et aux intérêts d'une seule puissance impérialiste, n'est ni plus sûr, ni plus tranquille qu'un monde multipolaire. La menace, c'est la destruction de tout ce qui fait la dignité de l'homme, la civilisation. Si l'on veut bien se souvenir, à l'instar du pape Jean-Paul II qui souhaite se rendre, en 1999, sur la terre où est né Abraham, que c'est sur les bords de l'Euphrate et du Tigre, et non à Athènes ou même en Nubie, que se trouvent les premiers vestiges de la civilisation de l'Occident, il serait assez extraordinaire que ce soit en Irak qu'ait été porté le premier coup annonçant la fin de l'Histoire...
Ibid, avant-dernière page

Malgré toutes les réserves que je peux émettre à l’encontre du parti pris de Charles Saint-Prot, je referme ce livre persuadée qu’il a raison : les Etats-Unis ne laisseront jamais une terre aussi riche en pétrole leur échapper. Dans la même logique, ils feront tout pour éviter l’union des pays arabes et leur développement économique et social, car des pays forts pourraient leur résister politiquement et non par les armes, ce qui serait plus redoutable et davantage embarrassant. Or nous savons désormais que le développement et l’élévation du niveau de vie sont les seuls remparts durables contre l’intégrisme.

Notes

[1] Rappelons que les États-Unis produisent eux-mêmes de quoi satisfaire 80 % de leurs besoins pétroliers annuels et que leurs importations de naphte ont surtout pour objet de préserver leurs réserves. Le contrôle des zones pétrolières du reste du monde consiste, pour eux, à imposer une politique des prix et des approvisionnements contre les autres pays industriels (États européens, Japon). Cf. Charles Saint-Prot, La France et le renouveau arabe (Paris, 1980, Copernic) et W. H. Oppenheim, Why oil prices go up in Foreign Policy, hiver 1976-1977.

[2] Article paru dans Le Monde, en mars 1995

[3] Mehdi Elmandjra, La guerre civilisationnelle, Casablanca, 1991, éditions Tourbi.

[4] Jean-Pierre Chevènement, Le noir et le vert, Grasset, 1995.

L'esprit de corps, sexe et mort dans la formation des internes en médecine, d'Emmanuelle Godeau

Du folklore carabin, on croyait tout savoir : anecdotes médicales à l'humour volontiers salace, rumeurs de bizutages obscènes, parfois violents, chansons paillardes, fresques scandaleuses des salles de garde ont façonné l'image de l'apprenti médecin, facétieux et grivois.
[...]
Dans L'esprit de corps, sexe et mort dans la formation des internes en médecine, Emmanuelle Godeau montre que le même esprit de corps se retrouve chez les médecins, les polytechniciens et des énarques mais que l'internat constitue un parcours initiatique unique en Europe et dans le monde. Un parcours unique par sa durée, puisqu'il commence dès les premières dissections, même si elles concernent l'ensemble des étudiants en médecine, se spécifie au moment de l'obtention de l'internat et des quatre années de formation sur le terrain, à l'hôpital, et se poursuit au-delà, puisque anciens internes et internes en titre se retrouvent souvent de façon régulière lors d'événements festifs, « les Revues », au cours desquels sont renouvelés les pratiques coutumières acquises au moment de l'internat. Au moment des premières dissections, où l'intimité avec les macchabées est imposée à l'étudiant, se dessine déjà une première hiérarchisation des acteurs « qui va permettre à chacun de définir l'intensité de son engagement au sein de l'épreuve collective, de celui qui est au centre et en fait trop, paraissant transgresser une règle implicite, par exemple, en " baffant les cadavres, en balançant leurs bras ", voire en " dilacérant au scalpel ", à celle qui demeure en retrait et critique ses camarades, mais n'en participe pas moins à l'expérience en cours ». Certains abandonnent d'ailleurs les études médicales à l'issue de telles expériences. Dérisions, paroles obscènes ou blasphématoires constituent les premiers jalons d'un savoir coutumier sur la mort qui se mettra vraiment en place au moment de l'internat.
[...]
Le « baptême », première cérémonie du calendrier coutumier de l'internat, marque la nouvelle vie de l'interne. Forme de bizutage, rarement citée dans les textes de loi ou dans la presse, qui font plutôt référence au charivari des première ou deuxième années de médecine, l'épreuve est redoutée mais jugée indispensable. Les étapes en sont codifiées : passage devant un jury d'anciens, où le nouveau est souvent sommé d'exhiber son intimité, défilés dans les rues de la ville, missions à réaliser dans l'hôpital, gages où la « thématique sexuelle et obscène » domine le plus souvent, premières chansons à caractère pornographique, premières cuites, premières projections de nourriture sur les fresques murales. [...] Après son baptême, la vie de l'interne est rythmée par le rituel de la salle de garde. Dans ce lieu paradoxal que les internes décrivent eux-mêmes comme sinistre, crade, immonde, triste à crever ou sordide, voire insalubre, sous l'apparent désordre (projection de nourritures, saleté), tout est codifié et réglé par l'économe : place au moment des repas, façon de faire circuler les plats.
[...]
Dans son livre, Emmanuelle Godeau ouvre au public non averti les portes de la salle de garde pour montrer comment le savoir qui se met en place en marge de l'institution est indispensable à la formation du médecin qui est le seul à être confronté « à la transgression répétée de tabous aussi forts et universels que ceux liés à la mort et à la nudité ». Le rituel qui est mis en place inverse terme à terme les grands principes du savoir officiel : hyperérotisation du corps plutôt que désexualisation du rapport au corps ; bruit, vociférations et exhibitions au lieu du calme, du silence et de la décence ; saleté et désordre contre propreté et hygiène ; vocabulaire trivial et obscène plutôt que langage technique spécialisé ; égalitarisme enfin plutôt que respect des hiérarchies.

Notes de lecture du Dr Lydie Archimède, parues dans Le Quotidien du médecin n°824 du 30 octobre 2007

Emmanuelle Godeau, L'esprit de corps, sexe et mort dans la formation des internes en médecine, éditions de la Maison des sciences de l'homme, collection « Ethnologie de la France »

Un Goncourt pour Zelda

<blocquote>Quand j'eus fini ma lecture [de Gatsby le Magnifique], je savais une chose: quoi que Scott fît et de quelque façon qu'il le fît, il me faudrait le traiter comme un malade et l'aider dans la mesure du possible et essayer d'être son ami. Je ne connaissais pas encore Zelda et je ne savais point, par conséquent, quels terribles atouts Scott avait contre lui.<br><br>

Ernest Hemingway, <i>Paris est une fête</i><br><br>

<br>«Tu sais que je n'ai jamais couché avec personne d'autre que Zelda.<br>— Je ne savais pas.<br>— Je croyais te l'avoir déjà dit.<br>— Non. Tu m'as dit des tas de choses, mais pas ça.<br>— C'est à ce propos que je dois te poser une question.<br>— Bon. Vas-y.<br>— Zelda m'a dit qu'étant donné la façon dont je suis bâti, je ne pourrais jamais rendre une femme heureuse et que c'était cela qui l'avait inquiétée au début. Elle a dit que c'était une question de taille. Je ne me suis plus jamais senti le même depuis qu'elle m'a dit ça et je voudrais savoir ce qu'il en est.<br>— Passons au cabinet, dis-je.<br>— Le cabinet de qui?<br>— Le water, dis-je.»<br>Nous revînmes nous asseoir dans la salle, à notre table.<br>« Tu es tout à fait normal, dis-je. Tu es très bien. Tu n'as rien à te reprocher. Quand tu te regardes de haut en bas, tu te vois en raccourci. Va au Louvre et regarde les statues, puis rentre chez toi, et regarde-toi de profil dans un miroir.<br>— Ces statues ne sont peut-être pas à la bonne dimension.<br>— Elles font le poids. Bien des gens pourraient les envier.<br>— Mais pourquoi a-t-elle dit ça?<br>— Pour te rendre incapable d'initiative. C'est le plus vieux moyen du monde pour rendre un homme incapable d'initiative

<br><br><i>Ibid</i></blocquote>

Archives, mode d'emploi

Je trouve dans mes commentaires une requête que je ne comprends pas bien:

  • au mieux on me demande de dater les cours de Compagnon, ou d'établir une correspondance entre les dates de ses cours et les numéros que je leur ai donnés;
  • au pire on me demande de formaliser mes notes sous forme d'un document (word?) (avec les dates, je suppose) pour les envoyer à mon commentateur.

Je ne ferai ni l'un ni l'autre, mais je vais fournir quelques indications.

1/ Le cours s'est généralement déroulé le mardi précédent la mise en ligne du billet. Par exemple, le cours n°7 mis en ligne le vendredi 2 février a eu lieu le mardi 30 janvier. Le séminaire et le cours portant le même numéro ont eu lieu le même jour.

2/ Il est difficile de remonter dans les archives de mon blog, quand on interroge mois par mois on n'accède pas directement à l'intégralité du mois, et je ne sais pas corriger cette fonction. Le plus simple dans un cas comme celui-là est de procéder ainsi: d'abord sélectionner la catégorie (Antoine Compagnon 2007), puis une fois que la page du blog a fini de s'afficher, cliquer dans la marge de droite dans "Archives": la liste des mois contenant des billets de la catégorie s'affiche, en l'occurence décembre 2006, janvier 2007, février 2007 et mars 2007 (et maintenant novembre 2007: ce billet que vous êtes en train de lire).
Je reconnais que c'est un peu lourd, mais je ne sais pas faire mieux. C'est d'ailleurs la meilleure solution pour lire l'intégralité d'une rubrique.

3/ Ensuite, si l'on souhaite faire un document ordonné, il faut procéder par copier/coller (et dans le cas où ce document servirait à autre chose qu'à "un usage privé du copiste", il serait courtois d'en indiquer la source). Un ami utilise l'une des options internet (voir le menu en haut de la page, je n'indique rien car cela varie selon les navigateurs) qui consiste à se faire envoyer la page sous forme de mail: cela va effectivement plus vite que les copier/coller. Dans tous les cas, on perd les liens internet et les liens des notes en bas de page, qui sont à reconstituer patiemment.

Lettres à Jean Puyaubert, de Roger Vitrac

Passé la journée au lit, à dormir et à lire.
Lu Lettres à Jean Puyaubert, acheté il y a un an, retrouvé hier dans le carton à oreillers.

Les non-camusiens ne connaissent pas Jean Puyaubert. Jean Puyaubert est une figure mythique du Journal, l'homme que tous nous souhaiterions avoir rencontré, pour sa culture, son élégance, sa gentillesse, son sourire. Je vous livre une photo et une biographie de quelques lignes, située dans un contexte fiscal:
780. C'est en effet un douloureux sujet. En 1992 j'ai fait l'objet d'un contrôle fiscal, portant sur les trois années précédentes. Il a abouti à un redressement. On me reprochait de n'avoir pas déclaré certaine demi "année sabbatique" (quatorze mille francs par trimestre), allouée par le Centre National des Lettres, qui m'avait dit de n'en pas faire mention parmi mes revenus. Le Centre National des Lettres et le ministère des Finances ne sont pas d'accord, en effet, sur le caractère imposable, ou non, de ces bourses. Comme le débat me dépasse, je suis assisté dans le procès qui s'ensuit, devant le tribunal administratif de Pau (dont dépend le département du Gers), par un conseiller commis d'office par le ministère de la Culture.

781. Ce procès, qui traîne depuis trois ans maintenant, et qui pourrait très mal se finir pour moi, porte aussi sur d'autres sommes, versées celles-là à titre d'aide amicale, et de mécénat privé, par le docteur Jean Puyaubert, radiologiste des Hôpitaux de Paris et grand collectionneur de peinture, en particulier d'André Masson.

782. Ami des surréalistes et surtout des membres du Grand Jeu, intime de Roger Vitrac, de Roger-Gilbert Lecomte et de Raymond Queneau, Jean Puyaubert, depuis son enfance frénétique lecteur, m'avait écrit, en 1981, à propos de mon Journal d'un Voyage en France. Il m'invitait à dîner. Et nous avons dîné ensemble, et parfois déjeuné, plusieurs fois par semaine, en tête-à-tête ou en compagnie de tiers des amis à lui ou à moi, son neveu, Flatters, le poète Max de Carvalho, Philippe 1er, Philippe II, Philippe III, Philippe IV, Philippe V, d'autres souverains dans d'autres dynasties pendant les dix années qui suivirent, jusqu'à sa mort, en novembre 1991.

783. Il était né en 1903 et malgré cela, ou peut-être pour cette raison, je n'ai jamais connu personne dont j'aie ressenti aussi fort qu'il était mon contemporain. Notre langage était le même, nous nous amusions des mêmes choses, les mêmes détails nous émouvaient, les mêmes tournures, les mêmes vers. Nous n'étions d'accord sur rien et nous étions en sympathie sur tout.

784. Jean Puyaubert, toute sa vie, avait aidé les artistes qu'il aimait. Je possède une lettre d'Antonin Artaud, à lui adressée, où il est question d'un prêt de vingt-cinq francs. Il traversait tout Paris à pied, pendant l'Occupation, pour trouver à Lecomte de l'opium (ou du laudanum, je ne sais plus). Pour ma part, je n'ai jamais eu à lui emprunter un sou ce qui s'appelle emprunter. Quand il voyait que je m'étais mis, encore une fois, dans une situation intenable, il me passait deux cent francs à la fin d'un dîner, et quelquefois c'était dix mille, en chèque, dans une enveloppe, et parfois même davantage.

785. Pas un instant il ne me vint à l'idée, ni à lui, que ces sommes-là (pour lesquelles il avait déjà été soumis à l'impôt), pussent être pour moi imposables. Mme l'inspecteur du fisc, cependant, s'ingénie à les ranger sous des rubriques où elles seraient très sévèrement soumises à taxation : ou bien se sont des salaires pour des travaux clandestins (qui bien entendu n'ont jamais existé); ou bien se sont des revenus littéraires (puisqu'elles avaient pour origine, de mon propre aveu, l'existence de mes livres); ou à défaut ce sont des legs dissimulés, imposables en ce cas dans des proportions bien plus fortes encore, puisque le docteur Puyaubert et moi n'avions aucune relation de parenté.

786. Nous en sommes là. On tient à préciser toutefois, du côté de l'Administration, que ma bonne foi n'est pas en cause. Il n'empêche que si je perds ce procès, il me faudra verser des dizaines et des dizaines de milliers de francs, qui s'ajouteront aux impôts en cours, que déjà je n'arrive pas à payer.

Renaud Camus, Vaisseaux brûlés

Roger Vitrac et Jean Puyaubert ont entretenu une correspondance tout au long de leurs vies. Il a fallu sélectionner des lettres, choisir celles qui relevaient le moins de la vie quotidienne, celles qui demandaient le moins d'explications relevant de la vie privée, intime. Alain et Odette Virmaux ont accompli cette tâche, rendant en introduction hommage à Jean Puyaubert:
Que parmi tant de voltes, de tâtonnements, d'inachèvements et de déceptions, il [Vitrac] ait obstinément gardé Jean Puyaubert comme confident — seul point fixe, ou presque, d'une existence disloquée et inaccomplie — cela plaide assurément en sa faveur. Car il n'avait pas mal placé sa confiance. Ami sûr, discret et généreux jusqu'à l'oubli de soi, Jean Puyaubert mit un point d'honneur à ne jamais écrire une ligne sur aucun de ceux qu'il avait approchés, et il avait connu à peu près toute cette génération. A peine s'il consentit à dire quelques mots, pour la radio1, en hommage à un homme dont il avait été très proche et qu'il avait soulagé de son mieux, Roger Gilbert-Lecomte, l'«archange» du Grand Jeu. Au risque de contrevenir à cet intransigeant désir d'effacement, nous pensons qu'il ne serait pas équitable que le nom et le rôle de Jean Puyaubert demeurent dans l'ombre. Et l'on ne pouvait mieux lui rendre justice qu'en l'associant étroitement à la mémoire de Roger Vitrac, l'ami qu'il avait privilégié.

Alain et Odette Virmaux, présentation des Lettres à Jean Puyaubert de Roger Vitrac, p.13

Le ton de ces lettres m'emplit de regrets, plus personne n'oserait écrire ainsi, à la fois sans fard, se plaignant de sa paresse ou remerciant pour un don d'argent («Encore merci pour le nerf du voyage et crois que je t'aime bien fraternellement» p.58), et de façon rapide, allusive, mordante, d'un humour jouant sur une exagération qu'on rejetterait aujourd'hui comme maniérée ou ampoulée, et que je trouve amusante:
Bien sûr je brûle de l'envie de te raconter par le menu toute l'expédition mais tu sais que le genre narratif n'est pas notre fort et sans aller jusqu'à prétendre, comme d'autres, que je ne pourrais écrire la phrase: «la voiture de mon ami Henri Philippon s'arrêta devant l'hôtel des Colonies à cinq heures », je me trouve toujours embarrassé par ce qu'on est convenu d'appeler la simplicité d'écrire qui me paraît être un monstre charmant de pleins et de déliés.
Ibid, lettre du 11 septembre 1933, p.62

J'ai croisé de page en page des personnages et des événements découverts dans la biographie de René Char2, Breton, Bunuel, le cinéma, Bataille, la mort de Raymond Roussel…
Je confronte les lignes suivantes pour mémoire, parce que si l'anecdote est amusante soixante-dix ans plus tard, elle est représentative de la violence physique qui accompagnait les passions littéraires (et politiques) de ces années-là.
Il s'agit des raisons qui ont amené le groupe surréaliste conduit par Breton à saccager une boîte nommée Le Maldoror. Au cours de la bagarre, René Char recevra un coup de couteau.

Dans un interview paru dans Le Soir du 17 février 1930, Vitrac raconte la provocation malicieuse qui a présidé au baptême de la boîte:
Je suis en effet responsable de cette histoire. Il y a quelques mois, M. de Landau, que je ne connaissais pas, m'annonça l'ouverture d'une nouvelle boîte, «La Locomotive», qu'il comptait exploiter à Montparnasse. Je lui déclarai qu'il n'aurait personne, que l'enseigne me paraissait saugrenue et qu'il devait prendre exemple sur des lieux de plaisir de la rive droite, tout en restant rive-gaucher. «Maldoror», lui dis-je, voilà qui conviendrait admirablement. Rien ne vous manquera. Ni les snobs, ni les Américains, ni le scandale. Car l'auteur des «Chants de Maldoror» est tabou pour une demi-douzaine d'occultistes qui ne manqueront pas de vous assaillir aux cris d'Abracadabra et de «Vive Monsieur le Comte!». Robert Desnos acheva de le persuader.

Ibid, interview p.85

De son côté, Laurent Greisalmer raconte et imagine la décision de saccager «Le Maldoror»:
Au café Cyrano, c'est jour de tempête! André Breton porte un masque de colère blanche et Aragon la toge de Fouquet-Tinville. Non seulement les traîtres au groupe surréaliste se répandent dans Paris pour cracher sur eux, mais ils osent blasphémer sur ce qu'il y a de plus précieux à leurs yeux: Les Chants de Maldoror et les Poésies de Lautréamont. Lautréamont! L'auteur de leur jeunesse, celui qui les a galvanisés pour toujours.
Sur une table du café, un exemplaire de l'hebdomadaire Candide, ce 14 février 1930, apporte la preuve de la cabale. En commandant un picon-Citron, Paul Eluard jette un coup d'œil à l'article d'Odette Pannetier: «Il paraît que ça ne va guère, chez les surréalistes, s'amuse la journaliste. Ces messieurs Breton et Aragon se seraient rendus inssupportables en prenant des airs de haut commandement. On m'a même dit qu'on jugerait deux adjudants "rempilés"».
— Ce «on» pue le mouchardage, remarque-t-il.
Mais, surtout, l'article donne une information que Breton tient pour une insulte personnelle: d'anciens surréalistes conduits par Robert Desnos auraient convaincu un nouveau bar-dancing de Montparnasse de prendre le nom de Maldoror: «Ils disent comme ça que Maldoror, pour un surréaliste, c'est l'équivalent de Jésus-Christ pour un chrétien, et que voir ce nom-là employé comme enseigne, ça va sûrement scandaliser ces messieurs Breton et Aragon.»
C'est peu dire. André Breton, avant toute discussion, a décidé une expédition punitive.

Laurent Greisalmer, L'étoile au front, p.49


Et je songe à l'amitié qui lia Jean Puyaubert et Renaud Camus, à toutes ces conversations qui permirent à Renaud Camus d'être un témoin par procuration de ces années-là, à ce qui nous est raconté par bribes, le prénom de Guilhen3 rencontré dans ces Lettres, Jean Puyaubert et Raymond Queneau, Jean Puyaubert et la septième symphonie de Beethoven, Renaud Camus qui m'écrivait il y a quelques mois qu'il tient encore tous les jours de longues conversations avec son ami Jean Puyaubert… (ceci à propos d'une phrase de Gide reprise dans L'Amour l'Automne: « Hier soir je pensais à elle; je parlais avec elle, comme je faisais souvent, plus aisément en imagination qu'en sa présence réelle; lorsque soudain je me suis dit: mais elle est morte…», Et nunc manet in te).



Note
1 : Quelques mots qui ont été reproduits dans le volume Roger Gilbert-Lecomte et le Grand Jeu, Belfond 1981

2 : L'étoile au front, de Laurent Greisalmer

3 : message 7615 de RC le 8 mars 2004 sur le forum des lecteurs, SLRC.
Pardonnez-moi je suis en voyage, épuisé, il est tard, et ma connexion est exécrable. J'aimerais réagir à beaucoup des messages de cette page (par exemple celui de Cassandre) mais n'en ai ni la force ni les moyens techniques. Ceci seulement (qui n'a rien à voir avec la fleur sur le plancher). Chez les parents de Jean Puyaubert en Corrèze, et dans leur entourage, on aimait beaucoup "Fervaal" (et aussi "Wallenstein", n'est-ce pas de d'Indy? : "le rire sardonique des soldats du camp de Wallenstein…"). Je suis en train de comprendre pourquoi la plus vieille amie de Jean Puyabert s'appelait Guilhen (je me demande si elle n'était pas la tante (ou la mère???) de Michel Picoli). Circa 1990, Jean Puyaubert et elle disaient aux nouveaux venus : «Nous nous connaissons depuis quatre-vingt cinq ans».
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