Ce soir nous avons vu du grand Benoît Lepecq à Guyancourt.

Pantalon orange chapeau noir écharpe rouge, cela suffit à faire un fou dans la grande tradition des fous: celui qui dit et voit la vérité, créant un cercle de solitude autour de lui. Benoît Lepecq a un étrange rayonnement, celui d'une énergie sobre, d'un débordement contenu, cela ressemble à la pâte de verre chauffée au rouge, brûlante et malléable, malléable et brûlante — surtout s'il est habillé d'orange et de rouge.

Le texte est publié, Benoît Lepecq en est l'auteur :
LE HARANGUEUR T'es un intello toi
un hareng intello

LE FOU T'es un harangueur toi
Une espèce de conneau

LE HARANGUEUR J'vais te dépecer moi
J'vais te fendre en deux

Jusqu'aux arêtes !

LE FOU Du moins
Si tu as faim
Déposerais-je dans tes entrailles
Des vers

LE HARANGUEUR Des vers?

LE FOU Une colonie d'asticots qui ira fleurir tes intestins

LE HARANGUEUR Quoi ? LE FOU Devant la tombe hélas
Je crains que nous soyons tous égaux

LE HARANGUEUR Salopard !

LE FOU Je peux t'imaginer cadavre
Providence pour un corbeau croulant
Le dit corbeau
Allant à la mer par mégarde
Proie des krills
Eux mêmes et enfin
Festin pour les harengs

Tu vois bien que tu vas finir
Dans le ventre de celui sur le dos duquel
Tu t'engraisses !

LE HARANGUEUR Tu vas la boucler ta gueule ?

LE FOU Plutôt qu'obliges les harengs à suivre
Votre fumaison sympa […]

Benoît Lepecq, Le Fou, p.42-43
La pièce sera de nouveau donnée le 28 avril. Je songe à y retourner.