Réconciliation

— There can be no reconciliation, Stephen said, if there has not been a sundering.

James Joyce, ''Ulysses'', chap.9, Penguin Student's Edition, 1992

Blonde delight

He murmured then with blonde delight for all:

Between the acres of the rye
These pretty countryfolk would lie.


James Joyce, Ulysses, chap.9, Penguin Student's Edition, 1992

Les hommes de génie ne font pas d'erreur

— Bosh! Stephen said rudely. A man of genius makes no mistakes. His errors are volitional and are the portals of discovery.

James Joyce, Ulysses, chap.9, p.243 Penguin Student's Edition, 1992

Achille parmi les sirènes

Here he ponders things that were not: what Caesar would have live to do he believed the soothsayer: possibilities of the possible as possible: things not known: what name Achilles bore when he lived among women.

James Joyce, Ulysses, chap.9, Penguin Student's Edition, 1992

Préface d'Hélène Philippe aux "Lettres à sa fille" de Calamity Jane

Les Lettres à sa fille de Calamity Jane sont aujourd'hui disponibles aux éditions Rivages. En 1986 ou 1987 je les ai lues en poche, dans la collection Points-virgule du Seuil. Dans cette édition, elles étaient précédées d'une préface qui me paraît importante pour (mieux) les comprendre.

Je la reproduis ici car je pense qu'elle n'est plus disponible.
(Je rappelle qu'il suffit d'appuyer sur l'imprimante dans la marge de droite pour obtenir un pdf plus facile à lire à l'écran.)

On l'appelait Calamité...
Martha Jane Cannary, dite « Calamity Jane », est née à Princeton dans le Missouri, en 1852. Elle était l'aînée de cinq enfants, et fille de pionniers. Son père, Robert Cannary, qu'elle présente dans ses lettres une Bible à la main, était probablement de religion mormone1. Il décida en 1860 de rejoindre avec sa famille la ville de Sait Lake City. Cinq mois furent nécessaires pour couvrir les deux mille cinq cents kilomètres, à travers des Etats que Jane sillonnerait plus tard et marquerait de ses exploits... Sa mère, Charlotte Cannary, mourut pendant le trajet.

On raconte que, très jeune, Calamity Jane eut sa part dans les tâches familiales, et qu'elle apprit aussi très vite à monter à cheval et tirer à la carabine. Mais elle commença à faire vraiment preuve d'originalité lorsque, à quinze ans, orpheline, elle dut subvenir à ses propres besoins : un peu partout sur les territoires des futurs Wyoming, Dakota et Montana, on commença alors à repérer le passage de cette étrange jeune fille qui avait eu l'audace de choisir, outre un bon cheval et un bon fusil, une vie itinérante et solitaire. Disons-le, les témoignages et les documents recueillis à son sujet sont dans l'ensemble très approximatifs et sujets à caution. De surcroît, Calamity Jane a contribué elle-même à semer la confusion dans les esprits, car, si elle n'hésita jamais à donner une bonne raclée aux colporteurs de ragots fielleux, elle s'amusa souvent de certaines fables rapportées sur son compte, qu'elle s'appropriait et racontait à son tour:
«Un nommé Mulog me demande l'histoire de ma vie et tu aurais dû entendre les mensonges que je lui ai racontés (…). S'il veut imprimer des mensonges pour en tirer de l'argent, c'est son affaire. J'ai fait celle qui savait à peine écrire. Comme histoire de ma vie ce sera donc soigné.» (Lettre à sa fille du 20 janvier 19202.)

En fait elle s'engagea dans les équipes de poseurs de rails de la Northern Pacific Railroad3, dans les éclaireurs de l'armée, ou encore dans les convoyeurs. Elle travailla aussi pour les relais postaux. Tout cela à une époque où une femme ne se mettait jamais en pantalon, ne fumait ni ne buvait d'alcool, et n'entrait dans les saloons que comme entraîneuse ou prostituée ! Quand on sait qu'en 1877, une jeune femme fut condamnée à dix dollars d'amende, à Cheyenne (Wyoming), pour être sortie dans la rue en habits d'homme, on imagine la panique, voire la haine que provoquèrent les excentricités de Calamity Jane au milieu de ces populations puritaines! Son arrivée ne laissait jamais indifférents les occupants d'un fort ou les habitants d'une ville, qu'elle fût effectivement reçue comme une calamité, ou accueillie en «reine des plaines».

«Je fus baptisée Calamity Jane à Goose Creek (Wyoming) » — dit-elle dans son Autobiographie — « à l'emplacement actuel de la ville de Sheridan. Le capitaine Egan y était commandant. Nous avions reçu l'ordre de dénicher les Indiens et étions à l'extérieur du fort depuis quelques jours. Nous avions eu de nombreuses escarmouches au cours desquelles plusieurs soldats furent tués et d'autres sévèrement blessés. En retournant au fort, nous tombâmes dans une embuscade à deux kilomètres environ de notre destination. Lorsqu'on fit feu sur le capitaine Egan, je chevauchais à l'avant, et en entendant la fusillade, je me retournai et vis le capitaine tournoyant sur sa selle, prêt à tomber. Je fis demi-tour et galopai jusqu'à lui le plus vite que je pus, je le rattrapai juste comme il tombait. Je le soulevai et le posai sur mon cheval devant moi et réussis à le conduire jusqu'au fort sain et sauf. Le capitaine Egan en revenant à lui me dit en riant: "Je vous nomme Calamity Jane, héroïne des plaines."»

Ses activités au sein de l'armée furent, du reste, très controversées. Elle aurait travaillé comme éclaireuse4 du général Custer, dans l'Arizona, puis du général Crook dans les Black Hills: dernier bastion de la Conquête vers l'Ouest. Convoitée par les Blancs pour ses mines d'or, cette région appartenait encore aux Sioux en 1875. Le travail d'éclaireur consistait à repérer les Indiens, évaluer leur nombre et leurs forces, et transmettre ces informations à l'état-major du corps expéditionnaire. Ces missions demandaient une parfaite connaissance des tactiques indiennes, et des territoires explorés, en plus d'une témérité à toute épreuve. Les éclaireurs étaient souvent des métis, et tous avaient une réputation de grand courage, sinon d'héroïsme; un seul d'entre eux fut une héroïne! Le fait est frappant: de Calamity Jane, la postérité a volontiers retenu la photo qui la représente en costume d'éclaireuse.

Pourtant, dès 1876, sa réputation d'alcoolique commençait à se répandre. Elle avait alors vingt-quatre ans. Cette date correspond à la mort de James Butler Hickok, surnommé «Wild Bill», tueur de grande renommée, auquel elle affirme avoir été mariée. Cet homme avait la réputation de ne tirer que dans le but de tuer, et de ne jamais rater sa cible. Entre 1870, année présumée de leur première rencontre, et 1873, année de la naissance de sa fille Janey, Calamity vécut le plus souvent à Abilene (Kansas), ancienne ville frontière, célèbre pour la violence qui y régnait, et où Wild Bill était alors Marshall5. On raconte que celui-ci, ne voulant pas se compromettre avec une telle femme, gardait leur relation secrète. Il partit d'ailleurs pour l'Est, où il épousa une show-girl, Agnès Lake.
Un an environ après son accouchement, Calamity Jane, restée seule, confia son bébé à deux voyageurs originaires de l'Est : Jim et Helen O'Neil. Elle ne retrouva Wild Bill que trois ans plus tard, en 1876, sur la route de Fort Laramie à Deadwood (Dakota du Sud)6. Leur arrivée dans la ville fut plutôt remarquée. Un groupe d'hommes les accompagnait et Calamity Jane se faisait passer pour l'associée de Wild Bill, le Valet de Carreaux.

C'est peu de temps après, le 2 août 1876, que Wild Bill fut abattu dans le dos, pendant une partie de poker: on aurait payé un certain John Mac Call pour se débarrasser de lui. La mort brutale de celui qu'elle aimait, et admirait, marque un tournant décisif dans la vie de Calamity Jane. Cette déchirure ravivait une douleur toute fraîche: la séparation d'avec son enfant, deux ans auparavant. Elle avait voulu pour sa petite fille la douceur d'une famille stable et les moyens matériels d'une éducation solide; autant d'atouts qui n'étaient pas dans son jeu et dont elle payait maintenant le tribut à la solitude. Cette double coupure justifie sans doute la naissance d'un violent désir d'écrire pour se confier, et d'une non moins violente envie de boire pour oublier.
«Il m'arrive parfois d'être un peu ivre, Janey, mais je ne fais de mal à personne. Il faut que je fasse quelque chose pour vous oublier, ton père et toi, mais je ne suis pas une femme légère, Janey ; si j'en étais une, je ne serais ni infirmière, ni éclaireuse, ni conductrice de diligence. » (Lettre, janvier 1882.)

En 1878, Calamity Jane se rendit célèbre dans la toute récente ville de Deadwood, en acceptant de soigner pendant plusieurs semaines les habitants atteints de variole, et mis en quarantaine. Cette maladie fut un fléau dans l'histoire de l'Ouest: on compte que la variole réduisit de moitié la population indienne au cours du xixe siècle. Soigner des personnes contagieuses inspirait énormément de respect et d'estime; Calamity Jane s'illustra à maintes occasions dans son talent d'infirmière. Femme secourable, elle prit également en charge, pendant quelque temps, plusieurs enfants qu'il lui arrivait de faire passer pour les siens.

Durant les années 80, elle se déplaça beaucoup. Tous les journaux de l'époque témoignent de son passage dans telle ville du Montana, du Nebraska, de l'Orégon même et du Texas! Dans toutes ces allées et venues, on situe mal la date de son mariage avec Charley Burke, qu'elle mentionne dans son Autobiographie, prétendant l'avoir épousé en août 1885 (ce qui ne correspond pas à la date indiquée dans ses lettres). Elle précise qu'elle avait «encore de longues années à vivre seule, et qu'il était temps de prendre un partenaire pour le reste de ses jours». Selon les journaux de l'époque, elle fut mariée à plusieurs autres hommes. On raconte qu'elle prit un ranch dans la «Yellowstone Valley», près de Mile City, puis qu'elle vécut avec un convoyeur. Elle travailla également avec un dénommé Dorsett (mari présumé), dans un ranch de Livingston, avant de partir pour le Colorado, et exerça elle- même le métier de convoyeur7 sur la route de Fort Pierre à Sturgis, conduisant un chariot tiré par des bœufs dans un convoi de provisions.

C'est donc en 1895, après seize ans d'absence, que Calamity Jane retourna à Deadwood, en compagnie de Charley Burke, et d'une petite fille qu'elle présentait comme sa propre fille (il s'agissait probablement de la fille de sa demi-sœur, Belle Starr, dont elle s'occupa pendant plusieurs années et qu'elle plaça ensuite au couvent de Sturgis). Son retour fut fêté par ses vieux amis, et salué dans la presse locale: «Mme Jane Burke est arrivée dans la ville hier, après une absence de seize ans, pendant lesquels elle a vécu avec son mari sur un ranch dans le Montana du Sud-Est. Ils ont traversé le pays jusqu'à Belle Fourche, et Mme Burke est venue à Deadwood pour faire quelques emplettes et renouer avec de vieilles connaissances. » (Pioneer Times, Deadwood, Sud Dakota, 5 octobre 1895.)

Cependant l'histoire de l'Ouest commençait à basculer. La «Conquête» se terminait et une Amérique nouvelle s'installait, récupérant tout ce qui pouvait glorifier son image. De grands spectacles se créaient: dès 1883, Buffalo Bill mit sur pied le ''Wild West Rocky Mountain and Prairie Exhibition, qui retraçait les grands moments de l'épopée de l'Ouest. Il ne fait aucun doute que Calamity Jane connut Buffalo Bill et travailla pour lui, mais les documents officiels manquent pour confirmer sa présence dans le Wild West Show entre 1893 et 1895. En revanche, elle participa en janvier 1896 au Dime Museum de Khol et de Middleton à Minneapolis, qui la présentèrent comme la «fameuse éclaireuse de l'Ouest sauvage (...), la terreur des malfaiteurs des Black Hills! La camarade de Buffalo Bill et de Wild Bill Hickok!». Une tournée était prévue dans d'autres villes de l'Est, mais il semble que son penchant pour la boisson découragea ses employeurs.
Elle réapparut sur la scène en 1901 à Buffalo (Etat de New York), à l'occasion de l'Exposition pan-américaine : tandis qu'un homme relatait ses exploits, elle conduisait un chariot tiré par six chevaux, faisant tournoyer ses pistolets, et tirant des cartouches à blanc. Pour se faire quelque argent, elle vendait aussi son ''Autobiographie'' aux touristes, à l'instar d'autres figures légendaires du Far-West devenues, dans la jeune et fringante Amérique, des objets de curiosité; le chef indien Sitting Bull vendait lui-même sa photographie pendant les entractes du Wild West Show. Ces êtres pétris de liberté en étaient réduits à s'exhiber dans les foires comme des animaux en cage.
A Buffalo, Calamity Jane, ci-devant «diable blanc» des vastes plaines, ne tarda pas à déranger. Rallumant au whisky des bars modernes l'ardeur des grandes chevauchées, il lui arrivait de se battre avec les policiers de la ville! On n'en demandait pas tant à une figure de musée... Elle quitta l'Est. Buffalo Bill prétend lui avoir donné de quoi payer le voyage de retour pour le Montana, où un journal local, le Livingston Post, signalait à nouveau sa présence en avril 1902. Mais, là aussi, une page était définitivement tournée…

Quand elle mourut, le 1er août 1903, deux de ses amis transportèrent son corps de la ville de Terry à Deadwood, et ce sont les membres de «la Société des Pionniers des Black Hills» qui organisèrent ses funérailles lui rendant un dernier hommage. Habillé de blanc, placé dans un cercueil capitonné, son corps fut exposé dans l'arrière-salle d'un saloon, et tous les habitants de Deadwood vinrent lui faire un dernier adieu.
Elle fut enterrée à Mont Moriah Cemetery (Deadwood), à côté de Wild Bill, comme elle l'avait demandé.

Ce n'est que dix ans plus tard que sa fille Janey reçut de son père adoptif les lettres que, durant vingt-cinq ans, Calamity Jane avait rédigées pour elle. On ignore comment l'album, ainsi que le coffret où elle gardait ses objets de famille, parvinrent à Jim O'Neil, mais, soucieux de révéler le plus tard possible à Janey le secret de son adoption, celui-ci ne lui remit ce précieux héritage que peu de temps avant de mourir, en 1912. Janey avait alors trente ans, et vivait en Angleterre. Déjà frappée par le deuil d'un premier enfant, elle fut bouleversée par ces révélations; cependant sa situation familiale ne lui permit pas de se rendre aussitôt dans l'Ouest américain, et les désordres de la Première Guerre mondiale retardèrent encore ce voyage.
Divorcée, remariée, puis veuve, Janey Hickok, devenue Jane MacCornick, tenta sa vie durant de faire établir les preuves de sa filiation et l'authenticité de l'acte de mariage entre Wild Bill et Calamity Jane. En 1941, invitée à la radio à New York à l'occasion de la Fête des mères, elle déclara: «J'aimerais seulement que ma mère puisse savoir combien je suis fière d'être la fille de Calamity Jane.»

«Ceci n'est pas censé être un journal, et il est possible que mes lettres ne te parviennent jamais...» Que ces confessions aient finalement atteint leur destinataire rassure le lecteur et satisfait sa curiosité. «Calamity Jane a appris à lire et à écrire pour nourrir sa fille après sa mort. L'écriture était son expression maternelle8
Mais ce témoignage n'a-t-il pas aujourd'hui pour véritable destination de composer le contre-chant d'une époque, et de porter le cri d'une femme que les temps ont étouffé: WHY DONT THE SONS OF B... LEAVE ME ALONE AND LET ME GO TO HELL IN MY OWN WAY9?

Hélène Phillipe.





1 : Les Mormons ou « Saints », persécutés pour leurs croyances, quittèrent l'Illinois en 1845, commençant une longue et épuisante marche vers l'Ouest: ils furent les premiers à dépasser les montagnes Rocheuses, ouvrant ainsi la piste des chariots. Ils fondèrent Sait Lake City en 1847, sur les bords du Grand Lac salé.
2 : Mulog, de son vrai nom Moluck, est à l'origine d'une « autobiographie », publiée en 1896 sous le titre La Vie et les Aventures de Calamity Jane par elle-même, et qui se termine ainsi: «Espérant que cette petite histoire de ma vie puisse intéresser tous les lecteurs, je reste comme par le passé votre Madame M. Burke (Dorsett), mieux connue sous le nom de Calamity Jane.»
3 : La jonction entre l'Est et l'Ouest par voie ferrée, réalisée par l'Union Pacific et la Central Pacific Railroad, date de 1869. La Northern Pacific et la Southern Pacific Railroad entreprirent par la suite la création d'un réseau ferré en direction du nord et du sud.
4 : Le terme américain est «scout».
5 : Policier municipal.
6 : Deadwood fut créée en 1876 au pied des Black Hills, où convergèrent dds milliers de pionniers atteints par la «fièvre de l'or».
7 : En américain, «bull-whack», littéralement: «celui qui fouette les bœufs». Ce mot n'a pas de féminin.
8 : Préface d'Igrecque dans la première édition (Editions Tierce, 1979)
9 : «Pourquoi ils me foutent pas la paix, ces enfants de salauds! Et si ça me plaît, moi, d'aller au diable?» (Phrase rapportée par un chroniqueur.)

Avoir un garçon

The images of other males of his blood will repel him. He will see in them grotesque attempts of nature to foretell or repeat himself.

James Joyce, Ulysses, chap.9, Penguin Student's Edition, 1992

Avoir une fille

Will any man love the daughter if he has not loved the mother ?

James Joyce, Ulysses, chap.9, Penguin Student's Edition, 1992

W. H.

Or Hughie Wills. Mr William Himself. W. H.: who am I ?

James Joyce, Ulysses, chap.9

L'amour honteux

Love that dare not speak its name.

James Joyce, Ulysses, chap.9

Espoir

Wait before a door sometimes it will open.

James Joyces, Ulysses, p.82 (Penguin 1992)

L'œuvre crée son public

Ce qui est cause qu’une œuvre de génie est difficilement admirée tout de suite, c’est que celui qui l’a écrite est extraordinaire, que peu de gens lui ressemblent. C’est son œuvre elle-même qui, en fécondant les rares esprits capables de le comprendre, les fera croître et multiplier.

Marcel Proust, A l'ombre des jeunes filles en fleurs, Clarac p.529/ Tadié p.519-523

Juan Asensio : les véritables motifs de la procédure pénale

Certains d'entre vous savent que suite à une plainte déposée en 2009 par Jean-Yves Pranchère et moi, une procédure pénale avait été engagée contre Asensio.

Juan Asensio a fait l’objet d’un rappel à la loi en date du 18 juin 2010. Le parquet lui proposait d'en rester là sous réserve d'indemnisation des parties civiles. Asensio ayant refusé toute indemnisation et donc toute conciliation, le parquet a décidé de reprendre les poursuites.

Je vous livre le contenu d la lettre que j'ai reçue il y a quelques jours afin d'éclaircir les motifs de la procédure. Il s'agit de vol de correspondance et d'accès frauduleux dans des système informatiques. Tout ce qu'Asensio peut prétendre de différent est faux.

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS
1 Quai des Orfèvres 75059 PARIS RP - SP
Le 09 février 2011

Parquet du procureur de la République
Service 11EME CHAMBRE/2
N° d'affaire : 0934803013

Première audience au fond

J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'à la suite de la procédure engagée contre M. Juan, Joseph, John ASENSIO, prévenu(e) de

ACCES FRAUDULEUX DANS UN SYSTEME DE TRAITEMENT AUTOMATISE DE DONNEES,
Infraction prévue par ART. 323-1 AL.l C.PENAL., et réprimée par ART. 323-1 AL.l, ART.323-5 C.PENAL., faits commis à Paris en tout cas sur le territoire national entre novembre 2008 et septembre 2009 et depuis temps non prescrit,

ATTEINTE AU SECRET DES CORRESPONDANCES EMISES PAR TELECOMMUNICATION,
Infraction prévue par ART.226-15 AL.2 C.PENAL., et réprimée par ART.226-15 AL.2, ART.226-31 C.PENAL., faits commis à Paris en tout cas sur le territoire national entre novembre 2008 et juillet 2009 et depuis temps non prescrit,

L'affaire sera examinée à l'audience du Tribunal de Grande Instance de Paris, 4 Boulevard du Palais, 75055, PARIS CEDEX 01 le 09 mars 2011 à 09H00, 11EME CHAMBRE/2, SALLE D'AUDIENCE DE LA 11EME CHAMBRE
L'audience est publique et chacun peut venir, qu'il soit intéressé par le fond (l'utilisation d'internet) ou par la forme (la procédure judiciaire).

ajout le 10 avril 2011: Juan Asensio tente de détourner l'attention des chefs d'accusation clairement exposés ici en s'attaquant à un article de Jean-Yves Pranchère sur un tout autre sujet. Celui-ci fait une mise au point sur le blog d'Emmanuel Régniez.

ajout le 15 février 2015: Finalement l'audience du 9 mars ne servira qu'à un report et nous serons entendus le 6 octobre 2011. Après une première condamnation et une seconde, il renoncera finalement à se pourvoir en cassation.

Comme le monde est petit

Comme le monde est petit.

Marcel Proust, Sodome et Gomorrhe, Clarac p.926/ Tadié p.317-318

Chacun sa chance

Le fétiche, c'est le désir même. Le refouler, c'est étouffer son désir. Il ne faut pas l'envisager pour ce qu'il exclut, il n'est pas une phobie, ce n'est pas lui qui dicte les «ceci ou cela s'abst. », mais positivement, pour ce qu'il recherche. Il ne faut pas non plus le considérer au niveau individuel, chez chacun d'entre nous séparément, mais globalement, chez l'ensemble des acteurs de la vie sexuelle. Frappe alors son extrême diversité, semblable à celle des goûts, dont il n'est qu'une variante un peu plus têtue.

Ainsi j'aurais un fétiche de la moustache, ou du poil, ou de la petite taille, mais d'autres ont un fétiche des énormes sexes, des yeux bleus, des yeux verts, des tatouages, de la corpulence, de l'âge mûr, du grand âge, des tempes argentées, de la calvitie. Rien apparemment qui ne puisse faire l'objet d'un goût fétichiste. Comme le charme, comme la séduction, comme l'intelligence, comme l'affection, comme la tendresse, le fétiche sape la morne dictature sexuelle de la beauté, la fastidieuse tyrannie de la jeunesse. Grâce à eux, grâce à lui, elles ne sont plus seules à susciter le désir. Vous trouvez ce type affreux, moi il me met en rut. II n'est presque personne qui n'ait à offrir pâture à un fétiche quelconque. 86 ans? —Le pied! 9 ans et demi? —Moi, moi! Monté comme un cheval? —Je craque! Comme un caniche? —Ça me rappelle mes touche-pipi chez les bons pères, j'achète! Des poils sur les épaules? —Houba houba! Le pubis glabre? —Génial! 210 kilos? —Ça commence à devenir intéressant... On voit ses côtes, un fakir? —Tout ce que j'aime! Bossu? —Mon rêve! Le nez cassé, chauve, pas de cou, la vraie bête? —Arrête, j'vais jouir! Rien, pas la moindre particularité? —Mais c'est justement ça qui me touche, chez lui, et qui me fait bander...

Et puis bien sûr il y a les vrais fétichismes, dans l'acception plus traditionnelle du mot, le cuir, le caoutchouc, les «costumes trois-pièces», les slips Petit-Bateau, les baskets sales, les pardessus en loden, les uniformes de CRS, de pompier, de député socialiste, de Maire de Paris, les jarretelles noires, les lunettes, et de quoi déjà a-t-il été récemment question dans un «Reflet» de Gai Pied, la bambinette? Voyez comme, grâce au fétiche, chacun a sa chance, et comme il moque, narquois, l'autorité, qu'on avait crue irréversible, de la nature. Ce garçon ne vous dit rien? Peut-être vous émouvrait-il un peu davantage dans sa tenue de gardien de la paix? Not your trip? Mais ce ne sont pas les seules particularités physiques, ou les «accessoires», qui peuvent s'ériger en fétiches, des pratiques aussi bien. Tel aime qu'on lui masse les doigts de pied, ou les baisers dans le cou, ou les lavements, ou pisser sur ses petits camarades. Songeons encore aux possibles lieux d'action : fétichisme de l'ascenseur, du sexe de masse dans les cabines téléphoniques, de l'enculage sur motocyclette à deux cents à l'heure le long d'une autoroute (soyez prudents), du phare isolé sur son rocher.

Renaud Camus, Chroniques achriennes, p.43-44

Un acte décisif

I have often thought since on looking back over that strange time that it was that small act, trivial in itself, that striking of that match, that determined the whole aftercourse of both our lives.

James Joyce, Ulysses, p.177 (chapitre 7) - Penguin 1992

Tonneaux qui roulent

Grossbooted draymen rolled barrels dullthudding out of Prince's stores and bumped them up on the brewery float. On the brewery float bumped dullthudding barrels rolled by grossbooted draymen out of Prince's stores.

James Joyce, Ulysses p.148 (Penguin annotated student's edition - 1992)

Le Zahir est une monnaie courante

Note préparatoire à la lecture de la note 9 du chapitre III de L'Amour l'Automne (p.158-161)
Dans la figure oxymoron, on applique à un mot une épithète qui semble le contredire; c'est ainsi que les gnostiques ont parlé de lumière obscure, les alchimistes, d'un soleil noir. Sortir de ma dernière visite à Teodelina Villar et prendre un verre dans un bistrot était une espèce d'oxymoron; je fus tenté par sa rusticité et son accès facile (le fait que l'on jouât aux cartes augmentait le contraste). Je demandai une orangeade; en me rendant la monnaie, on me donna le Zahir; je le contemplai un instant; je sortis dans la rue, peut-être avec un début de fièvre. Je pensai qu'il n'y a point de pièce de monnaie qui ne soit un symbole de celles qui sans fin resplendissent dans l'histoire et la fable. Je pensai à l'obole de Caron; à Judas; aux drachmes de la courtisane Laïs; à la pièce ancienne qu'offrit l'un des Dormants d'Éphèse; aux claires pièces de monnaie du sorcier des Mille et Une Nuits, qui par la suite n'étaient que cercles de papier; au denier inépuisable d'Isaac Lequedem; aux soixante mille pièces d'argent, une pour chaque vers d'une épopée, que Firdusi restitua à un roi parce qu'elles n'étaient pas en or; à l'once d'or que fit clouer Achab sur le mât; au florin irréversible de Léopold Bloom; au louis dont l'effigie trahit, près de Varennes, Louis XVI en fuite.

[…]

[…] Selon la doctrine idéaliste, les verbes vivre et rêver sont rigoureusement synonymes […]

Jorge Luis Borgès, «Le Zahir», in L'Aleph

De Lupin à Charlus

Didier Blonde a la passion des adresses romanesques. Elles sont le moyen privilégié de faire communiquer le réel et la fiction; l'occasion également de découvrir soit les astuces des auteurs (les bis et les ter inexistants se multiplient autour de numéros réels), soit des curiosités du plan parisien (un numéro apparaît ou disparaît, au gré des carrefours, percement de rues ou opérations plus mystérieuses), soit des secrets et souvenirs émouvants (Modiano, souvent), soit des lapsus (Sartre décrivant la vue de sa fenêtre, impossible à partir de la chambre de son narrateur).
Didier Blonde tend à construire des phrases inutilement compliquées et d'adresse en adresse il est parfois difficile de le suivre. Mais les maladresses et le ton didactique diminuent au fur à mesure qu'on avance dans le livre et la dernière partie est tout à fait chaleureuse. (Il ne manque à ce livre qu'un index).

J'ai choisi ici une coïncidence églogale (mais ce n'est pas une coïncidence), le passage dans lequel Blonde nous apprend que l'une des adresses de Lupin s'adossait à l'hôtel de Montesquiou:
Comme je m'en assurais par toute une série d'indices en confrontant d'anciens plans à des vues aériennes et en relevant sur place des mesures comme un arpenteur du passé, l'arrière de la maison \[95, rue Charles Lafitte à Neuilly] donnait, du vivant même d'Arsène Lupin, sur le dos d'une magnifique demeure du dix-huitième siècle, aujourd'hui détruite, appelée le Pavillon des Muses. Son entrée se trouvait exactement de l'autre côté du pâté d'immeubles, au 96, boulevard Maillot, rebaptisé depuis sur cette section boulevard Maurice Barrès. Et sa propriétaire était alors Jehanne Leblanc, sœur aînée de l'écrivain.

[…] Après consultation des archives de la maison, j'allais me rendre compte bientôt que Maurice Leblanc avait peut-être un autre nom auquel l'histoire familiale faisait écran: le Pavillon des Muses avait été précédemment occupé — en 1905, au moment où Lupin commençait sa carrière en défrayant la chronique — par un illustre dandy de la Belle Époque, Robert de Montesquiou, comte de Fezensac, ami intime de Proust, qui après avoir été l'un des modèles de des Esseintes dans À rebours de Huysmans avait posé pour celui du baron de Charlus. L'espace se multipliait comme dans un palais des mirages. Panneaux coulissants, miroirs sans tain, portes dérobées dans les fleurs des tapisseries, une adresse conduisait à une autre et mettait en correspondance mes lectures. Dans la même phrase, je voyais Arsène Lupin ouvrir avec passe-partout la porte de son entrepôt et réapparaître quelques mots plus loins, de l'autre côté du mur, sa canne et son huit-reflets à la main, dans le «Salon blanc» ou le «Salon des Roses» parmi les invités de Montesquiou, tous les familiers du monde de la Recherche. Lupin, cette fois, me conduisait à Proust.

Didier Blonde, Carnet d'adresses, p. 27-29

Des titres et des lettres

Books you were going to write with letters for titles. Have you read his F? O yes, but I prefer Q. Yes, but W is wonderful. O yes, W.

James Joyces, Ulysses, p.50 (Penguin 1992)

Exemples d'universaux

Mais la haine peut être ressentie contre les classes.
Aristote

Il nous arrive, par la volonté, d'aimer ou de haïr quelque chose en général.
Thomas d'Aquin

J'aime les pommes en général.
Jacques Chirac

Alain de Libera, La querelle des universaux, exergues

Bibliographie Chine-Japon

Je ne fais pas de compte rendu puisqu'il s'agit de conférences en accès réservé.
Cependant je mets en ligne les bibliographies distribuées par les intervenants.


L'Europe et l'Asie (XVIIIe siècle à nos jours)
Bibliographie indicative de Frédérice Mantienne (professeur et éditeur des Indes savantes)
  • Europe et Asie, cultures et contacts
- Jack Goody, L'Orient en Occident, Le Seuil, 1999
- Etiemble, L'Europe chinoise, Gallimard, 1988, 2 volumes (une étude fouillée de l'interaction culturelle et politique de la Chine et de l'Europe aux XVIIe et XVIIIe siècles)
  • Europe et Asie, la rencontre commerciale
Philippe Audrère, Les Compagnies des Indes orientales. Trois siècles de rencontre entre Orient et Occident, Desjonquères, 2006
  • Europe et Asie, la rencontre politique et militaire: colonisation et impérialisme
- Nora Wang, L'Asie orientale du milieu du XIXe siècle à nos jour, Armand Colin, 1993 (la meilleure synthèse historique. Plusieurs éditions plus récentes l'ont remis à jour)
- Karl Trocki, Opium, Empire and the Global Political Economy, Routledge, 1999
  • Europe et Asie : les grands bouleversements et la naissance de la mondialisation
- André Gunder Frank, ReOrient. Global Economy in the Asian, University of California Press, 1998
- Kenneth Pomeranz, Une grande divergence. La Chine, l'Europe et la construction de l'économie mondiale, Albin Michel, 2010 (original paru en 2001, P.U. Princeton)



Chine ou Japon, quel leader pour l'Asie ?
Bibliographie sélective par Claude Meyer
  • Chine et Japon
Claude Meyer, Chine ou Japon, quel leader pour L'Asie ?, Presses de Sciences Po, 2010
  • Chine
- Jean-Pierre Cabestan, La politique internationale de la Chine, Presses de Sciences Po, 2010
- Jean-Luc Domenach, La Chine m'inquiète, Perrin, 2008
- Françoise Lemoine, L'économie de la Chine, La Découverte, 2006
- Jean-Louis Rocca, Une sociologie de la Chine, La Découverte, 2010
  • Japon
- Collectif (dir. J M Bouissou), Le Japon contemporain, Fayard, 2007
- Karyn Poupée, Les Japonais, Taillandier, 2009

Dialogue

Si vous le pouvez, trouvez un ami complaisant qui accepte de lire le livre en même temps que vous, et avec qui vous pourrez ainsi discuter les points les plus délicats. Toute conversation est un atout extraordinaire pour aplanir une difficulté. En ce qui me concerne, s'il m'arrive de rencontrer, en logique ou dans toute autre matière un peu ardue, un point que je sois absolument incapable de comprendre, je trouve idéal d'en parler à haute voix même si je suis tout seul. Il est si facile de se donne à à soi-même des explications! Et puis, vous comprenez, on est si patient avec soi-même! Jamais on ne s'irrite de sa propre stupidité!

Lewis Carroll, Logique sans peine p.50, «à l'adresse des débutants»
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