Véhesse

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

lundi 14 février 2011

Chacun sa chance

Le fétiche, c'est le désir même. Le refouler, c'est étouffer son désir. Il ne faut pas l'envisager pour ce qu'il exclut, il n'est pas une phobie, ce n'est pas lui qui dicte les «ceci ou cela s'abst. », mais positivement, pour ce qu'il recherche. Il ne faut pas non plus le considérer au niveau individuel, chez chacun d'entre nous séparément, mais globalement, chez l'ensemble des acteurs de la vie sexuelle. Frappe alors son extrême diversité, semblable à celle des goûts, dont il n'est qu'une variante un peu plus têtue.

Ainsi j'aurais un fétiche de la moustache, ou du poil, ou de la petite taille, mais d'autres ont un fétiche des énormes sexes, des yeux bleus, des yeux verts, des tatouages, de la corpulence, de l'âge mûr, du grand âge, des tempes argentées, de la calvitie. Rien apparemment qui ne puisse faire l'objet d'un goût fétichiste. Comme le charme, comme la séduction, comme l'intelligence, comme l'affection, comme la tendresse, le fétiche sape la morne dictature sexuelle de la beauté, la fastidieuse tyrannie de la jeunesse. Grâce à eux, grâce à lui, elles ne sont plus seules à susciter le désir. Vous trouvez ce type affreux, moi il me met en rut. II n'est presque personne qui n'ait à offrir pâture à un fétiche quelconque. 86 ans? —Le pied! 9 ans et demi? —Moi, moi! Monté comme un cheval? —Je craque! Comme un caniche? —Ça me rappelle mes touche-pipi chez les bons pères, j'achète! Des poils sur les épaules? —Houba houba! Le pubis glabre? —Génial! 210 kilos? —Ça commence à devenir intéressant... On voit ses côtes, un fakir? —Tout ce que j'aime! Bossu? —Mon rêve! Le nez cassé, chauve, pas de cou, la vraie bête? —Arrête, j'vais jouir! Rien, pas la moindre particularité? —Mais c'est justement ça qui me touche, chez lui, et qui me fait bander...

Et puis bien sûr il y a les vrais fétichismes, dans l'acception plus traditionnelle du mot, le cuir, le caoutchouc, les «costumes trois-pièces», les slips Petit-Bateau, les baskets sales, les pardessus en loden, les uniformes de CRS, de pompier, de député socialiste, de Maire de Paris, les jarretelles noires, les lunettes, et de quoi déjà a-t-il été récemment question dans un «Reflet» de Gai Pied, la bambinette? Voyez comme, grâce au fétiche, chacun a sa chance, et comme il moque, narquois, l'autorité, qu'on avait crue irréversible, de la nature. Ce garçon ne vous dit rien? Peut-être vous émouvrait-il un peu davantage dans sa tenue de gardien de la paix? Not your trip? Mais ce ne sont pas les seules particularités physiques, ou les «accessoires», qui peuvent s'ériger en fétiches, des pratiques aussi bien. Tel aime qu'on lui masse les doigts de pied, ou les baisers dans le cou, ou les lavements, ou pisser sur ses petits camarades. Songeons encore aux possibles lieux d'action : fétichisme de l'ascenseur, du sexe de masse dans les cabines téléphoniques, de l'enculage sur motocyclette à deux cents à l'heure le long d'une autoroute (soyez prudents), du phare isolé sur son rocher.

Renaud Camus, Chroniques achriennes, p.43-44

Un acte décisif

I have often thought since on looking back over that strange time that it was that small act, trivial in itself, that striking of that match, that determined the whole aftercourse of both our lives.

James Joyce, Ulysses, p.177 (chapitre 7) - Penguin 1992

Tonneaux qui roulent

Grossbooted draymen rolled barrels dullthudding out of Prince's stores and bumped them up on the brewery float. On the brewery float bumped dullthudding barrels rolled by grossbooted draymen out of Prince's stores.

James Joyce, Ulysses p.148 (Penguin annotated student's edition - 1992)

À retenir

Index

Catégories

Archives

Syndication



vehesse[chez]free.fr


del.icio.us

Library

Creative Commons : certains droits réservés

| Autres
Les billets et commentaires du blog vehesse.free.fr sont utilisables sous licence Creatives Commons : citation de la source, pas d'utilisation commerciale ni de modification.