Véhesse

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mercredi 27 mai 2015

Les pères conciliaires font des calembours

Pendant Vatican II, deux bars avaient été installés pour permettre aux pères de se détendre entre deux votes.
Il y avait parfois plus du quart des Pères qui désertaient l'aula pour fréquenter les deux bars où les discussions allaient bon train. La verve conciliaire n'avait pas tardé à leur trouver deux noms, l'un se nommait Bar Jonas, l'autre Bar Abbas1!

Christine Pedotti, La bataille de Vatican II, p.141, Plon, 2012


Note
1 : L'apôtre Pierre est nommé dans l'Evangile Simon, Bar Jonas, «fils de Jonas». Barrabas est le nom du brigand dont la grâce est demandée à Pilate, plutôt que celle de Jésus. Selon certaines sources, le nom du second bar serait Bar-Mitzvah.

dimanche 24 mai 2015

La fête de l'alphabet

J'ai appris la langue française dans mon pays natal, la Bulgarie. Lorsque mon français s'est suffisamment amélioré pour que notre professeur puisse nous donner à lire des textes importants, j'ai découvert Proust à travers deux phrases: «Les beaux livres sont écrits dans une sorte de langue étrangère», et «Le devoir et la tâche d'un écrivain sont ceux d'un traducteur».

Ces propos ont étrangement résonné pour moi avec la Fête de l'alphabet qui est, dans mon pays natal, un événement unique au monde. Tous les 24 mai, les écoliers mais aussi les intellectuels, les professeurs, les écrivains manifestent en arborant une lettre. J'étais une lettre, puisque j'en portais une épinglée à mon chemisier, sur mon corps, dans mon corps. Le verbe s'était fait chair et la chair se faisait mots. Je me diluais dans les chansons, dans les parfums, dans la liesse de cette foule. En lisant ces mots de Proust, j'ai eu le sentiment qu'ils faisaient état de quelque chose que j'avais vécu: il s'agissait d'entrer au fond de moi-même comme dans un livre chiffré et charnel pour le traduire dans un autre, à faire lire et partager. Ce travail d'interprétation du texte allait devenir par la suite mon métier. J'ai essayé de l'appliquer à Mallarmé, à Céline et à d'autres écrivains dont Proust évidemment. Absolument.

Julia Kristeva, "Portrait de lecteur" in Un été avec Proust, p.123-124, éditions des Equateurs/France Inter 2014

samedi 23 mai 2015

Markus Vinzent et la datation des évangiles

J'apprends en cours de grec qu'un certain Markus Vinzent (inconnu de la plupart d'entre nous, certes, mais tout de même l'un des organisateurs du colloque de patristique quadriannuel d'Oxford (il se tient cet été, si cela intéresse certains d'entre vous)) remet en cause la datation des évangiles, en attribuant leur rédaction à une réaction à Marcion. Son livre, non traduit, s'intitule Christ's Resurrection in Early Christianity.

La professeur a l'air scandalisée: «Quand on essaie de refaire la démonstration, on s'aperçoit que les citations sont tronquées et manipulées, coupées avant une négation, prises hors contexte, etc. Vinzent tient un blog, la plupart des thèses de son livre s'y trouvent.»

Quelques recherches plus tard, je trouve un article en français. Résumé:
Importante pour Paul, la Résurrection du Christ ne l’aurait pas été pour la plupart des chrétiens, si Marcion, au milieu du IIe siècle, ne l’avait pas redécouverte et remise au goût du jour. Cette thèse provocatrice de Markus Vinzent suppose une redatation postérieure à Marcion de la plupart des écrits du Nouveau Testament, notamment des Évangiles canoniques, où la Résurrection joue un rôle essentiel. Dans ces pages, Christophe Guignard propose un examen critique de cette prémisse essentielle à la thèse de Vinzent.

Christophe Guignard, Etudes théologiques et religieuses, tome 2013/3, pages 347 - 363
Ici un débat sur la méthode de Vinzent illustrant l'effarement de ma prof.
J'ajoute un lien vers ce très beau blog (au moins pour les photos) sur l'Antiquité et la patristique. Je l'ai trouvé grâce à ce titre de billet qui me fait rire: Markus Vinzent a-t-il été enlevé par les aliens? et qui se demande comment un professeur sain d'esprit peut raconter de telles absurdités.

mercredi 20 mai 2015

A l'amiable

Pas le plus petit mot écrit ne me fut donné pour garantir l'engagement essentiel qu'ils avaient pris. On me lut certains passages de leurs lettres, sans mettre celles-ci entre mes mains. C'était une «entente à l'amiable». Un homme intelligent1 m'avait mis en garde contre les «ententes à l'amiable» environ treize ans auparavant. Je les ai toujours détestées depuis.

John Henry Newman, Apologia pro vita sua, p.241, Ad Solem,2008


Note
1 : C'était le Rév. E. Smedley (1788-1836), directeur de l'Encyclopedia metropolitana. Comme j'alléguai, un jour, qu'une entente à l'amiable était intervenue entre les éditeurs de l'Encyclopedia et moi, il m'écrivit le 5 juin 1828: «Je déteste ce mot, qui est toujours synonyme de mésentente, et qui annonce plus d'ennuis que tous les autres mots de notre langue, sauf peut-être l'expression apparentée: par délicatesse.»
En réalité, ce n'est pas tant «entente à l'amiable» qui est en cause ici que l'absence d'engagement écrit: un accord peut être amiable, cela ne l'empêche pas de devoir être écrit.

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