Véhesse

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Billets pour la catégorie Au fil de(me)s jours :

mardi 13 septembre 2016

PAL de pals

Pile à lire de livres d'amis ou de connaissance, livres qui attendent dans ma bibliothèque (cette liste en forme de remords et d'engagement moral (de les lire au plus tôt, bien sûr)).

Par ordre alphabétique:

- Un article de Jean Allemand, un article de Patrick Chartrain (sur Jean Allemand!) à l'occasion du centenaire de la naissance de Claude Mauriac in Nouveaux Cahiers François Mauriac n°23, Grasset, 2016.

- Laurent Chamontin, L'empire sans limites, éditions de l'Aube, 2014. Ses articles sur Diploweb sont à lire ici, en bas de page.

- Justine Lacroix et Jean-Yves Pranchère, Le Procès des droits de l'homme, Seuil, 2016 Les articles et entretiens sur le web sont nombreux.

- Guillaume Orignac, David Fincher ou l'heure numérique, éditions Capricci, 2011 (édition que je possède), 2014 pour l'édition augmentée.

- Rémi Pellet, Droit financier public, PUF, 2014 (plus historique et moins austère que le titre ne le laisse craindre).

lundi 11 avril 2016

Panama

Je me souviens que l'excellente Exobiographie d'Obaldia parle du creusement du canal de Panama. Je ne l'ai pas sous la main, donc je ne peux citer, mais à ma grande surprise, j'y ai appris que Gauguin a participé au chantier, un chantier terrible dans l'humidité et les moustiques.

Je me souviens que le canal de Panama joue un grand rôle dans Les voyageurs de l'impériale.

Dans la série "mes amis ont du talent", je vous propose un pa(nama)stiche de Victor Hugo et un de La Fontaine.

Et une anthologie fantastique (j'en reste coite) ici: Panamanière. Bravo à tous, à ceux que je connais et ceux que je ne connais pas. Chapeau bas !

jeudi 26 novembre 2015

Tareq Oubrou et l'ostentation de l'islam

En mars 2013, j'ai acheté et lu L'islam que j'aime, l'islam qui m'inquiète, de Christian Delorme.
Je l'ai acheté avant tout à cause d'une préface de Tareq Oubrou.
Je ne connaissais pas cet imam, je n'en avais jamais entendu parler avant de feuilleter ce livre. La préface commençait (presque: le deuxième paragraphe) ainsi:
[…] Pour ma part, j'appartiens à ces musulmans qui ont la chance de rencontrer le christianisme à travers des hommes et des femmes de grande qualité. Et je prie ici d'emblée le lecteur d'excuser l'intrusion de mon «je» dans cette préface. Il n'est que l'expression d'un témoignage qui s'inscrit dans l'esprit même de l'ouvrage.

Ma première rencontre islamo-chrétienne remonte à une période où j'étaits encore dans le ventre maternel, vers la fin des années cinquante. Ma mère, enceinte, suivait alors des cours de puériculture donnés par des religieuses catholiques dans une maison d'accueil (dar el-halîb)1 laquelle se trouvait dans une église de Taroudant (Maroc), ma ville natale. Elle y a confectionné sa première layette dont je garde encore affectueusement une pièce

[…] La deuxième rencontre, toujours au Maroc, eut lieu à l'école maternelle Sainte-Anne, dirigée par des sœurs, à Agadir cette fois-ci. Je ne fis donc pas mes premiers pas dans une école coranique, devant un «fqîh»2, dont l'image et la méthode d'enseignement étaient généralement sévères, mais dans une maternelle avec des sœurs d'une grande gentillesse. […]

Préface de Tareq Oubrou, L'islam que j'aime, l'islam qui m'inquiète, p.1 et 2, Bayard, 2012
Sainte-Anne, c'est aussi un souvenir pour moi. C'est le lieu de mes premières années de catéchisme et de ma première communion. C'est le lieu de souvenirs heureux et extrêmement vivaces. J'ai acheté le livre.

Quatrième de couverture:
«Pour toute une partie des habitants de culture musulmane, le recours à un islam ostentatoire fonctionne comme une compensation à l'exclusion qu'ils vivent ou ressentent. Avant de voir là une "montée de l'islam", constatons d'abord un échec de la République.»

Ibid, Christian Delorme, quatrième de couverture
Hier circulait sur internet une interview de Tareq Oubrou. En voici des extraits:
— La visibilité actuelle de l’islam fait peur à l’identité française, et elle est aussi nuisible à la spiritualité musulmane. Il faut en finir avec la bédouinisation de l’islam. Phagocyté par le wahhabisme saoudien, le salafisme consiste à bédouiniser l’islam avec des moyens technologiques particulièrement développés. C’est un retour à l’histoire pré-islamique mais certainement pas un retour à l’état de l’Islam. Cette visibilité identitariste n’a rien à voir avec un enracinement mystique ou spirituel, mais répond à une logique de minorités qui veulent se préserver en s’attachant aux écorces au lieu de s’attacher à l’esprit de la religion.
— Que voulez-vous dire par écorce ?
— Tout ce qui participe à l’islam folklorique de la visibilité à outrance. Le propre de la religion, c’est la discrétion, la modestie, le travail intérieur et non l’exhibition. Il faut changer complètement de paradigme.

Le 24 novembre 2015, interview de Pascal Meynardier pour Paris-Match



Notes
1 : Qui signifie «maison de lait»
2 : L'îmam, en dialecte marocain

mardi 24 novembre 2015

Les actes du diable

Parce que je lis Nadler, Le philosophe, le prêtre et le peintre et les déboires de Descartes face aux théologiens, je souris en trouvant cet article du Monde: qu'auraient pensé les théologiens, est-ce très orthodoxe d'attribuer les catastrophes naturelles à Dieu?
«[…] Il y a trois grandes familles de riques. Dans notre jargon d'assureurs, nous parlons en anglais des «acts of God», des «acts of men» et enfin des «acts of evil». Les «acts of God», ce sont les catastrophes naturelles. La Terre est imparfaite, les rivières débordent, la terre secoue, les volcans entrent en étuption, les côtes sont submergées par des raz de marée. les phénomènes naturels ont toujorus été extrêmement prégnants. […] Ils représentent en moyenne 75% à 80% des destructions par an. La Terre reste la principale source de risque pour l'humanité.

Les «acts of men», ce sont les risques technologiques. Nous les créons et nous en créons beaucoup. Lorsqu'on a développé le nucléaire, nous avons créé des risques nucléaires. C'est la même chose pour à peu près tous les risques. […] Le progrès crée à peu près autant de risques qu'il en résout. La technologie, à l'heure actuelle, est en train d'être un pourvoyeur de risque extraordinaire. […]

Enfin, il y a des «actes du diable». Ce sont des destructions volontaires, intentionnelles de richesses et d'hommes. C'est ce que nous avons vécu ces jours-ci. […] Ce qui nous fait peur, c'est que les terroristes utilisent la technologie pour pouvoir y arriver, qu'ils n'utilisent non plus comme à l'heure actuelle des armes traditionnelles, mais recurent à d'autres moyens, comme par exemple le développent de virus bactériologiques, ou le nucléaire. Dans ce cas-là; on passerait de l'ère du terrorisme à l'ère de l'hyper-terrorisme. Cette phase, si elle survenait, créerait cette fois-ci une vulnérabilité mondiale aux conséquences considérables à l'échelle de l'humanité, puisqu'on peut imaginer, dans certains scénarios, des centaines de milliers de morts et des centaines de milliards de dégâts en une seule opération. […] les assureurs travaillent à l'heure actuelle sur le risque d'hyper-terrorisme.»

La menace d'un état terroriste : «Faisons attention: pour éviter de passer du terrorisme actuel à l'hyper-terrorisme, il faut absolument éviter que le terrorisme devienne un terrorisme d'Etat. C'est, à mon avis, l'enjeu de la phase qui s'ouvre, parce que si le terrorisme est appuyé par des Etats en matière de financement, de recherche, de moyens logistiques, on entrerait dans une ère d'hyper-terrorisme. […] C'est pourqoi il est fondamental que «l'Etat islamique», «Daesh», ne devienne pas un Etat en tant que tel, avec les moyens d'un Etat.»

Denis Kessler interrogé par Alain Franchon et Vincent Giret. Le Monde du 19 novembre 2015

mardi 17 novembre 2015

Hommages conservés ici pour mémoire, quand tout cela sera derrière nous

Les messages de solidarité affluent de partout. En voici deux qui m'ont touchée plus particulièrement.
Le premier est très connu, c'est un commentaire sur le site du New York Times — enfin très connu des facebookiens, mais je ne sais pas si ce texte a tourné dans les médias. Je suis touchée par les messages qui viennent de l'étranger, c'est comme si leur amour nous autorisait à nous aimer enfin, au moins pour quelques heures.
Mais tout de même, ne sont-ils pas trop gentils? Il n'y a rien de si extraordinaire à l'odeur d'un croissant, il doit être possible de trouver cela ailleurs qu'en France, non? Je lis à voix haute la traduction de l'article à H. qui me répond: «trouver tout cela ensemble au même endroit? non, ce n'est peut-être pas si facile à trouver.»
Blackpoodles - Santa Barbara 1 day ago
France embodies everything religious zealots everywhere hate: enjoyment of life here on earth in a myriad little ways: a fragrant cup of coffee and buttery croissant in the morning, beautiful women in short dresses smiling freely on the street, the smell of warm bread, a bottle of wine shared with friends, a dab of perfume, children paying in the Luxembourg Gardens, the right not to believe in any god, not to worry about calories, to flirt and smoke and enjoy sex outside of marriage, to take vacations, to read any book you want, to go to school for free, to play, to laugh, to argue, to make fun of prelates and politicians alike, to leave worrying about the afterlife to the dead.
No country does life on earth better than the French.
Paris, we love you. We cry for you. You are mourning tonight, and we with you. We know you will laugh again, and sing again, and make love, and heal, because loving life is your essence. The forces of darkness will ebb. They will lose. They always do.
D'après Slate, l'origine de l'article a été identifiée par le capitaine. Je copie la traduction de Slate en la modifiant un peu:
La France incarne tout ce que haïssent les fanatiques religieux du monde entier: la jouissance de la vie ici sur terre d'une multitude de manières: une tasse de café qui embaume accompagnée d'un croissant le matin; de jolies femmes en robe courte souriant librement dans la rue; l'odeur du pain chaud; une bouteille de vin partagée entre amis, une trace de parfum, des enfants jouant au jardin du Luxembourg, le droit de ne pas croire en Dieu, de ne pas s'inquiéter des calories, de flirter et de fumer et de faire l'amour hors mariage, de prendre des vacances, de lire n'importe quel livre, d'aller à l'école gratuitement, de jouer, de rire, de débattre, de se moquer des prélats comme des hommes et des femmes politiques, de laisser aux morts les interrogations sur la vie après la mort.
Aucun pays ne profite aussi bien de la vie sur terre que la France.
Paris, nous t'aimons. Nous pleurons pour toi. Tu es en deuil ce soir, et nous le sommes avec toi. Nous savons que tu riras à nouveau et que tu chanteras à nouveau, que tu feras l'amour et que tu guériras, parce qu'aimer la vie est ton être-même. Les forces du mal vont reculer. Elles vont perdre. Elle perdent toujours.
Un autre témoignage est moins connu. C'est un poème de Natalia Antonova qu'une amie FB a posté sur son mur. J'aime beaucoup la première strophe. Je la lis en ayant en tête «Dans les rues de la ville il y a mon amour» et Swann «C’est gentil, tu as mis des yeux bleus de la couleur de ta ceinture».
A Paris ils posent les bonnes questions :
« Cognac, armagnac ou calva ? »
Et : « Pourquoi vos yeux sont-ils si bleus ? »
« Savez-vous comment rentrer chez vous ? »
« Est-ce enfin le moment de s'embrasser ? »

samedi 23 mai 2015

Markus Vinzent et la datation des évangiles

J'apprends en cours de grec qu'un certain Markus Vinzent (inconnu de la plupart d'entre nous, certes, mais tout de même l'un des organisateurs du colloque de patristique quadriannuel d'Oxford (il se tient cet été, si cela intéresse certains d'entre vous)) remet en cause la datation des évangiles, en attribuant leur rédaction à une réaction à Marcion. Son livre, non traduit, s'intitule Christ's Resurrection in Early Christianity.

La professeur a l'air scandalisée: «Quand on essaie de refaire la démonstration, on s'aperçoit que les citations sont tronquées et manipulées, coupées avant une négation, prises hors contexte, etc. Vinzent tient un blog, la plupart des thèses de son livre s'y trouvent.»

Quelques recherches plus tard, je trouve un article en français. Résumé:
Importante pour Paul, la Résurrection du Christ ne l’aurait pas été pour la plupart des chrétiens, si Marcion, au milieu du IIe siècle, ne l’avait pas redécouverte et remise au goût du jour. Cette thèse provocatrice de Markus Vinzent suppose une redatation postérieure à Marcion de la plupart des écrits du Nouveau Testament, notamment des Évangiles canoniques, où la Résurrection joue un rôle essentiel. Dans ces pages, Christophe Guignard propose un examen critique de cette prémisse essentielle à la thèse de Vinzent.

Christophe Guignard, Etudes théologiques et religieuses, tome 2013/3, pages 347 - 363
Ici un débat sur la méthode de Vinzent illustrant l'effarement de ma prof.
J'ajoute un lien vers ce très beau blog (au moins pour les photos) sur l'Antiquité et la patristique. Je l'ai trouvé grâce à ce titre de billet qui me fait rire: Markus Vinzent a-t-il été enlevé par les aliens? et qui se demande comment un professeur sain d'esprit peut raconter de telles absurdités.

vendredi 9 janvier 2015

"Charlie" met la main sur le Front national

En fouillant dans mes archives, je retrouve cet article de Charlie hebdo de janvier 1999, et je me souviens de mon ravissement devant la pureté du procédé quand j'avais entendu évoquée cette affaire du fond de mon lit par le radio-réveil. (C'était avant le 11 septembre 2001, le mur était tombé, l'apartheid était fini, nous espérions un monde meilleur, certains parlaient de "fin de l'histoire" et les méchants, c'était résolument l'extrême-droite qui, nous l'espérions tous, n'en avait plus pour très longtemps.)

Je recopie l'article sur deux colonnes et un encadré.

Article : «Charlie met la main sur le Front national»
Au tribunal, Charlie en invité surprise
Soudain, l'avocat de Le Pen s'est mis à bredouiller. Me Laviolette-Slanka avait tout prévu: les arguties des mégrétistes, la bataille (sordide) sur le règlement intérieur du parti facho, les engueulades (minables) sur le congrès extraordinaire. Mais pas ça.

Mardi 12 janvier [1999], Le Pen faisait aux mégrétistes un procès en référé pour leur interdire l'utilisation «Front national». L'audience était prévu à 9h30. Mais, à 9h25, surprise. L'avocat de Charlie Hebdo, Me Malka et celui des résistants, Me Borker, déboulaient chez le président pour déposer des «conclusions volontaires»: revendiquer la dénomination «Front national» et intervenir à l'audience.

Jolie séance. Lorsque Richard Malka a déclaré: «Nous sommes très étonnés que ces deux partis se disputent l'utilisation de cette appellation, puisqu'elle nous appartient», il y a eu des rires parmi la presse. Quand il a cité Le Petit Robert (Front national: Mouvement de résistance française à l'occupation allemande, créé en mai 1941»), il y a eu un mouvement étonnant dans la salle. Comme si on ouvrait brutalement la fenêtre pour chasser les miasmes.

Quand Me Borker a rappelé qu'en tant qu'ancien du Front national de la résistance il avait, en 1944, libéré le Palais de justice les armes à la main, il y a eu un silence.

Bilan: vendredi, le tribunal a jugé qu'il n'y avait pas urgence à départager Le Pen et Mégret. Et les a renvoyés à un procès sur le fond. C'était prévisible. Mais la justice a surtout jugé les demandes de Charlie et des résistants aussi recevables que les leurs. Et cela ouvre la porte à une belle bagarre…

Le Pen revendique sa dissolution
Il ne savait plus quoi dire. Alors il a improvisé. Mardi 12 janvier, Me Laviolette-Slanka a indiqué, vaguement, qu'il y avait eu un Front national avant guerre. Le Pen l'avait déjà dit, d'ailleurs. Le premier FN était composé de «partis de droite qui, à partir de 1935, s'opposaient au Front populaire». Le Pen a tout bon. Ce Front-là a bien existé. Et on osait à peine espérer qu'il y ferait référence. D'abord parce qu'on peut difficilement faire plus facho que ce mouvement. Au point que même le colonel de La Rocque, des Croix-de-Feu, refusa qu'un seul de ses hommes y adhère.

Ce «Front National» a été créé peu après le 6 février 1934, date à laquelle les ligues tentèrent de renverser la République. D'emblée, il rassemble tout ce qu'on fait de plus affiné dans le fascisme français: Solidarité française, de François Coty; les Jeunesses patriotes, de Pierre Taittinger, inspirées par Mussolini; les Chemises vertes de Dorgères, prônant une «dictature paysanne». Le tout enrobé avec l'Action française de Charles Maurras. Quand Maurras sort de prison en juillet 37 — il vient de purger six mois pour appel au meurtre, la routine —, le Front national organise une petite boum. A la barre des orateurs: Xavier Vallat et Louis Darquier de Pellepoix — qui se succèderont au poste de commissaire général aux Questions juives, sous Vichy. Darquier est alors fondateur d'un «Club national contre les métèques» et d'un «Comité antijuif» dans lequel il propose que les Juifs soient «expulsés ou bien massacrés». Dans son genre, un précurseur. Bien sûr, ce FN-là s'est perdu dans les tréfonds de la collaboration. Mieux: les ligues qui le composaient furent dissoutes en 1936. En arguant de cette autorité, Le Pen revendique donc son appartenance à des organisations criminelles, illégales et dissoutes… On vous le disait: il a tout bon.


Encadré de bas de page, un résumé : «Rappel de l'affaire»
Le 18 décembre [1998], constatant que le titre «Front national» n'est pas déposé et que l'extrême droite a, de plus, piqué l'appellation à la Résistance antinazie, Charlie dépose le nom à l'Institut national de la propriété industrielle. Le Noël des antifascistes s'annonce guilleret.
Après le réveillon, on continue dans le champagne: avec Charlie, les résistants du Front national, le vrai, l'antifasciste, décident de récupérer la légitime propriété du titre. En face, les fachos s'agitent en une pitoyable défense. Martinez (le mégrétiste) affirme avoir lui aussi déposé le titre… En réponse, les résistants et Charlie tiennent une conférence de presse commune, le 7 janvier, pour dénoncer l'usurpation.
L'affaire s'accélère la semaine dernière. Le 12 janvier, Le Pen demande à la justice d'interdire d'urgence à Mégret et sa bande d'utiliser l'appellation «Front national»… Le tribunal se déclare incompétent. Mais l'avocat de la Résistance et celui de Charlie s'étaient invités au procès. Succès: leurs interventions et leurs demandes sont considérées comme recevables.
Et ce n'est qu'un début…


(Hélas, la plaisanterie prendra fin quelques mois plus tard: Le 11 mai, le Tribunal de Grande Instance de Paris reconnaît au FN de Le Pen le droit exclusif du titre Front National, son logo et le fichier du parti.)

vendredi 14 novembre 2014

Les manuscrits de l'évangile de Marc

Nous lisons la version courte de Matthieu , dite "finale courte" ou "kérygme incorruptible". Nous la comparons à la version longue et à la variante du codex de Freer (dit logion de Freer, car c'est le seul Codex qui transmet cette version — même si on la connaissait avant d'avoir trouvé le manuscrit par des commentaires latins de St Jérôme. Il est appelé également "logion gnostique")).

— Si vous voulez tout savoir, lisez La finale de l'évangile de Marc de … Ah, son nom m'échappe1. Vous en trouverez un bon résumé dans le livre du père Lagrange sur l'évangile de Marc2. Et sinon, vous avez un bon roman policier, L'ultime secret du Christ de José Rodrigues dos Santos. Bon, il y a quelques erreurs de traduction énervantes, mais un philologue se fait assassiner dans une bibliothèque à côté d'un manuscrit précieux, puis un autre dans une autre; un spécialiste est appelé qui est obligé d'expliquer l'histoire des manuscrits à la commissaire un peu cruche… les trois cents premières pages sont vraiment bien faites, précises, j'ai été étonnée… Bon après, évidemment, l'ADN du Christ dans les deux cents dernières pages, vous pouvez laisser tomber, mais le début vaut la peine.

Avouons que je voue une profonde admiration à cette prof de grec. Elle m'enchante.


1 : Joseph Hug, je pense.
2 : Evangile selon Saint Marc.

mardi 9 septembre 2014

Asensio condamné en appel

Concernant la plainte au pénal, Juan Asensio a vu sa peine confirmée en appel. Les dommages et intérêts sont plus faibles qu'en première instance, sans doute pour tenir compte de sa situation financière.

Comment évoquer ce que j'en pense, ce sentiment doux-amer de savoir qu'il est puni mais qu'il n'a pas compris ce qu'on lui reprochait, et que sans doute il se sent victime d'un monde injuste; ou qu'à l'inverse, il a parfaitement compris et qu'il était temps qu'il soit enfin rattrapé par ses actes.
Comment savoir?

Une chose est certaine, il n'hésitera jamais à harceler toute personne en position de faiblesse, affective ou sociale (comme Renaud Camus fragilisé socialement par sa condamnation pour incitation à la haine raciale, Renaud Camus que JA poursuit d'une vindicte maladive sur twitter, comme s'il n'avait rien d'autre à faire. Sans doute n'a-t-il rien d'autre à faire).

mercredi 25 juin 2014

Nous irons à Berditchev

Berditchev, Berditchev, «où se croisent tant des fils du texte qui m'écrit…»

P. m'a donné aujourd'hui le livre qu'il avait conservé dimanche soir — un livre acheté dans la maison de Boulgakov à Kiev: «Mais tu sais, elle est reconstruite, ce n'est pas celle d'origine.»






Dans une vitrine de la maison de Boulgakov se trouve un buste de Mme Hanska. Elle et Balzac se sont mariés à Berditchev le 14 mars 1850.
A Berditchev, aujourd'hui en Ukraine, est né Conrad en 1857, écrivain polonais de langue anglaise et en 1905 Vassili Grossman, écrivain de langue russe.

Ces quelques noms donnent une idée du bouleversement continuel des frontières à cet endroit depuis deux siècles.
Il faudra aller à Berditchev.

mercredi 19 février 2014

Morceaux d'enfance

Livres reçus :

- Fantômette et le trésor du pharaon que je lis machinalement en rentrant pour me détendre
- Langelot et l'avion détourné

vendredi 24 janvier 2014

Fin de colloque

Au lieu d'aller préparer le devoir de grec de demain, je reste à discuter.
  • Roger Martin du Gard, La Gonfle, curieusement sous-titré "farce paysanne", ce qui fait un peu peur
  • Jean Giono, Le déserteur : la biographie imaginaire d'un homme véritable
  • Jean Giono, Le Hussard sur le toit, que j'ai beaucoup aimé au lycée.

mardi 14 janvier 2014

RIP Jean Fabre, fondateur de l'Ecole des Loisirs

Voir ici.

J'ai découvert cette maison d'édition aux alentours de 1993, quand la société où je travaillais a emménageé au dos de la bibliothèque de Levallois-Perret. A l'époque je ne lisais plus (comprendre: "plus rien de sérieux"), je feuilletais ce qu'il y avait sur les tables de présentation, j'emportais des policiers. Les bibliothécaires effectuaient un remarquable travail de sélection, je me souviens d'un livre de pâtisserie par Hermé (un "beau" livre) et d'un livre sur les énoncés des exercices de mathématiques en primaire dans les années 30 en Allemagne (qui revenaient assez souvent à calculer combien de kilos de patates mangeait un Juif en un an. J'ai compris alors ce qu'était l'endoctrinement).

Les livre de L'Ecole des loisirs, ce sont dans mon souvenir des livres "engagés" sur des sujets politiques, leurs conséquences sur le quotidien racontées du point de vue d'un enfant: je me souviens d'un livre sur la ségrégation aux Etats-Unis, un sur la guerre en Irlande, un sur une famille juive fuyant dans la campagne hollandaise, un sur l'homosexualité (Les lettres de mon petit frère de Chris Donner)…

Ce sont trois noms: Marie-Aude Murail (Le Hollandais sans peine, la série des Emilien, le grand cœur un peu nunuche, etc), Anne Fine (ce qui m'amènera à lire ses livres pour adultes aux éditions de l'Olivier (souvent atroces: Un bonheur mortel, Une sale rumeur), le premier de la liste étant Les confessions de Victoria Plum, dans lequel doit se trouver la remarque qu'un divorce, c'est la mort de toutes les private jokes qui ne sont plus rien dès que l'autre n'est plus là pour s'en souvenir avec vous)) et Robert Cormier, avec La guerre des chocolats et Après la guerre des chocolats, et surtout L'Eclipse, un formidable (comprendre effrayant) livre de SF écrit par un garçon qui découvre qu'un homme de sa famille par génération peut devenir invisible, et que c'est lui qui a hérité du don.

Comptent tout particulièrement le tendre Embrasser une fille qui fume et Toutes les créatures du bon Dieu de James Herriot (dont j'ai eu la surprise de découvrir en lisant Les demeures de l'esprit, Grande-Bretagne, Irlande II qu'il était une star en Grande-Bretagne).

Etrangement (ou pas), mes préférés dans cette liste sont épuisés et très difficiles à trouver.

mercredi 8 janvier 2014

Les livres viennent d'eux-mêmes

C'est ce que m'a dit un jour "lecteur". Il m'expliquait qu'il n'achetait pas de livre, que les gens sachant qu'il s'intéressait aux livres l'en lui amenaient.
Depuis qu'il m'a dit cela, j'ai souvent eu l'occasion de constater le phénomène. En l'occurrence il s'agit de doubles d'une bibliothèque (mais pas que). Ils sentent l'odeur des vieux livres humides:
  • Jean Giono, Mort d'un personnage dans une très jolie collection, "La petite Ourse"
  • («Tu ne connais pas? C'était une maison d'édition suisse dans les années 60, elle n'existe plus».)
    En le feuilletant ce soir, je m'aperçois que c'est un exemplaire numéroté.

  • Jean Giono, Les Grands Chemins dans la collection Soleil de Gallimard
  • — Ah, j'adore cette collection.
    — Tu sais comment ils s'en sont débarrassé? Quand tu [un libraire] commandais deux livres de la collection blanche, ils t'envoyaient un exemplaire de la collection Soleil pour un centime. Tu pouvais en faire ce que tu voulais, le vendre ou le garder pour toi.

  • Jean Giono, L'Iris de Suse
  • — C'est le dernier publié de son vivant.

  • Jean Giono, Faust au village, collection blanche avec jaquette
  • Il y a longtemps il fut cité de mémoire après un excellent repas.

  • Jean Giono, Voyage en Italie
  • — Tu vois, c'est un petit livre, pas son meilleur… Mais franchement, à côté de La Modification

  • Julien Green, Terre lointaine
  • parce que malgré notre chagrin, nous ne cesserons jamais d'être camusiens.

  • Julien Gracq, La littérature à l'estomac
  • dans l'édition "papier kraft" de Pauvert (Libertés). J'aime beaucoup son format, sa mise en page. J'en possède deux autres, Contre Celse et L'Antéchrist.

Les suivants me sont tendus avec le commentaire: «Ceux-là viennent de Nantes». Je n'ai pas compris s'il s'agissait de Jean ou de la vente paroissiale de novembre.
  • Georges Casalis, Luther et l'Eglise confessante
  • ce qui me fait penser que j'ai été choquée de voir que la traduction de bekannte Kirche n'était pas connue du traducteur de Ma vie en Allemagne avant et après 1933 (Löwith).

  • Louis Hurault, Guide Terre Sainte, routes bibliques, les chemins de la parole
  • — Tu es sûr que tu ne veux pas le garder?
    — Le premier qui ira à Jérusalem l'empruntera à l'autre.
    (Et je me dis que cela me sera utile pour Clarel.)

jeudi 3 octobre 2013

Recommandation papale

Il [Léon XIII] demandait enfin de «veiller avec soin à ce qu'une ardeur trop violente dans la discussion ne dépasse pas les bornes de la charité mutuelle» (EB n°143).


Iamvero in hoc genere magnopere providendum est, ut ne acrior disputandi contentio transgrediatur mutuae caritatis terminos
Lettre apostolique Vigilantiae studiique.
Recommandation utile.

Références: EB signifie Enchiridion Biblicum n°143. Documenta Ecclesiastica Sacram Scripturam Spectantia, édité sous l'autorité de la Commission biblique pontificale (Rome, 1956, 3e édition).

La traduction en français se trouve page IV de l'introduction de Jean-Luc Vesco à L'Interprétation de la Bible dans l'Eglise (Cerf, 1994).
Cette introduction retrace cent ans d'évolution catholique sur l'exégèse qui recoupe les évolutions des différentes méthodes d'analyse littéraire.

vendredi 2 août 2013

Deux livres de médecins, un livre sur l'amour

Je prends de l'argent au distributeur. Il me faut de la monnaie pour la machine à café. Je pense à l'automate de la poste du Cnit pour obtenir des pièces, mais la poste du Cnit, qui ne me déçoit jamais quand il s'agit de me décevoir, est fermée pour travaux.
Alors je décide d'aller à la Fnac, pour y trouver un truc pas trop cher.

Au passage j'épelle "Teilhard" à une vendeuse qui cherche sur son écran en interrogeant deux vieilles dames: «Théière?» Elles ne savent pas (et je me demande comment on peut avoir l'idée de chercher un livre de Teilhard sans savoir qui il est. Pour un petit-neveu, peut-être?)

Je vais au rayon religion (la dernière fois au Virgin j'avais trouvé un Wénin, je cherche un Boyarin, sait-on jamais) qui se trouve au même endroit que la spiritualité, la sociologie et la psychologie (un peu comme si on avait décidé de mettre tous les charlatanismes ensemble). J'aime bien cet endroit, on y trouve toujours des livres bizarres.
J'en feuillette plusieurs (Le Petit Prince adapté à la vie de bureau…) dont Pourquoi l'amour fait mal d'Eva Illouz. Ce n'est pas un livre érotico-sentimentalo-psychologique, mais une étude socio-économique sur les mutations de l'amour (ce qu'on entend par amour et ce que l'on attend de l'amour) dans un monde d'égaux où l'on ne croit plus au sacré. En fait, pour se donner une idée du livre, il suffit de savoir que l'autre titre de l'auteur traduit en français s'intitule Les sentiments du capitalisme («Aurait-on oublié que les sentiments sont des acteurs majeurs de l'histoire du capitalisme et de la modernité? et qu'elle a favorisé le développement d'une nouvelle culture de l'affectivité engageant le moi privé à se manifester plus que jamais dans la sphère publique?»)
Bref, un livre sérieux dont je note ici les références en attendant d'avoir du temps à y consacrer.

Je repars avec le livre de Jaddo, Juste après dresseuse d'ours. J'en aime le ton et les histoires courtes. Ce n'est pas du tout le même angle que celui du Dr Borée qui lui raconte ses aventures de médecin généraliste à l'ancienne (le médecin de famille, disait-on chez nous: Loin des villes, proches des gens).
Jaddo, c'est plutôt des aperçus de ses années d'études, de ses stages, de ses indignations (elle a l'indignation fréquente et spontanée, j'aime bien) contre le système (absurde), les pontes (arrogants), les patients (imprécis ou sans gêne).

Je ne vais pas citer le drôle ou l'indignant (se reporter au blog ou au livre), juste l'utile (je n'aurais jamais pensé que c'était si important, les médicaments que l'on prenait):
Alors très sérieusement, maintenant, un MESSAGE DE SANTE PUBLIQUE:
Soit on est capable de donner tout son traitement de tête, sans oublier un médicament et sans oublier les posologies ni la durée du traitement, soit on a toujours sur soi une fiche cartonnée avec la liste de ses médicaments.
Si vous avez un mère ou une grand-mère qui n'a plus toute sa mémoire, vous savez ce qu'il vous reste à faire.
Le prochain médecin qui la verra aux urgences construira un petit autel avec des bougies en hommage autour d'une photo de vous.
Et potentiellement, vous, vous sauverez la vie de votre grand-mère.

Jaddo, Juste après dresseuse d'ours, presses pocket, p.118-119

jeudi 20 juin 2013

Babel - Actes Sud

En sortant Esplanade de la Défense, je remarque une grande affiche pour les livres Babel, la collection de poche d'Actes Sud. Un titre me frappe, à peu près au centre de l'affiche, Un été sans les hommes. Je pense à Tlön qui a défini un jour Actes Sud comme «l'éditeur préféré des filles», je vérifie machinalement le nom des auteurs en continuant de marcher sur le quai, je ne vois que des femmes (je marche, j'attrape les noms, je ne détaille pas l'affiche), et je me demande in petto pourquoi cette maison qui publie Histoire d'un Allemand, Gottland ou Le Voleur de Bible se concentre sur cette cible marketing.
C'est sans doute celle qui rapporte.

C'est une illustration moderne des mécanismes de la connaissance ésotérique: publicité pour ce qui est grand public, secret (ou discrétion) pour ce qui est réservé au petit nombre de ceux qui sauront trouver ce qui leur est destiné.

jeudi 30 mai 2013

D'Abattoir 5 à Harry Potter en un coup

Je lis le blog Letters of Note qui reprend des lettres d'écrivains ou de personnes célèbres. (Il faudrait les traduire. Parfois je me dis que je devrais juste consacrer mon temps à traduire ce que j'aime pour le mettre à disposition du web français. J'adorerais cela.)

Hier j'ai trouvé ainsi une lettre de Kurt Vonnegut. C'est la lettre qu'il écrivit à ses parents pour les prévenir qu'il était vivant, qu'il avait été fait prisonnier par les Allemands et emprisonné dans un abattoir souterrain à Dresdes, qu'il avait échappé à la mort en de multiples occasions et que libéré, il ne tarderait pas à rentrer.
Il s'avère que c'est le cœur de ce qui allait devenir Abattoir 5.

D'Abattoir 5, je me souvenais vaguement avoir appris un jour (mais comment? c'était avant internet) qu'il avait été brûlé dans plusieurs villes des Etats-Unis, et comme cela me paraissait parfaitement incroyable et délicieusement sulfureux, avoir emprunté alors Petit Déjeuner des champions —Oui, ce n'est pas le même livre. Je suppose qu'Abattoir 5 n'était pas disponible en bibliothèque; cela doit faire vingt ans, je ne me souviens plus des détails.— Mais je me souviens aussi que je n'ai pas dépassé quelques pages, je n'en sais plus les raisons précises: un livre un peu ennuyeux; j'avais sans doute d'autres choses à faire ou à lire.

Toujours est-il que j'ai voulu vérifier cette histoire de livre bûlé: avais-je rêvé, mes souvenirs avaient-ils déformé la réalité comme souvent?

J'ai eu du mal à trouver ce que je cherchais, sans doute parce que je n'utilise pas les bons mots clés dans Google.
Cela m'a permis de trouver un article très récent et en français sur le blog biblio|ê|thique (éthique & bibliothèques, tout un programme) qui raconte qu'un lycée du Missouri ayant décidé de retirer du programme et de la bibliothèque Abattoir 5, le musée Kurt Vonnegut proposa aux lycéens qui en feraient la demande de le leur envoyer gratuitement.

Et à mon ravissement, ce billet donne la liste des romans du XXe siècle les plus contestés ou mis à l'index, liste établie par le Radcliffe Publishing Course (apparemment une célèbre formation pour les futurs éditeurs, formation qui aurait été absorbée récemment par l'école de journalisme de Columbia) (si je fais un contresens, laissez un commentaire, je corrigerai).

Cela m'a permis de découvrir avec stupeur que certaines églises (majuscule ou pas?) appellent à brûler Harry Potter. Je traduis les premières lignes:
Brûler des livres n'est pas quelque chose de neuf pour les Vrais Chrétiens [True Christians®]. Nous avons inventé cette pratique il y a plus de deux mille ans afin de rendre gloire à notre Seigneur Jésus. Dans les premiers jours de la chrétienté, quand se convertissaient les nouveaux croyants au Christ, ceux-ci étaient naturellement portés par le Saint Esprit à s'emparer d'autant de livres qu'ils le pouvaient afin de les jeter au feu. A la différence des faux chrétiens vraies lavettes «Dieu est amour» (que déteste autant Jésus Christ que nous-mêmes) que nous voyons se multiplier autour de nous en ces jours, les premiers suiveurs du Christ n'eurent jamais honte de brûler des livres.
WTF, OMG, etc. ô_O
(Résistance !)

dimanche 26 mai 2013

La douceur de Dieu dans la Création

Lecture de Genèse 1-3. Deux récits de création, classiquement appelés "Création" et "Eden", liés par un étrange verset, Gn 2,4 (scindé en 2,4a et 2,4b).
A priori (je vous épargne les débats exégétiques qui durent depuis cinquante ans), le deuxième texte (Eden) a été écrit avant le premier (en suivant des mythes mésopotamiens), et le premier mis en avant lors de sa rédaction (après le retour d'exil à Babylone, vers -550), mais selon une traditon juive que je ne cesse d'admirer, sans effacer (nous dirions censurer) le deuxième.

A nous lecteurs de nous débrouiller avec cela (et je ris en pensant à Kinbote).

Je découvre une création qui ne mange que de l'herbe (Gn 1,29 Dieu dit : Je vous donne toutes les herbes portant semence, qui sont sur toute la surface de la terre, et tous les arbres qui ont des fruits portant semence: ce sera votre nourriture. 30 A toutes les bêtes sauvages, à tous les oiseaux du ciel, à tout ce qui rampe sur la terre et qui est animé de vie, je donne pour nourriture toute la verdure des plantes et il en fut ainsi) et je me demande in petto si tous les créationnistes fondamentalistes sont végétaliens (pourquoi ne puis-je me les imaginer que carnivores, genre Sarah Palin le couteau entre les dents?)

Exégèse de Paul Beauchamp, s.j.:
la douceur de l'homme envers l'animal, douceur exigée par son régime alimentaire, est le signe de l'absence de guerre entre les hommes et […] ceci est le point principal qui constitue l'homme à l'image de Dieu

Paul Beauchamp, "Création et fondation de la loi en Gn 1,1-2,4a", in La Création dans l'Orient ancien, p.142, (Paris, Cerf, 1987)
Plus tard, parce que j'ai parlé de la définition de la sagesse selon Levinas (un savoir qui n'a pas besoin de connaître par expérience) à mon voisin, je rouvre Quatre lectures talmudiques et tombe sur ce passage qui fait écho à mes questions sur la Bible:
Cela m'a fait relire les Euménides. J'y ai été très sensible, j'en ai même été attristé: dans cette œuvre qu'on lit dans sa jeunesse, témoin d'un monde qui avait ignoré les Ecritures, j'ai trouvé une élévation qui me prouvait que tout a dû être de tous temps pensé. Après avoir lu les Euménides, on peut légitimement se demander ce qui reste encore à lire. Une lutte oppose la justice de Zeus à la justice des Euménides, la justice avec pardon à la justice de la vengeance implacable. Zeus est déjà le «dieu des suppliants et des persécutés» et son œil voit tout. Décidément, je me rapproche du problème que nous débattons.
Le judaïsme est-il nécessaire au monde? Ne peut-on se contenter d'Eschyle? Tous les problèmes essentiels y sont abordés.
[…]
Notre apport juif au monde est donc dans ce monde vieux comme lui-même. «Vieux comme le monde», titre que je donnais à ce petit commentaire est donc une exclamation, un cri de découragement. Il n'y aurait donc rien d'inédit dans notre sagesse! Le texte des Euménides est de cinq siècles au moins plus vieux que la Michna qui ouvre mon texte.
Il est cependant de trois siècles plus jeune que les prophètes de la Bible. Et ce fut là ma première consolation.

Emmanuel Levinas, Quatre lectures talmuldiques, p 165-166 (Paris, Minuit, 1968)

samedi 25 mai 2013

Le temps presse

«Oui, il est certain que dans la démarche d'Ahmadenijad, il y a une vision eschatologique: augmenter le chaos pour accélérer le retour du Mâhdi et provoquer la fin du monde.»

Cette remarque de la professeur spécialiste de l'islam m'a plongée dans la stupéfaction. J'en trouve confirmation sur quelques sites: alors il s'agirait bien d'une guerre sainte, mais d'une toute autre dimension que celle qu'imaginent (que sont capables d'imaginer) la plupart des Occidentaux: une guerre non pour la domination ou le pouvoir politique, mais une guerre pour hâter la fin du monde. C'est vraiment autre chose.

Il devient urgent que je lise Eschatologie occidentale de Taubes.

jeudi 23 mai 2013

Leo Strauss contre Jacob Taubes

Je prépare mentalement les livres de cet été: les envies, les promesses, ceux que je n'ai pas lus jusqu'au bout cette année et que je me suis promis de reprendre (par exemple Ellul). Je contemple ma bibliothèque, ouvre Taubes au hasard (Taubes et Strauss, les deux favoris de mes rêves de lectures d'été).

Et c'est ainsi que je découvre dans la préface à Eschatologie occidentale que si Taubes n'est pas très connu aujourd'hui et n'a pas fait carrière aux Etats-Unis, c'est sans doute à imputer à Strauss et à Scholem qui lui ont fait obstacle avec détermination.

vendredi 22 mars 2013

Bibliographie sur l'islam

L'une des conséquences du durcissement (est-ce le terme?) de Renaud Camus envers l'islam est que le dialogue interreligieux m'est apparu soudain comme une urgence qui ne pouvait plus souffrir aucun délai (Le temps presse, c'est un autre sujet, mais peut-être pas.)

La première étape consistait d'abord à mieux connaître ma propre religion. Je me suis donc inscrite en licence de théologie (ce qui explique à la fois un certain changement de thématique des citations laissées ici (dû à mon changement de lectures) et mon manque de temps pour tenir ce blog).

La deuxième, heureusement incluse dans la licence, était d'acquérir quelques connaissances fiables sur l'islam (parce que je doute de l'islam vu par Renaud Camus, surtout depuis que j'ai vu comment celui-ci prenait ses décisions sur les sujets économiques (le CPE[1] en 2006: une émission de télévision vue un soir a emporté sa décision alors que nous étions plusieurs à tenter de donner quelques bases d'économie politique ("Economie politique", le titre du cours professé par M. Pébereau à Sciences-Po quand j'y étais étudiante) au parti de l'In-nocence)).

Voici donc un extrait de bibliographie en sept points (j'ai repris les ouvrages qualifiés d'"accessibles").

Le dialogue interreligieux. Pourquoi? Comment?
Pierre Claverie: Petit traité de la rencontre et du dialogue, Paris, Cerf, 2004
Michel Fedou: Les religions selon la foi chrétienne, Paris, Cerf Médiaspaul, 1996
Dennis Gira: Au-delà de la tolérance: la rencontre des religions, Paris, Bayard, 2001
Dennis Gira: Le dialogue à la portée de tous… ou presque, Paris, Bayard, 2012
Michel Younès: Pour une théologie chrétienne des religions, Paris, Desclée de Brouwer, 2012.

Panorama de l'islam dans le monde
Bernard Godard et Sylvie Taussig: Les musulmans en France, Paris, Robert Laffont, 2007
Xavier de Planhol: Les nations du prophète, manuel géographique de politique musulmane, Paris, Fayard, 1993

Les fondements de l'islam
Roger Arnaldez: Le Coran, guide de lecture, Paris, DDB 1983
Raymond Charles: Le droit musulman, Paris, PUF, Que sais-je? n°702, 1965
Ali Merad: L'exégèse coranique, Paris, PUF, Que sais-je? n°3406, 1998
Françoise Micheau: Les débuts de l'islam. Jalons pour une nouvelle histoire, Paris, Téraèdre, 2012

L'islam des médiations: chiisme, soufisme et dévotion aux saints
Yann Richard: L'islam chi'ite: croyance et idéologies, Fayard, 1991
Réveils du soufisme en Afrique et en Asie, dossier de la revue Archives de Sciences sociales des religions, n°140, 2007
Annemarie Schimmel: Introduction au monde soufisme, Dangles, 2004
H. Chambert-Louis & C Guillot (dir): Le culte des saints dans le monde musulman, Paris, Ecole française d'Extrême Orient

Islam et modernité: les courants contemporains
Gilles Kepel: Du jihad à la fitna, Bayard, 2005
Ali Merad, L'islam contemporain Paris, PUF, Que sais-je? n°2195, 1998

Islam et christianisme au regard de l'autre
Richard Fletcher: La croix et le Croissant. Le christianime et l'islam, de Mahomet à la Réforme, Paris Louis Audibert, 2003

Islam et christianisme en dialogue: les questions posées
Robert Caspar: Pour un regard chrétien sur l'islam, Paris Centurion, 1990
Roger Michel: Peut-on dialoguer avec l'islam? Paris, éd Peuple Libre, 2009
Christian Troll, Réponse aux musulmans

J'ajoute un lien personnel vers un site que j'admire depuis des années, d'Orient et d'Occident.

Premier cours mercredi dernier. La professeur nous parle de Louis Massignon et Henri Le Sceaux (pour l'hindouisme).
Je découvre avec stupeur l'existence d'un pélerinage Chrétiens/Musulmans en Bretagne, le pélerinage des Sept Dormants institué par Louis Massignon pendant la guerre d'Algérie pour prier pour la paix.

Rentrée chez moi à minuit dans un certain état d'exaltation intellectuelle (tout cela promet d'être passionnant), je vais chercher au grenier un livre de Louis Massignon que je me souviens avoir acheté il y a quelques années à la kermesse de la ville.

Je déniche L'hospitalité sacrée (acquis en septembre 2009, c'est écrit en première page). A l'intérieur, je découvre une enveloppe et une carte datant de janvier 1993. Elle se termine par ces mots: "Je t'embrasse [signature] regrettes les moments où je ne t'ai pas compris".

Notes

[1] Contrat Première Embauche

samedi 15 décembre 2012

Les procès de Juan Asensio

Un commentaire à la suite du précédent billet me fait penser qu'il est temps de donner quelques explications factuelles. Je vais essayer de faire court et chronologique, de donner quelques lignes directrices pour comprendre les divers billets concernant les procès contre Juan Asensio.


1/ La plainte au pénal pour accès frauduleux dans un STAD[1] et atteinte au secret des correspondances

La plainte a été déposée début septembre 2009 par Jean-Yves Pranchère.
J'ai été appelée à témoigner le 15 septembre 2009.
Le 21 septembre 2009, l'hébergeur Blogspirit a mis quatre billets de Juan Asensio hors ligne. Celui-ci a aussitôt été persuadé que j'étais à l'origine de la plainte. Il m'a écrit dans son style habituel et a écrit à des proches non blogueurs.
Le 21 septembre, nous avons découvert l'une des fausses identités d'Asensio, Pierre Seintisse, dont il se sert pour espionner les profils FB[2].
Le 10 octobre 2009, je porte plainte à mon tour, devant me rendre à l'évidence: Juan Asensio est si aveuglé par son ressentiment à mon égard qu'il ne peut concevoir que je ne sois pas à l'origine de la plainte contre lui et la mise hors ligne de ses billets.

Notre plainte est reçue: le parquet poursuit Juan Asensio. Cela devient une affaire pénale.
Le 18 juin 2010, Asensio fait l'objet d'un rappel à la loi. Le tribunal lui propose d'en rester là s'il reconnaît ses torts. Juan Asensio refuse.
L'audition a lieu le 6 octobre 2011, il est reconnu coupable le 17 novembre 2011.

Juan Asensio fait appel, nous attendons la prochaine audition (date non fixée pour l'instant).


2/ La plainte pour injures et diffamation

En mars 2010, Emmanuel Regniez publie une phrase sibylline (une citation de Lautréamont) sur son mur FB pour désapprouver que des amis/connaissances (je ne sais) publient sur leur blog une interview d'Asensio.
Juan Asensio furieux pond un billet violent et s'en prend au passage à Jean-Yves Pranchère et moi-même puisque nous sommes des amis de Régniez (c'est notre seul tort dans cette affaire).
Il tente d'entraîner dans sa querelle Pierre Jourde.
Bref, tout cela nous paraît bel et bien une tentative d'intimidation internautique envers nous suite à notre plainte de l'automne précédent.
Emmanuel Régniez, Jean-Yves Pranchère et moi-même décidons de porter plainte pour injures et diffamation.

Malheureusement, nous manquerons de précision et serons déboutés sur la forme, pour ne pas avoir distingué les injures de la diffamation. L'affaire ne sera pas jugée sur le fond.
Voir ici les arguments de l'avocat de Juan Asensio, qui permettent de se faire une idée assez juste du style d'Asensio et des raisons de notre plainte.


3/ La plainte pour usage abusif de tags (métabalises)

Juan Asensio prend l'habitude de taguer les billets les plus divers avec nos noms, ce qui fait que Google associe nos noms aux mots et images les plus désagréables.
Je cite comme exemple, parce qu'il est représentatif et parlant, celui d'un billet sur Matzneff contenant un panneau de signalisation avec deux personnages en position obscène ou érotique (à votre guise). Lorsqu'on tape mon nom dans Google, cette image y est associée. La preuve ici.

Le but de Juan Asensio est bien de faire remonter nos noms associés à des insultes en tête de Google (agir sur le Google rank), c'est une stratégie qu'il a souvent employée en s'en vantant (voir le passage Valérie Scigala publiquement ridiculisée, son blog relégué, etc, etc).
Il s'agit de "google bombing", pour ceux qui connaissent le terme.

Décidés à ne pas nous laisser intimider, nous portons plainte de nouveau.
Ce fut jugé une première fois en octobre 2010, les juges nous avaient alors déboutés sans donner d'explication réelle.
Nous sommes allés en appel, c'est à cet appel que ce rapporte le jugement rendu le 21 novembre 2012 qui nous condamne aux frais irrépétibles (les frais d'avocat engagés par Juan Asensio et Blogspirit).
Les juges n'ont pas donné de réponse sur le fond (pour le dire en terme geek, ils n'ont pas jugé de la légalité d'un google bombing pour une personne privée, autrement dit quelqu'un qui n'est pas un personnage public).

Il reste à décider si nous allons en cassation.


                                                                              *********************


PS: concernant la haine de Juan Asensio à mon égard, vous trouverez ici un point de vue extérieur qui vous permettra de comprendre également la haine d'Asensio envers Renaud Camus.


PPS: En repensant aux dernières péripéties / gesticulations asensiennes, je me demandais pourquoi cela m'affectait si peu.

Je crois que j'ai compris, j'ai saisi le moment cathartique: c'est le moment des dépositions au tribunal, cette après-midi où Juan Asensio a menti froidement à diverses reprises sur divers sujets.

Il est très différent de mentir devant quelqu'un qui ne sait pas la vérité, chez qui vous faites naître l'impossibilité de décider ou en qui vous implantez une fausse certitude; ou de mentir devant quelqu'un qui sait que ce que vous dites est faux, que vous êtes en train de mentir devant lui et qui sait que vous savez qu'il le sait.

Nous sommes en général sans défense devant un menteur, parce que notre éducation nous a appris qu'il ne fallait pas mentir — ce qui ne nous empêche pas de le faire, mais alors si possible de façon indiscernable, en espérant que la personne en face ne l'apprendra jamais. Nous envisageons rarement le cas de quelqu'un qui mente frontalement, en sachant que nous le savons et que (espère-t-il, c'est son pari) nous ne pourrons rien prouver.

Parole contre parole. Cette fourberie frontale peut rendre fous ceux qui ne supportent pas de ne pas avoir l'occasion de démontrer ce qu'ils avancent, ceux qui de façon plus romantique que juridique supposent que la bonne foi est un argument suffisant devant un tribunal.

Moi, cette fourberie m'a soulagée. Ce mensonge, ces mensonges, étaient la preuve que Juan Asensio savait parfaitement qu'il avait tort. C'était un aveu.
Sinon, pourquoi mentir?

Notes

[1] système de traitement automatisé de données (en l'occurrence un groupe fermé sur FB)

[2] Voir ici. Remarquez l'adresse mail utilisée: c'est celle de Ludivine Cissé que "Pierre Seintisse" s'est appropriée.

dimanche 11 novembre 2012

Le procès de Charlotte Corday à l'Epée de bois

Nous sommes allés voir le procès de Charlotte Corday mercredi dernier (et je suis un peu honteuse de n'en parler que maintenant, en fin de week-end, alors qu'il ne vous reste qu'une semaine pour y aller.)

C'est à l'Epée de bois à Vincennes, un théâtre que je ne connaissais pas et qui est magnifique, petit et chaleureux, salle commune pour manger une quiche ou une soupe et salles de théâtre entièrement lambrissées.

Pour moi, ce n'était pas une première mais l'occasion de comparer la nouvelle mise en scène, que je savais avoir été retravaillée, avec mes souvenirs. C'était assez étrange, car tout en gardant un fond qui n'a pas beaucoup changé (ou plutôt je suis incapable de dire ce qui a changé dans le texte), la pièce a été bouleversée: désormais, ce n'est plus Fouquier-Tinville qui tient le devant de la scène, écrasant Charlotte, mais Charlotte qui, échappant à la place statique du banc des accusés, emplit toute la salle de sa robe blanche et se défend comme une héroïne tragique (je pensais à Antigone; la pièce cite Judith et Holopherne («Vous n'êtes pas Judith, Corday»)). La mort rôde, sanglante.
La mise en scène joue sur les détails, jeu des gants et de boîte à musique; plaisir des passés simples (rien que pour cela précipitez-vous!); les spectacteurs sont pris à parti dans le rôle des jurés: sommes-nous ou pas prévenus contre l'accusée, sommes-nous prêts à écouter ce qu'elle a à nous dire?
Les acteurs sont excellents et physiquement très bien accordés à leur rôle (le visage mince et creusé de Jeanne-Marie Garcia, l'embompoint tranquille de Franck Gervais).





Et pour ceux qui voudraient approffondir le sujet, avant ou après la pièce, je recommande les enregistements de ce colloque sur les noms du peuple, et en particulier l'intervention de Jean-Yves Pranchère sur «Peuple et nation entre révolution et contre-révolution».

jeudi 27 septembre 2012

Les timbres de Donald Evans

Pour la personne qui est arrivée sur mon blog en cherchant des timbres de Donald Evans: voir ici.

mercredi 30 mai 2012

Ah tiens, un Camus spécialiste de l'extrême-droite

A l'occasion du procès de Breivik, Jean-Yves Camus revient sur le développement de l'islamophobie en Europe :

[…]
L'enquête du journaliste norvégien Oyvind Strommen, La Toile brune (Actes Sud, 206 p., 21 euros), montre bien l'obsession qui s'est emparée depuis le début des années 2000 d'une partie significative des droites radicales xénophobes en Europe occidentale. Il s'agit de la peur d'Eurabia, néologisme forgé en 2006 par l'essayiste Bat Ye'Or, désignant un continent et une culture européens soumis de leur plein gré à l'islam et à son corpus de lois normatives, la charia, ayant renié leurs racines "judéo-chrétiennes" et de surcroît en voie d'être démographiquement submergés par les musulmans, au point que les Européens "de souche" deviendraient bientôt minoritaires.
[…]
Evolution vers un national-patriotisme qui, né sur le rivage de la gauche souverainiste, réduirait désormais la notion de nation à la question identitaire et se retrouverait en accord avec un Front national normalisé ? On peut en tout cas remarquer que le Parti de la liberté néerlandais, comme naguère Pim Fortuyn et les populismes xénophobes scandinaves, a retourné contre l'islam les idées de la gauche émancipatrice des années 1970 : droits des femmes, des homosexuels, des minorités (les juifs notamment) menacés par la répression de la "déviance" que les islamistes au pouvoir mettent en oeuvre.
[…]
Ensuite, cette idée rabaisse le concept de civilisation européenne au niveau d'une réaction de rejet épidermique de l'Autre, sans proposer de projet culturel cohérent susceptible de définir les valeurs auxquelles les musulmans d'Europe seraient tenus de s'intégrer. Elle témoigne des énormes difficultés de la culture européenne à admettre les identités dialogiques en évitant le double écueil du relativisme et de l'uniformisation.
[…]

"Le monde manichéen d'Eurabia", Jean-Yves Camus dans Le Monde, le 29 mai 2012

(Ces théories du complot, c'est tellement bête. Et comment ne pas penser au Protocole des sages de Sion?)

Ici, le "livetweet" du procès Breivik. (Attention, c'est twitter: si vous voulez conserver quelque chose, faites des copies d'écran ou des copier/coller).

mardi 1 mai 2012

Effervescence

Journée à essayer de travailler (+ crumble à la rhubarbe + identification de Martin Kluger). Commencé à utiliser Travers Coda (2012). Saisie d'une sorte d'excitation, cela va profondément changer la façon de travailler. Le référencement des références multiplie les croisements (sachant que sont reprises les références dans Journal de Travers (1976/2007), ô bénédiction).

Il va falloir ajouter des notes aux notes, commencer quelque chose qui serait de l'ordre du dictionnaire encyclopédique des références. Royal fun, mais un peu effrayant.

samedi 21 avril 2012

Au vol

Une heure moins vingt. Je rentre de cruchons un peu étonnants (n'avons-nous pas parlé de politique, comme s'il n'y avait pas d'autre sujet plus sérieux), j'entends ceci (de mémoire):

«26 juin. J'entreprends avec le calme et le courage qui conviennent un livre de six cents pages. Quelle n'est pas ma surprise de rencontrer mon nom à la sixième ligne, puis à la septième, puis à la page suivante. Il s'agit du journal 2010 de Renaud Camus qui a entendu par hasard ces Boudoirs[1] dont apparemment il ignorait l'existence et qui s'interroge sur les raisons qui ont produit notre éloignement. Son nom est pour moi associé à Onslow, peut-être parce qu'ils sont tous deux auvergnats.»



Et quelle n'est pas ma surprise d'entendre le nom de Renaud Camus sur France Musique en allumant la radio machinalement.

Notes

[1] Journal lu chaque samedi par Gérard Pesson

vendredi 6 avril 2012

Les recherches continuent

Désolée d'être aussi absente, je m'écroule de fatigue le soir.

Cependant les recherches ne s'interrompent pas : j'ai reçu aujourd'hui La sorcière des Trois Islets (on va voir ce qu'on va voir!), j'ai trouvé un catalogue de Florence Valay datant des années Médicis et quelque chose de plus étrange, une plaquette sur la grande halle de la Villette avant la transformation qu'on lui connaît (transcription à venir, je distille).

lundi 19 décembre 2011

Histoire de la philosophie occidentale, de Bertand Russell

Remarque étonnée: Le nom de Wittgenstein n'apparaît pas dans l'index.

Deux tomes, dont l'un, le plus gros, est presque entièrement consacré à la philosophie antique.

C'est une histoire philosophique intime, ou intimiste, commentée avec irrespect selon des angles inhabituels en philosophie, mais qui sont ma pente:

Il y a, chez Aristote, une absence complète de ce qui pourrait être appelé bienveillance ou philanthropie. Les souffrances de l'humanité, pour autant qu'il les remarque, ne l'impressionnent pas; il les tient, intellectuellement, pour un mal mais il n'y a aucune raison de croire qu'elles l'émeuvent, sauf lorsque ceux qui souffrent sont ses amis.
On remarque aussi souvent, chez Aristote, un manque de sensibilité qui ne se retrouve pas au même degré chez les premiers. Il y a quelque chose de par trop confortable et satisfait dans ses spéculations sur les affaires humaines. Tout ce qui peut éveiller chez l'homme un vif intérêt pour autrui paraît oublié. Même son étude sur l'amitié est froide; il ne paraît avoir fait aucune des expériences qui rendent difficile de conserver un jugement impartial. De plus, il paraît ignorer tous les aspects profonds de la vie morale; il laisse de côté tout le domaine de l'expérience qui touche à la religion. Ce qu'il a à dire serait utile à des hommes jouissant de tous les biens terrestres et n'ayant que peu de passions. Mais il n'a rien à dire à ceux qui sont possédés par un dieu ou un démon, ni à ceux que le malheur entraîne au désespoir. Pour toutes ces raisons, à mon avis, la morale d'Aristote, malgré sa grande réputation, manque de pénétration.

Bertrand Russel, Histoire de la philosophie occidentale, "la morale d'Aristote", p.229

mercredi 14 décembre 2011

Juan Asensio accusé d'insultes et diffamation ne peut pas se défendre

C'est ce qu'a soutenu son avocat. Le tribunal lui a donné raison.
Cependant, la cour d’appel a simplement confirmé la nullité de la citation. Juan Asensio est débouté de ses demandes, ce qui signifie que notre démarche n'était pas abusive.

Afin de vous permettre de vous faire votre propre opinion, je vous livre les conclusions de l'avocat d'Asensio qui ont convaincu le tribunal (pour l'anecdote, il s'agit de la 17e chambre du tribunal de grande instance de Paris, la chambre qui a à juger du subjonctif imparfait dans "l'affaire Lacan").



Quelques précisions cependant afin de lutter contre la désinformation:

- Les délibérés sont généralement rendus (lus) en début d'audience, vers 14 heures. Ils sont alors transmis par les avocats à leurs clients respectifs. A ce stade, il n'y a aucun écrit, il faut attendre deux à trois mois pour disposer des conclusions écrites : qu'il s'agisse de la condamnation au pénal du 17 novembre ou de la nullité prononcé hier, personne ne dispose à ce jour des « décisions rendues par les juges». Affirmer les recopier mot à mot est donc un mensonge.

- Juan Asensio a mis immédiatement à jour son billet "on air" pour annoncer la nullité de la citation pour injures et diffamation. Cette nullité est prononcée pour une question de forme, le fond n'a pas été examiné.

- En revanche, le 17 novembre il n'a pas annoncé aussitôt qu'il avait perdu au pénal, c'est-à-dire contre une plainte déposée par le parquet qui avait donné lieu le 6 octobre a un débat contradictoire au tribunal devant les juges, chacun d'entre nous étant interrogé tour à tour. Il est donc faux que son billet soit purement informatif et objectif.




La suite est donc une longue citation de l'avocat d'Asensio, dont la graphie est respectée. Les notes sont de mon fait.
C'est très long, voici un lien vous permettant d'accéder à une version plus lisible en pdf.


2. Les propos poursuivis.

Les parties civiles poursuivent des propos écrits et publiés sur son blog par M. Asensio les 17 et 22 mars 2010; il est expressément demandé, dans le dispositif de leur citation directe, que M. Asensio soit déclaré coupable d'infractions d'injure et diffamation, «à raison des commentaires et articles parus le 17 et 22 mars 2010 sur le site http://www.stalker.hautetfort.com dont le directeur de publication est Monsieur Juan ASENSIO, intitulés «Éric Bonnargent, François Monti, Juan Asensio, entretien, 1» et «Éric Bonnargent, François Monti, Juan Asensio, entretien, 4», accessibles aux adresses suivantes:
http://stalker.hautetfort.com/archive/2010/03/17/eric-bonnargent-francois-monti-juan-asensio-entretien-4.html
http://stalker.hautetfort.com/archive/2010/03/12/eric-bonnargent-francois-monti-juan-asensio-entretien-1.html
».

Plus précisément, les parties civiles ont choisi de poursuivre les propos suivants (pages 15 et 16 de la citation directe):

Dans la note du 17 mars 2010 («Éric Bonnargent, François Monti, Juan Asensio, entretien, 1», http://stalker.hautetfort.com/archive/2010/03/12/eric-bonnargent-francois-monti-juan-asensio-entretien-1.html: «(...) d'un pauvre crétin planqué sous le pseudonyme de Simon Melmoth (...) Ne m'en veuillez point de ne pas citer exactement les propos de cet infâme couilon dont le derrière semble aussi crotté de peur que le cerveau (...) d'ailleurs grâce aux bons services des amis tout aussi lâches de ce Simon Melmoth qui, naguère, me traitèrent de tous les noms (à l'abri, comme il se doit, des regards), (.. .) je crois, à des accusations aussi lamentables et qui bafouent toute rigueur herméneutique avec la même joie malsaine que les chiens nazis témoignaient face à leurs victimes... Finalement, recevoir des leçons de vertu de la part de ces petits caniches urinant comme des chiots, utiles et comiques relais des vrais molosses utilisés par les criminels, est une très douce ironie de la réversibilité des mérites je suppose... »;

Dans la note du 22 mars 2010 («Éric Bonnargent, François Monti, Juan Asensio, entretien, 4», http://stalker.hautetfort.com/archive/2010/03/17/eric-bonnargent-francois-monti-juan-asensio-entretien-4.html): «Vais je ajouter que Simon Melmoth/Emmanuel Régniez avec l'universitaire Jean-Yves Pranchère, spécialisé dans l'étude d'auteurs tels que Joseph de Maistre et la documentaliste Valérie Scigala, fut l'un des membres qui, sur un groupe supprimé par Facebook, m'insultèrent copieusement et m'accusèrent de tous les maux? Lorsque je portai à la connaissance du public, à seule fin de me défendre, leurs propos dans trois notes depuis supprimées par mon hébergeur, Valérie Scigala et Jean-Yves Pranchère déposèrent tous deux plainte contre moi pour trois motifs dont le minutieux examen me fit passer douze heures en garde à vue dans les riants locaux d'une brigade de gendarmerie qui ne fut sans doute point choisie par hasard puisqu'elle était spécialisée dans les affaires de cyber-criminalité[1]».

Seuls ces propos publiés les 17 et 22 mars 2010 sont donc poursuivis.


3. In limine litis, sur la nullité de la citation directe puis, par voie de conséquence. la prescription de l'action des demandeurs.

3.1. L'ambiguïté sur la qualification des faits incriminés.

La citation directe entretient l'ambiguïté sur la qualification des faits incriminés. Cela est particulièrement vrai pour ce qui concerne les propos incriminés qui sont contenus dans la note du 17 mars 2010: «(...) d'un pauvre crétin planqué sous le pseudonyme de Simon Melmoth (...) Ne m'en veuillez point de ne pas citer exactement les propos de cet infâme couillon dont le derrière semble aussi crotté de peur que le cerveau (…) d'ailleurs grâce aux bons services des amis tout aussi lâches de ce Simon Melmoth qui, naguère, me traitèrent de tous les noms (à l'abri, comme il se doit, des regards), (…) je crois, à des accusations aussi lamentables et qui bafouent toute rigueur herméneutique avec la même joie malsaine que les chiens nazis témoignaient face à leurs victimes.… Finalement, recevoir des leçons de vertu de la part de ces petits caniches urinant comme des chiots, utiles et comiques relais des vrais molosses utilisés par les criminels, est une très douce ironie de la réversibilité des mérites je suppose…».

Les parties civiles qualifient d'injurieuse la locution: «d'un pauvre crétin planqué sous le pseudonyme de Simon Melmoth». On peut lire, à la page 19 de leur citation directe (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «La phrase tirée de l'article du 17 mars 2010 rédigé par Juan ASENSIO «... d'un pauvre crétin planqué sous le pseudonyme de Simon Melmoth» est sans équivoque insultante. Cette injure est bien adressée à Emmanuel REGNIEZ (…)»».

Elles qualifient cumulativement d'injurieuse et de diffamatoire la locution: «Ne m'en veuilez point de ne pas citer exactement les propos de cet infâme couillon dont le derrière semble aussi crotté de peur que le cerveau». On peut lire, toujours à la page 19 de leur citation directe (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Dans le prolongement, les propos qui suivent sont particulièrement injurieux et diffamatoires « …Ne m'en veuillez point de ne pas citer exactement les propos de cet infâme couillon dont le derrière semble aussi crotté de peur que le cerveau»».

Elles qualifient tour à tour de diffamatoire et d'injurieuse la locution: «d'ailleurs grâce aux bons services des amis tout aussi lâches de ce Simon Melmoth qui, naguère, me traitèrent de tous les noms (à l'abri, comme il se doit, des regards)». On peut lire, à la page 20 de leur citation directe (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Le terme «amis» est lié à celui de «lâches», complété par la formule en fin de phrase «(à l'abri, comme il se doit, des regards)». Il s'agit d'une allégation mensongère et diffamante». Puis, à la page 21 (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Ecrire encore «(amis)… qui, naguère, me traitèrent de tous les noms» est une allégation purement mensongère. La jurisprudence considère que constituent des injures le reproche de «parler en menteur» et «de ne dire ou exprimer que des mensonges ou des faux» (Crim. 31 janv. 1930: Bull. crim. n° 44) - l'imputation de «manquer de courage civique » (Crim. 20 juin 1946: Gaz. Pal. 1946. 2. 178 2e arrêt) - l'expression de «lopette». TGI Paris, 8 nov. 1989: Gaz. Pal. 1990. 1, Somm. 176, lesquels sont très proches des termes employés ici par Juan ASENSIO». Puis, toujours à la page 21 (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Les propos contenus dans la phrase incriminée ont un caractère portant atteinte à l'honneur et à la considération des parties civiles, au regard de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, alinéa 1».

Elles qualifient tour à tour de diffamatoire et d'injurieuse la locution: «je crois, à des accusations aussi lamentables et qui bafouent toute rigueur herméneutique avec la même joie malsaine que les chiens nazis témoignaient face à leurs victimes… Finalement, recevoir des leçons de vertu de la part de ces petits caniches urinant comme des chiots, utiles et comiques relais des vrais molosses utilisés par les criminels, est une très douce ironie de ta réversibilité des mérites je suppose…». On peut lire, à la page 23 de leur citation directe (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Des qualificatifs en publics tels que «chiens nazis» portent profondément atteinte à l'honneur et à la considération de Jean-Yves PRANCHERE, Valérie SCIGALA et Emmanuel REGNIEZ». Puis, aux pages 23 et 24 (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «D'ailleurs, la jurisprudence indique que le terme «nazi» peut constituer une injure. Paris, 1er juin 1995: Dr. pénal 1995. 253; confirmé par Cass. Crim. 29 janv. 1998 Pourvoi n°95-83763: Gaz. Pal. 1998. 1, chron. crim. 75. La chambre criminelle de la Cour de cassation, dans son arrêt du 16 décembre 1986 (Bull n°374 - n° de pourvoi n°85-96064), acceptait qu'il est de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération, nonobstant son caractère fictif l'imputation d'une action violente menée par un groupe armé dont la constitution est pénalement répréhensible, faite à une personne supposée avoir adhéré aux doctrines nationales-socialistes».

L'invocation cumulative des deux qualifications que sont l'injure et la diffamation introduit une incertitude pour le prévenu quant à l'objet exact de ce qui lui est reproché et, par conséquent, quant aux moyens de défense qu'il peut opposer.

Cette ambiguïté est en l'espèce d'autant plus insoluble que les parties poursuivantes, en tête de leur citation, ont expressément déclaré poursuivre M. Asensio à la fois pour le délit d'injure envers un particulier et pour le délit de diffamation envers un particulier, «ces deux chefs d'infraction ayant été commis en état de concours d'infraction (article 132-2 du Code pénal)» (page 2 de la citation directe). Elles laissent ainsi penser qu'elles entendent poursuivre des propos injurieux et des propos diffamatoires bien divisibles les uns des autres, alors que le corps de leur citation, comme on l'a vu, fait à de multiples reprises supporter à des propos uniques les deux qualifications distinctes.

Au demeurant, quand bien même les parties poursuivantes estimeraient que les propos qu'elles incriminent renferment des injures et des imputations diffamatoires indivisibles, et que donc la qualification d'injure est absorbée par celle de diffamation, il leur appartiendrait de préciser qu'elles n'entendent en conséquence viser que la seule diffamation. Il ne leur est pas permis, dans un tel cas, de poursuivre l'injure comme délit distinct. Procéder autrement, et viser cumulativement la qualification d'injure et la qualification de diffamation, comme elles le font en l'espèce, interdit à M. Asensio d'exercer utilement sa défense (Cass. Crim., 15 mars 1994: Bull crim, n°99).

Est nul l'acte introductif d'instance qui, comme c'est le cas en l'espèce, entretient «une équivoque sur le fondement juridique précis des demandes» et «une ambiguïté sur la qualification des faits incriminés» et porte ainsi atteinte tant à l'égalité des parties dans le procès qu'aux droits de la défense (Civ. 2ième, 14 mars 2002: Bull. civ. II, n" 45).

L'action des parties civiles se trouve dès lors prescrite, aucun acte interruptif de prescription n'ayant été valablement accompli dans les trois mois de la publication des propos litigieux, conformément à l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881.


3.2. L'absence d'identification, par chaque partie civile, des propos qu'elle considère par comme injurieux ou diffamatoires à son égard.

Les trois parties civiles ont choisi d'exercer une action concertée contre M. Asensio, ce qui est leur droit.

Elles entendent poursuivre de nombreux propos de M. Asensio, ce qui est également leur droit.

Mais ce double choix leur impose de rendre parfaitement identifiables les propos argués de diffamation et/ou injure dont se plaint chacune d'entre elles. Procéder différemment revient à priver le prévenu des moyens d'exercer utilement sa défense (TGI Paris, 17ème Chambre, 23 mai 1997: ''LALONDE & ASSOCIATION GENERATION ECOLOGIE c/JULY; LP 1997, n° 144-I,p.103).

"S'il est en effet possible, dans une seule et même citation, à plusieurs personnes, physiques ou morales, s'estimant diffamées par les mêmes propos, de se concerter afin de poursuivre les auteurs des textes qu'elles considèrent attentatoires à leur honneur ou à leur considération, il leur appartient, dès lors qu'il peut exister un doute sur les propos respectivement poursuivis par chacune d'entre elles, de fournir tes indications nécessaires afin de permettre aux prévenus de déterminer de quel propos diffamatoire se plaint chacune des parties civiles (...) Les parties civiles ne sauraient soutenir que l'intégralité des propos est poursuivie par chacune d'elles, un tel argument par sa généralité, ne pouvant répondre à l'exigence qui vient d'être exposée" (TGI Paris, 17ème Chambre, 18 juin 2002: LA SOCIETE ELITE MODEL MANAGEMENT SA c/ TESSIER, ARDISSON, DROUIN & autres).

En l'espèce, les parties civiles n'ont pas fait ce travail consistant à distinguer ce qui, au sein des propos poursuivis, porte respectivement atteinte à chacune d'elles.

On le vérifie pour ce qui concerne les propos suivants, tirés de la note poursuivie du 17 mars 2010: «(…) je crois, à des accusations aussi lamentables et qui bafouent toute rigueur herméneutique avec la même joie malsaine que les chiens nazis témoignaient face à leurs victimes... Finalement, recevoir des leçons de vertu de la part de ces petits caniches urinant comme des chiots, utiles et comiques relais des vrais molosses utilisés par les criminels, est une très douce ironie de la réversibilité des mérites je suppose…»

On peut lire dans la citation des plaignants, au sujet de ces propos (pages 22 & 23, la graphie des auteurs de la citation est respectée): «L'allégation «je crois, à des accusations aussi lamentables et qui bafouent toute rigueur herméneutique avec la même foie malsaine que les chiens nazis témoignaient face à leurs victimes» inverse d'abord l'ordre des choses.
Juan ASENSIO se pose ici comme victime alors qu'il est mis en cause pour plusieurs chefs d'infraction dans le cadre de la procédure judiciaire diligentée parta gendarmerie de BOULOGNE-BILLANCOURT (PV 728/2009).
(Cf. Pièce n°8)
Les griefs évoqués par les parties civiles dans leurs plaintes sont à ce point fondés qu'ils ont justifiés des réquisitions de l'autorité judiciaire afin de supprimer les liens incriminés[2].
Il ne s'agit donc pas «d'accusations aussi lamentables» mais simplement du droit, par principe, pour une victime de mettre en mouvement l'action publique afin de défendre son honneur et sa réputation et défaire cesser des injures publiques.[3].
La formule qui est ensuite employée par Monsieur Juan ASENSIO «avec la même joie malsaine que les chiens nazis témoignaient face à leurs victimes» montre l'extrême violence de Juan ASENSIO - la shoah est le comble de la violence et de l'inhumanité — qui personnifie les chiens nazis, capables d'une «joie», vécue à leur tour par les parties civiles.
L'image des chiens nazis face à leur victime en comparaison des parties civiles face à Juan ASENSIO, ne fût-ce que par une communauté de «joie» relativise forcément la Shoah, dévalue le crime nazi, au mépris absolu de la mémoire des victimes.
Des qualificatifs en publics tels que «chiens nazis» portent profondément atteinte à l'honneur et à la considération de Jean-Yves PRANCHERE, Valérie SCIGALA et Emmanuel REGNIEZ.
Aux termes de sa phrase «Finalement, recevoir des leçons de vertu de la part de ces petits caniches urinant comme des chiots, utiles et comiques relais des vrais molosses utilisés par les criminels, est une très douce ironie de la réversibilité des mérites je suppose…», dans le prolongement de sa métaphore canine, Monsieur Juan ASENSIO assimile Jean-Yves PRANCHERE, Valérie SCIGALA et Emmanuel REGNIEZ à «ces petits caniches urinant comme des chiots, utiles et comiques relais des vrais molosses utilisés par les criminels…,». Ces termes sont à rapprocher des allégations de «lâches» et «à l'abri, comme il se doit, des regards». Cette image avilit et déshonore les parties civiles.
L'expression qui suit «est une très douce ironie de la réversibilité des mérites je suppose…» vise directement, même s'il y a un code, Jean-Yves PRANCHERE.
Juan ASENSIO fait allusion avec «la réversibilité des principes» au concept central de la pensée de Joseph de Maistre dont Monsieur Jean-Yves PRANCHERE est un spécialiste notoire.
Juan ASENSIO le rappelle d'ailleurs dans l'article publié le 22 mars: «avec l'universitaire Jean-Yves Pranchère, spécialisé dans l'étude d'auteurs tels que Joseph de Maistre ».
 »

Force est de constater, à la lecture de ce passage, que les trois parties civiles poursuivent l'ensemble des propos en cause, sans qu'il soit mentionné, à aucun moment, pour chacune des parties civiles, quels propos précisément, au sein de cet ensemble, elle a entendu considérer comme diffamatoire ou injurieux à son égard.

Mais l'incertitude concerne également les propos poursuivis tirés de la note du 22 mars 2010.

On peut lire dans la citation des plaignants, au sujet de ces propos (page 25, la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Juan ASENSIO omet de révéler les faits pour lesquelles il a été mis en cause et qui font l'objet de deux instances pénales officielles et pour lesquelles il a été placé en garde à vue, comme il l'indique lui-même un peu plus loin dans cet article: «Lorsque je portai à la connaissance du public, à seule fin de me défendre, leurs propos dans trois notes depuis supprimées par mon hébergeur, Valérie Scigala et Jean-Yves Pranchère déposèrent tous deux plainte contre moi pour trois motifs dont le minutieux examen me fit passer douze heures en garde à vue dans les riants locaux d'une brigade de gendarmerie qui ne fut sans doute point choisie par hasard puisqu'elle était spécialisée dans les affaires de cyber-criminalité»
Il s'agit là à nouveau d'imputations purement diffamatoires au préjudice des parties civiles»
.

Force est de constater, à la lecture de ce passage, que les trois parties civiles poursuivent l'ensemble des propos en cause, sans qu'il soit mentionné, à aucun moment, pour chacune des parties civiles, quels propos précisément, au sein de cet ensemble, elle a entendu considérer comme diffamatoire ou injurieux à son égard. On se demande tout spécialement en quoi Monsieur Emmanuel REGNIEZ est concerné par ces propos[4].

Compte tenu de cette incertitude sur les propos respectivement poursuivis par chaque partie civile, qui interdit au prévenu d'exercer utilement sa défense, leur acte introductif d'instance devra être annulé.

L'action des parties civiles se trouve dès lors prescrite, aucun acte interruptif de prescription n'ayant été valablement accompli dans les trois mois de la publication des propos litigieux, conformément à l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881.


4. Sur les propos incriminés contenus dans la note du 17 mars 2010.

4.1. Sur l'irrecevabilité de l'action de Monsieur PRANCHERE et Madame SCIGALA fondée sur les propos contenus dans la note du 17 mars 2010.

Seul Emmanuel REGNIEZ, alias Simon MELMOTH est effectivement nommé par Monsieur ASENSIO dans les propos poursuivis.

Monsieur PRANCHERE et Madame SCIGALA ne justifient pas, pour leur part, qu'ils seraient effectivement les personnes désignées avec certitude et dont l'identification aurait été possible comme étant les « amis » de Simon MELMOTH.

Ils devront être déclarés irrecevables en leur action pour défaut de désignation (Crim., 15 octobre 1985: Bull, crim., n° 315 - Crim., 30 mai 2007: Bull crim., n° 143).


4.2. Sur l'excuse de provocation.

Les propos incriminés sont les suivants: «(…) d'un pauvre crétin planqué sous le pseudonyme de Simon Melmoth (…) Ne m'en veuillez point de ne pas citer exactement les propos de cet infâme couilon dont le derrière semble aussi crotté de peur que le cerveau (…) d'ailleurs grâce aux bons services des amis tout aussi lâches de ce Simon Melmoth qui, naguère, me traitèrent de tous les noms (à l'abri, comme il se doit, des regards), (…) je crois, à des accusations aussi lamentables et qui bafouent toute rigueur herméneutique avec la même joie malsaine que les chiens nazis témoignaient face à leurs victimes… Finalement, recevoir des leçons de vertu de la part de ces petits caniches urinant comme des chiots, utiles et comiques relais des vrais molosses utilisés par les criminels, est une très douce ironie de la réversibilité des mérites je suppose…».

Les parties civiles prétendent y voir et des injures et des diffamations. On a vu plus haut qu'elles ne s'étaient pas résolues à distinguer clairement ce qui, au sein de ce passage qu'elle incrimine, relève de la diffamation et ce qui relève de l'injure, entretenant ainsi l'ambiguïté sur la qualification des faits incriminés (point 3.1, ci-dessus).

Si, par extraordinaire, le Tribunal n'annulait pas la citation entachée de cette ambiguïté, et s'il retenait le caractère injurieux des propos incriminés, il conviendrait de faire bénéficier Monsieur ASENSIO de l'excuse de provocation.

Aux termes mêmes de la citation des parties civiles, la note en cause fait suite à une note postée sur la Toile le 15 mars 2010[5] par l'un d'eux, Monsieur Emmanuel REGNIEZ, imputant à Monsieur ASENSIO «une tâche de sang intellectuelle». On peut lire en effet, à la page 18 de la citation (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Les propos cités dans le commentaire du 17 mars 2010 (…) sont en partie aussi la réaction totalement disproportionnée de Juan ASENSIO au commentaire d'Emmanuel REGNIEZ qui sous pseudo Simon Melmoth avait écrit le 15 mars 2010 sur Facebook: " Pourquoi je ne lirai pas l'entretien croisé. Pas à cause de Bartleby, pas à cause de François Monti, mais à cause de la troisième personne (Juan Asensio, alias Stalker).
François Monti écrivait dans un commentaire: «J'ai eu la chance (?) d'avoir des parents communistes qui m'ont appris que ce qui importait n'était pas d'où on parlait mais ce qu'on disait. Pour ça, il faudra attendre les jours qui viennent.» Quant à moi, j'ai eu la chance d'avoir des grands-parents résistants qui m'ont appris que toute la mer du monde ne suffirait pas à laver une tache de sang intellectuelle.
Et les taches sont nombreuses. Je ne vais pas, ici, les donner toutes, pas envie de donnera lire ces horreurs et m'en faire le relais.
Et que l'on ne vienne pas me dire que la Littérature excuse tout et permet tout. La littérature n'a rien à voir avec le ressentiment et la haine de l'Autre."
».

Les termes de la note ainsi postée — et notamment la formule «tâche de sang intellectuelle» s'appliquant à Monsieur ASENSIO, lequel, pour n'être pas nommé, n'en est pas moins parfaitement identifiable, présentent tous les caractères de la provocation[6] au sens de l'article 33, alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881.

Compte tenu de cette provocation à laquelle elles répondent explicitement, les injures imputées au prévenu ne sont pas punissables.


5. Sur les propos incriminés contenus dans la note du 22 mars 2010.

5.1. Sur l'absence de caractère diffamatoire des propos incriminés.

Les propos incriminés sont les suivants: «Vais je ajouter que Simon Melmoth/Emmanuel Régniez avec l'universitaire Jean-Yves Pranchère, spécialisé dans l'étude d'auteurs tels que Joseph de Maistre et la documentaliste Valérie Scigala, fut l'un des membres qui, sur un groupe supprimé par Facebook, m'insultèrent copieusement et m'accusèrent de tous les maux? Lorsque je portai à la connaissance du public, à seule fin de me défendre, leurs propos dans trois notes depuis supprimées par mon hébergeur, Valérie Scigala et Jean-Yves Pranchère déposèrent tous deux plainte contre moi pour trois motifs dont le minutieux examen me fit passer douze heures en garde à vue dans les riants locaux d'une brigade de gendarmerie qui ne fut sans doute point choisie par hasard puisqu'elle était spécialisée dans les affaires de cyber-criminalité».

Les parties civiles qualifient de diffamatoire la locution: «Vais-je ajouter que Simon Melmoth/Emmanuel Régniez avec l'universitaire Jean-Yves Pranchère, spécialisé dans l'étude d'auteurs tels que Joseph de Maistre et la documentaliste Valérie Scigala, fut l'un des membres qui, sur un groupe supprimé par Facebook, m'insultèrent copieusement et m'accusèrent de tous les maux?». On peut lire, à la page 24 de leur citation directe (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Les parties civiles sont visées nommément par ces allégations mensongères, calomnieuses et diffamatoires».

Elles qualifient également de diffamatoire la locution: «Lorsque je portai à la connaissance du public, à seule fin de me défendre, leurs propos dans trois notes depuis supprimées par mon hébergeur, Valérie Scigala et Jean-Yves Pranchère déposèrent tous deux plainte contre moi pour trois motifs dont le minutieux examen me fit passer douze heures en garde à vue dans les riants locaux d'une brigade de gendarmerie qui ne fut sans doute point choisie par hasard puisqu'elle était spécialisée dans les affaires de cyber-criminalité». On peut lire, à la page 25 de leur citation directe (la graphie des auteurs de la citation est respectée): «Il s'agit là à nouveau d'imputations purement diffamatoires au préjudice des parties civiles».

Il n'y a dans les propos poursuivis nulle imputation ou allégation de faits de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération des parties civiles. Ces propos n'ont pas de caractère diffamatoire[7].


5.2. Sur la bonne foi.

Il faut rappeler que les propos poursuivis ont été tenus dans un contexte de vive polémique opposant les parties civiles et Monsieur ASENSIO. Dans ce contexte de vive polémique, les propos aujourd'hui poursuivis apparaissent poursuivre un but légitime, être étrangers à toute animosité personnelle, et se conformer à un certain nombre d'exigences, en particulier la prudence dans l'expression.

Si par extraordinaire le Tribunal considère que ces propos ont un caractère diffamatoire, il considérera, notamment au vu des pièces produites, que Monsieur ASENSIO les as tenus de bonne foi:

Sur le passage relatif aux propos injurieux et aux accusations tenus par les parties civiles sur M. ASENSIO: Pièce n°8 : Capture d'écran figurant la page d'accueil du groupe «Celles et ceux qui pensent que Juan Asensio déshonore la blogosphère française[8]; Pièce n°10: Message de Pierre Boyer (alias de Jean-Yves Pranchère), 23 novembre 2008 ; Pièce n°11: Echanges entre Emmanuel Régniez et Valérie Scigala, 23 novembre 2008; Pièce n°13: Message de Valérie Scigala, 29 novembre 2008 ; Pièce n°14: Historique de la demande de suppression de la page Wikipédia sur Juan Asensio[9];

Sur le passage relatif à la garde à vue de M. ASENSIO: Pièce adverse n°8: Attestation de dépôt de plainte et procès-verbal d'audition de Monsieur Jean-Yves PRANCHERE, le 1er septembre 2009; Pièce n°26: Convocation de M. Juan ASENSIO par la Brigade de recherches de la Gendarmerie nationale -Nanterre, pour le 15 octobre 2010; Pièce n°27: Courtier du Conseil de M.ASENSIO au procureur de la République de Paris, de demande d'information sur la suite de la procédure six mois après la garde à me de MASENSIO, 21 avril 2010.


6. Sur l'abus de constitution de partie civile, le dommage en résultant pour le prévenu et sa réparation.

L'abus de constitution de partie civile de Madame Valérie Scigala et MM. Jean-Yves Pranchère et Emmanuel Régniez dégénère ici en un abus manifeste[10].

C'est dans un esprit malveillant, ou en tout cas par une faute grossière, que cette action à été entreprise.

On ne s'explique pas autrement que les parties civiles ne prennent pas même la peine de distinguer clairement, au sein de la note du 17 mars, ce qui selon eux relève de la diffamation et ce qui selon eux relève de l'injure. Ce alors même qu'en tête de leur citation, elles ont expressément déclaré qu'elles entendaient poursuivre et des propos injurieux et des propos diffamatoires, «commis en état de concours d'infraction». Quant à la note du 22 mars, il relève de l'évidence que les propos qu'elle contient et qui font l'objet de la poursuite ne sont pas constitutifs de diffamation.

La malveillance ou la faute grossière est en l'espèce d'autant plus caractérisée que, préalablement à l'engagement de l'action, les parties civiles avaient déposé une plainte simple contre Monsieur ASENSIO, notamment des chefs d'injures et diffamations et qu'ils ont engagé la présente action sans même attendre l'issue de l'enquête ouverte sur cette plainte[11].

Notes

[1] Juan Asensio a été reconnu coupable au pénal d'introduction frauduleuse dans un STAD (système informatisé, pour faire court) et vol de correspondance privée.

[2] Je rappelle que nous avons gagné notre procès.

[3] En d'autres termes, ce qu'est en train de faire Juan Asensio dans ces billets de mars 2010, c'est tenter de nous intimider parce que nous avons porté plainte contre lui.

[4] Remarquons que si l'avocat distingue qu'Emmanuel Régniez n'est pas concerné par ces propos, c'est qu'il n'y a pas flou quant aux personnes concernées.

[5] A ma connaissance, c'est faux: Emmanuel Régniez a fait un simple commentaire sur sa page Facebook, c'est-à-dire un lieu privé, dont le contenu n'est pas indexé par Google.

[6] Ils présentent surtout les caractères d'une citation de Lautréamont, que Juan Asensio n'a pas reconnue.

[7] C'est diffamer qu'accuser à tort en le sachant pertinemment. Nous n'avons jamais «insulté Juan Asensio copieusement» (je ne tiens pas à lui ressembler) ni ne l'avons «accusé de tous les maux» (deux maux: vol de correspondance, introduction frauduleuse dans un système informatisé).

[8] Rappel du descriptif du groupe FB fermé que j'avais constitué pour rassembler les billets et discussions diverses parus un jour sur la toile, et disparus suite aux pressions exercées par Juan Asensio: «Toute personne qui a formulé un jour une opinion négative sur le blog, le style, les idées de Juan Asensio, et qui a dû subir une avalanche de commentaires et de mails injurieux est bienvenue ici. Toute personne qui s'est fait attaquer pour avoir osé lire Conrad et donner son opinion est bienvenue ici. Toute personne qui juge infantile et choquante une telle attitude de la part du Trollker est bienvenue ici. Ce groupe est fermé. S'il avait été impossible d'effacer les messages, je l'aurais laissé ouvert, pour le plaisir de lire les injures du Trollker comme autant de preuves de ce que j'avance. Hélas, celui-ci n'a pas le courage d'afficher jusqu'au bout au mieux son impolitesse, au pire sa haine, et nous a montré plusieurs fois sur FB qu'il effaçait ses traces. Je trouve donc inutile de lui laisser une parole qu'il est incapable de maintenir dans le temps.»

[9] C'est une obsession de Juan Asensio, qui sait pourtant, à la lecture des conversations privées dans notre groupe fermé, que nous n'avons jamais essayé de détruire cette page (j'ignorais même qu'une telle page existait, son existence me semble proprement ridicule. Le débat sur Wikipédia est instructif et révélateur de l'usage des pseudonymes par Juan Asensio).

[10] Rappel: le jugement de ce jour déboute Juan Asensio de ses demandes, notre démarche n'était pas abusive.

[11] C'est faux: nous avons porté plainte pour "introduction frauduleuse dans un STAD et vol de correspondance privée" (voir la note 1: les juges nous ont donné raison). Et si Juan Asensio nous a insultés, Jean-Yves Pranchère et moi-même, alors que c'était Emmanuel Régniez qui avait fait un commentaire à propos d'un blog que je ne connais même pas, c'est justement parce que nous avions porté plainte: il s'agissait d'une tentative d'intimidation. Nous ne nous sommes pas laissés intimider. Et nous ne nous laisserons pas intimider. De cela Juan Asensio peut être certain: il ne parviendra pas à ses fins, il n'arrivera pas par sa "célèbre méthode" à faire retirer les billets qui le gênent.

mardi 13 décembre 2011

Lectures conseillées en classe de seconde et première

Lectures conseillées pour l’entrée en (et pour l’année de) seconde
Liste conseillée par Madame X (je complèterai), professeur à l'école alsacienne.
Remarque: les listes pour le collège sont ici.


L’enseignement de la littérature en seconde est organisé en «objets d’étude» qui correspondent aux grands genres littéraires, c’est le classement que l’on a choisi d’adopter ici.

* Théâtre

- BEAUMARCHAIS, Le Barbier de Séville
- CAMUS A. Caligula
- COCTEAU, La Machine infernale, Les Parents terribles
- CORNEILLE, L’Illusion comique, Horace, Le Menteur, Cinna
- HUGO, Hernani, Ruy Blas
- JARRY A., Ubu-Roi
- MARIVAUX, L’Ile des esclaves, Le Jeu de l’amour et du hasard
- MOLIERE, Tartuffe, Dom Juan
- MUSSET, Les Caprices de Marianne, Lorenzaccio
- RACINE, Bajazet, Phèdre, Andromaque, Bérénice, Britannicus
- SHAKESPEARE W., Hamlet, Romeo et Juliette
- SOPHOCLE, Antigone, Œdipe Roi

*Poésie

Le mieux est peut-être de travailler à partir d’une anthologie (il en existe beaucoup, à vous de choisir celle qui vous plaît…). On peut aussi conseiller :

BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal
ELUARD, Capitale de la douleur, L’Amour la poésie
HUGO, Châtiments, Contemplations (livre IV)
LAMARTINE, Méditations poétiques
PREVERT, Paroles
RIMBAUD, Poésies
RONSARD, Amours
VERLAINE, Poèmes saturniens, Fêtes galantes

*Roman

XVIe siècle
RABELAIS, Pantagruel, Gargantua

XVIIe siècle
LA FAYETTE Mme de, La Princesse de Clèves

XVIIIe siècle
PREVOST, Manon Lescaut
ROUSSEAU, Confessions (Les quatre premiers livres)

XIXe siècle
- AUSTEN J. Orgueil et Préjugés ; Raison et sentiments
- BALZAC H. de, Eugénie Grandet ; Le Bal de Sceaux ; Ferragus ; La Peau de Chagrin ; Le Père Goriot
- BARBEY D’AUREVILLY, Les Diaboliques
- BRONTË C., Jane Eyre
- BRONTE E., Les Hauts de Hurlevent
- CHATEAUBRIAND, ''Atala ou les Amours de deux sauvages dans le désert
- DOSTOIEVSKY F., Souvenirs de la maison des morts ; Crimes et Châtiments; L’Idiot; Le Joueur
- DUMAS A., Les Trois Mousquetaires ; Pauline
- DUMAS A. fils, La Dame aux camélias
- FLAUBERT G., Madame Bovary; L’Education sentimentale
- FROMENTIN E., Dominique
- GAUTIER T., Le capitaine Fracasse ; Le Roman de la Momie
- HUGO V., Le Dernier Jour d’un condamné; Claude Gueux; Notre-Dame de Paris; Quatre-vingt-treize; Les Travailleurs de la mer; Les Misérables
- MAUPASSANT, Une Vie, Pierre et Jean, Bel-Ami
- MUSSET, La Confession d’un enfant du siècle
- POE E.A., Histoires Extraordinaires
- SCOTT W., Ivanhoé; Quentin Durward
- SHELLEY M., Frankenstein
- STENDHAL, Le Rouge et le Noir; Chroniques italiennes
- TOLSTOI L., Guerre et paix; Anna Karénine
- TOURGUENIEV, Premier Amour
- VILLIERS De L’ISLE-ADAM, Contes cruels
- WILDE, Le Portrait de Dorian Gray
- ZOLA, Thérèse Raquin, La Curée, La Bête humaine, Germinal

XXe siècle les auteurs confirmés
- ALAIN-FOURNIER, Le Grand Meaulnes
- BUZZATI D., Le Désert des Tartares
- CAMUS A., L’Étranger, Le Premier Homme ; La Peste
- COHEN, Le Livre de ma mère
- DU MAURIER D., Rebecca
- GARY R., La Vie devant soi ; La Promessse de l’aube
- GIONO J., Le Hussard sur le toit, Batailles dans la montagne, Le Grand Troupeau
- GUILLAUMIN E., La Vie d’un simple
- HUXLEY A., Le Meilleur des mondes
- KAFKA F., La Métamorphose, Le Château
- MAURIAC F., Le Sagouin ; Thérèse Desqueyroux
- ORWELL G., La ferme des animaux ; 1984
- SARRAUTE, Enfance
- VIAN B., L’Écume des jours, L’Arrache-coeur
- YOURCENAR M., Nouvelles orientales
- VERCORS, Les Animaux dénaturés ; Le Silence de la mer
- ZWEIG S., Vingt-quatre heures de la vie d’une femme, La Confusion des sentiments, Amok, Le Joueur d’échec

XXe-XXIe siècle, les auteurs récents
- AUSTER, P., Cité de verre, M. Vertigo
- CALVINO, Le Baron perché, Le Vicomte pourfendu, Le Chevalier inexistant
- CHÂTEAUREYNAUD O.-G., Le Château de verre
- CHESBRO G., Bone
- CRICHTON M., Un train d’or pour la Crimée
- DAENINCKX D., Meurtres pour mémoire; Play back; Cannibales
- DUGAIN M., La Chambre des officiers
- ERNAUX, Une Femme, La Place
- GAUDE, Cris
- IZZO J.C., Total Khéops
- JAPRISOT, Compartiment tueur, Piège pour Cendrillon
- JONQUET T., La Vie de ma mère, Les Orpailleurs, Moloch
- KEYES D., Des Fleurs pour Algernon
- LE CLEZIO, Onitsha; Désert
- LEWIS R., Pourquoi j’ai mangé mon père
- LIGNY J.-M., La Mort peut danser
- LINDON M., Champion du monde
- MAALOUF A., Léon l’Africain
- MAKINE, Le Testament français
- MERLE R., Le Propre de l’homme
- MODIANO, Dora Bruder
- PAVLOFF F., Matin brun
- PEROL J., Un été mémorable
- PIGNERO B., Les mêmes étoiles
- PONTI J.-C., Les Pieds-bleus
- POUY J.-B., L’Homme à l’oreille croquée
- PUJADE-RENAUD C., Le Jardin forteresse
- SEPULVEDA L., Le Vieux qui lisait des romans d’amour
- TOURNIER M., Vendredi ou les limbes du Pacifique
- UHLMAN F., L’Ami retrouvé
- VAN CAUWELAERT D., Un aller simple

Lectures conseillées pour l’entrée en (et pour l’année de) première
La base recommandée est la liste que nous avons préconisée pour les secondes, à laquelle on peut ajouter :

* Théâtre

BEAUMARCHAIS, Le Mariage de Figaro
BECKETT, Fin de partie, En attendant Godot, Oh les beaux jours
CLAUDEL, Partage de midi, L’Annonce faite à Marie
MARIVAUX, La Fausse Suivante, Les Fausses Confidences, La Double inconstance
MOLIERE, Le Misanthrope
SARTRE, Huis-Clos, Les Mouches

* Poésie

Lautréamont, Mallarmé, Paul Valéry, Apollinaire, René Char, Henri Michaux, Supervielle, Bonnefoy, Jacottet…

* Roman et essais

XVIIIe
DIDEROT, Jacques le Fataliste et son maître
LACLOS, Les Liaisons dangereuses
MARIVAUX, La Vie de Marianne, Le Paysan parvenu
MONTESQUIEU, Lettres persanes
VOLTAIRE, Candide, L’Ingénu

XIXe
BALZAC, Le Lys dans la vallée ; Illusions perdues ; Splendeurs et misères des courtisanes
HUGO, L’Homme qui rit
STENDHAL, La Chartreuse de Parme
ZOLA, L’Assommoir, La Joie de vivre, Nana, L’œuvre, La Terre

XXe
ANTELME, L’espèce humaine
ARAGON, Aurélien
BRETON, Nadja
CAMUS, La Chute, La Peste
CELINE, Voyage au bout de la nuit
DURAS, Le Ravissement de Lol V. Stein, La Douleur
LEVI, Si c’est un homme
MALRAUX, La Condition humaine
PEREC, W ou le souvenir d’enfance, Les Choses
PROUST, Un Amour de Swann
YOURCENAR, Mémoires d’Hadrien

mardi 29 novembre 2011

Jean-Paul Marcheschi : s'offrir un tableau pour Noël

Samedis 3 et 10 décembre, à partir de 14H, à la galerie de Jean-Paul Marcheschi, 5-7 rue des deux-boules (un nom prédestiné (j'aime bien que la ville de Paris n'ait pas eu le puritanisme de la faire disparaître)) aura lieu une vente "privée" et à des prix exceptionnels.

Faites-le savoir autour de vous aux personnes intéressées qui depuis longtemps regrettent que "les Marcheschis" ne soient pas accessibles à leur bourse.

samedi 19 novembre 2011

Procédure pénale : Juan Asensio reconnu coupable

Puisque Juan Asensio, qui tient soigneusement au courant son lectorat des développements de nos démêlés judiciaires depuis deux ans, et ce avec l'objectivité et la droiture qu'on lui connaît, paraît négliger la décision survenue jeudi dernier, je me vois obliger de continuer la chronique:


L'audition avait eu lieu le 6 octobre 2011, le jugement a été rendu jeudi 17 novembre:

Juan Asensio a été reconnu coupable sur chacun des chefs poursuivis, sauf celui pour lequel nous reconnaissions qu’il n’y avait pas délit, l’accès au club des lecteurs non réactionnaires de M. Pranchère (qui est un groupe ouvert: c'est par erreur que ce chef apparaissait ici).
Il est condamné au paiement d’une amende de 5.000 euros avec sursis, au paiement de dommages et intérêts. Remarquons que le procureur n'avait requis que 150 euros, un montant symbolique, s'adaptant par là aux revenus de Juan Asensio, chômeur en fin de droits aidé par ses parents. (Il faut savoir que les sommes réclamées lors du dépôt de plainte ne correspondent à rien d'autre qu'à l'application des textes, et aucunement à ce qui sera réellement réclamé à l'accusé s'il est reconnu coupable). Le tribunal est donc allé bien au-delà du réquisitoire, marquant par là sa réprobation.
Il est en outre condamné à publier le jugement pendant un délai de 3 mois sur son site.
L’exécution provisoire n’est pas ordonnée, ce qui signifie que l’appel d’Asensio suspendrait cette exécution.

La copie du jugement sera disponible dans deux ou trois mois et permetta de prendre connaissance de ses motifs.


***


Rappelons que la plainte n'avait aucun motif "littéraire", et qu'il ne s'agissait même pas d'une plainte pour "injures et diffamation" (qui ne serait pas du ressort du pénal): non, ce qui était en cause, c'était l'intrusion frauduleuse (i.e., selon le TILF, avec l'intention de nuire) dans un système automatisé de traitement de données ("STAD": en l'occurrence, un groupe fermé sur Facebook) et le vol de correspondance privée (et sa publication). Voir ici.

L'audition a été l'occasion de décrire le harcèlement que fait subir Juan Asensio à toute personne qui ne partage pas ses opinions ou qui trouve qu'il écrit mal ou qui considère qu'il est un butor.

Je rappelle les noms qu'Asensio a reconnu avoir utilisés sur Facebook: Pierre Seintisse, Hélène Ribeira et Jules Soerwein.


***


Enfin, à titre purement pédagogique, j'en profite pour expliquer une méthode utilisée par les "taupes" de Facebook. Les lignes qui suivent n'intéressent que ceux qui y ont un compte, elles seront à peu près incompréhensibles aux autres.

Un inconnu vous demande en "ami", et comme ses centres d'intérêt vous paraissent proches des vôtres, ou qu'il "partage" des amis avec vous, vous l'acceptez. Dès lors, il accède à l'ensemble des messages que vous publiez sur votre mur même si votre profil est très verrouillé pour les gens qui ne sont pas vos "amis".
Puis il désactive son compte FB, qui devient dès lors invisible, comme détruit (mais il n'est pas détruit: il suffit d'indiquer à FB qu'on veut récupérer son compte pour pouvoir le rouvrir, exactement dans l'état où on l'a laissé).

La taupe réactive son ou ses profils quelques minutes de temps en temps pour venir espionner les dialogues et activités des personnes qu'elle surveille. Entretemps, comme elle est la plupart du temps hors ligne, les personnes ont oublié qu'elles l'ont en ami. Il est très difficile de se débarrasser de la taupe, car il faut être en ligne au moment où elle réactive son compte et profiter de ces quelques instants pour la "supprimer de ses amis".

vendredi 7 octobre 2011

Asensio au pénal, suite.

Finalement l'audition a eu lieu hier et c'est un grand soulagement.

C'est une satisfaction intense de pouvoir exposer publiquement son point de vue sans être interrompue et d'être écoutée avec attention.

Et c'est aussi une satisfaction de savoir que les contradictions [1] et les mensonges [2] de Juan Asensio ont été enregistrés par le greffe du tribunal.
Même s'il n'était pas possible de les reprendre un à un (et ce n'était pas l'objet du débat), il est apaisant de savoir que quelque part dans les armoires de la justice française dormira cette déposition. (Oui, il est apaisant de savoir qu'il ne pourra pas dire: «Je n'ai jamais dit ça».)

Ensuite il y a les regrets de ce qu'on n'a pas dit et la conscience aiguë de la difficulté d'expliquer la différence entre les forums, les blogs, Facebook, la différence entre une page de profil FB et un groupe, la différence entre un groupe ouvert (bizarrement dénommé "privé" hier, sans doute parce qu'il a un créateur), un groupe fermé, un groupe secret (et encore, sans compter les "pages" dont nous n'avons pas parlé).
Et puis cette chronologie des faits si importante et si longue, comment en rendre compte? Tout paraît tassé soudain.

Il y a le regret de ne pas avoir fait remarquer à voix haute que l'avocat de la défense, qui avait produit une très mauvaise copie de fax afin de faire passer un 13 pour un 23, a fourni une page impeccable et en couleur lorsqu'il s'est aperçu que j'en possèdais une meilleure version qui ne laissait aucun doute sur le "13" et que ma pièce allait être versée au dossier, afin que ce fût sa pièce qui fût enregistrée.

Le jugement sera rendu le 17 novembre. Il portera sur des points fins, sur des nuances, il s'agit d'attribuer un statut à Facebook, privé ou public, un statut à un groupe fermé, de qualifier l'usage d'un faux nom pour se voir donner l'accès à un groupe (fraude ou pas?), de déterminer si les échanges dans un groupe fermé ont ou non le statut d'une correspondance privée.

Je n'ai pas tout suivi (je ne suis pas juriste) mais c'était très intéressant, il existe des subtilités entre les droits civil et pénal, ce qui légitime ou pas d'utiliser la jurisprudence civile pour juger au pénal (et inversement, je suppose). Je n'en dis pas plus de peur d'écrire des bêtises sur ces sujets très précis qui intriguent le béotien par leur aspect technique.

Notes

[1] Exemple: affirmer que Facebook est totalement public, que nous sommes cinq cents millions et des broutilles de personnes interconnectées qui ne se cachent rien et verrouiller son profil, bloquer des personnes pour se rendre invisible.

[2] Quelqu'un peut-il me dire comment on construit un agrégateur de contenu sur le nom d'Asensio pour l'afficher automatiquement sur sa page de profil FB? car Asensio a affirmé qu'un tel agrégateur se trouvait sur ma page (est-il conscient qu'il est très facile de vérifier qu'il n'en est rien? et qu'il n'est même pas évident que cela soit techniquement possible?), quant à "sa" page wikipédia, comme il l'a dit lui-même, tout est conservé et vérifiable; il est donc très étrange de nous accuser devant un tribunal d'avoir voulu la supprimer (etc, etc).

mercredi 7 septembre 2011

Annonces

Les jeudis de l'Oulipo

à la BNF à 19 heures.
Pizzas post-oulipiennes pour les volontaires

- 20 octobre 2011 : Ô les chœurs

- 10 Novembre 2011 : En avant la zizique (hommage à Boris Vian)

- 15 décembre 2011 : Opéra

- 12 Janvier 2012 : L'Oulipo invite l'Ousonmupo

- 9 février 2012 : BWV

- 22 mars 2012 : Couplains et refrets

- 12 avril 2012 : Morceaux en forme de poire

- 10 mai 2012 : Rock and roll

- 7 juin 2012 : Ce soir on improvise

Colloque des Invalides

Le 18 novembre, sur le thème "crimes et délits".
Blitzkrieg : cinq minutes d'exposé, et on coupe (puis on discute).

samedi 23 avril 2011

Einstein on the beach

Einstein on the beach sera joué à Montpellier en mars 2012.

En attendant, ubuweb nous permet de regarder le film de Chrisann Verges and Mark Obenhaus.

Rappel: Einstein on the beach apparaît dans Journal de Travers et L'Amour l'Automne. Voir ici quelques extraits d'une interview de Robert Wilson dans Tel Quel en 1977.

dimanche 17 avril 2011

Exposition Jean-Paul Marcheschi du 29 avril au 30 septembre 2011

Une lecture de Camille morte par Hervé Lassïnce aura lieu le 29 et 30 avril. Elle sera suivie de la projection du film Vers la flamme réalisé par Stéphane Bréart et Julien Filoche.








Présentation de l'exposition

À l'occasion de la deuxième présentation des œuvres de Jean-Paul Marcheschi dans son nouveau lieu du 1er arrondissement à Paris, sont présentés des œuvres murales de grande taille, des objets et des sculptures.

Dans cette exposition personnelle intitulée «L'Astre noir», l'artiste poursuit, dans des formes nouvelles, une exploration de la nuit, de la matière noire, de la mémoire et des corps, commencée voilà plus de trente ans. Envisagé depuis les commencements comme une « chrono-biologie totale » de l'existence, l'œuvre, à travers un langage qui lui est propre - la flamme, le verre, le bronze, le papier -ne cesse de conquérir de nouveaux espaces, de nouveaux thèmes, de nouveaux lieux. Depuis les Onze mille nuits (1987-2001) jusqu'à la Voie lactée (2007, vaste voûte de lumière de 35 x 14 m, installée dans la station Carmes du métro de Toulouse) et plus récemment l'exposition «Les Fastes», dans le musée de la préhistoire de Nemours (2009-2010), où fut investie aussi la forêt alentour, c'est un «contre-monde» cohérent et tendu, où le livre et la poésie tiennent une place centrale, peu commune, qui a fini par se constituer. L'air, la terre, l'écriture, le feu et plus récemment l'eau, à travers la présence accrue des Lacs, forment l'alphabet principal du peintre et sculpteur Jean-Paul Marcheschi. Noir et solaire, intime et anonyme, ce sont là les caractéristiques principales de ces États du feu.

Œuvres présentées
- Âmes mortes: l'œuvre à dominante claire, composée de fils de suie, évoque les électroencéphalogrammes du sommeil. Sur ces tracés tremblants, ces ondes, viennent se déposer des objets incertains et sans noms. Ils flottent tels des corps élémentaires déposés sur la grève : scalps, ecce homo, débris de mèches enduits de cire, fagots ou méduses, tous sont des rejets du feu. Ce sont des âmes mortes.

- Trois fragments de la Voie lactée : rétroéclairées, ces pages noircies, enserrées dans des boîtes de lumières, sont extraites de l'installation permanente dans le métro de Toulouse.

- L'Homme clair, Visions, L'Astre noir, Mers de nuages, Stèles (murales) et NY-Volcans : sculptures-objets montrées pour la première fois à Paris. Ces corps noirs, immatériaux, très volatiles, sont composés de suie non fixée, déposée sur 1 à 12 plaques de verre ou de plexi enchâssées dans des boîtes transparentes.

- Crâne-enfant : ce tableau quasi carré (1,2 x 1 m) appartient à la manière « pétrée » de l'artiste. Haut en matière, il a la consistance et la dureté de la sculpture.

Bronzes et cires : L'Ithyphallique, Horus, Ecce homo, Freux, Sanglier.

Suite Dante : composition murale d'antiphonaires et de peinture illustrant la Divine Comédie. Suie, cire, mine noire sur papier.


mardi 15 février 2011

Juan Asensio : les véritables motifs de la procédure pénale

Certains d'entre vous savent que suite à une plainte déposée en 2009 par Jean-Yves Pranchère et moi, une procédure pénale avait été engagée contre Asensio.

Juan Asensio a fait l’objet d’un rappel à la loi en date du 18 juin 2010. Le parquet lui proposait d'en rester là sous réserve d'indemnisation des parties civiles. Asensio ayant refusé toute indemnisation et donc toute conciliation, le parquet a décidé de reprendre les poursuites.

Je vous livre le contenu d la lettre que j'ai reçue il y a quelques jours afin d'éclaircir les motifs de la procédure. Il s'agit de vol de correspondance et d'accès frauduleux dans des système informatiques. Tout ce qu'Asensio peut prétendre de différent est faux.

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS
1 Quai des Orfèvres 75059 PARIS RP - SP
Le 09 février 2011

Parquet du procureur de la République
Service 11EME CHAMBRE/2
N° d'affaire : 0934803013

Première audience au fond

J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'à la suite de la procédure engagée contre M. Juan, Joseph, John ASENSIO, prévenu(e) de

ACCES FRAUDULEUX DANS UN SYSTEME DE TRAITEMENT AUTOMATISE DE DONNEES,
Infraction prévue par ART. 323-1 AL.l C.PENAL., et réprimée par ART. 323-1 AL.l, ART.323-5 C.PENAL., faits commis à Paris en tout cas sur le territoire national entre novembre 2008 et septembre 2009 et depuis temps non prescrit,

ATTEINTE AU SECRET DES CORRESPONDANCES EMISES PAR TELECOMMUNICATION,
Infraction prévue par ART.226-15 AL.2 C.PENAL., et réprimée par ART.226-15 AL.2, ART.226-31 C.PENAL., faits commis à Paris en tout cas sur le territoire national entre novembre 2008 et juillet 2009 et depuis temps non prescrit,

L'affaire sera examinée à l'audience du Tribunal de Grande Instance de Paris, 4 Boulevard du Palais, 75055, PARIS CEDEX 01 le 09 mars 2011 à 09H00, 11EME CHAMBRE/2, SALLE D'AUDIENCE DE LA 11EME CHAMBRE
L'audience est publique et chacun peut venir, qu'il soit intéressé par le fond (l'utilisation d'internet) ou par la forme (la procédure judiciaire).

ajout le 10 avril 2011: Juan Asensio tente de détourner l'attention des chefs d'accusation clairement exposés ici en s'attaquant à un article de Jean-Yves Pranchère sur un tout autre sujet. Celui-ci fait une mise au point sur le blog d'Emmanuel Régniez.

ajout le 15 février 2015: Finalement l'audience du 9 mars ne servira qu'à un report et nous serons entendus le 6 octobre 2011. Après une première condamnation et une seconde, il renoncera finalement à se pourvoir en cassation.

mercredi 12 janvier 2011

Retour sur quelques blogs

J'ai déjà cité certains, je récidive :

  • dans les blogs givrés (je veux dire obsessionnels, mono-maniaques) :

. celui-ci consacré essentiellement à Mariette Lydis (et Montherlant);
. celui-ci à Gide;
. Norwitch à W.G. Sebald mais pas que, comme le prouve la liste de droite. Blog géographique, blog de lieux.

  • ludique (l'auteur de la citation du jour est quelque part dans le nuage à droite) :

. emm. & m.

  • littéraires avec éditeur québéquois

. Antoine Bréa (dont sa traduction de Dante)
. Emmanuel Régniez (parution à venir (le 6 mars?))

  • ceux que j'ai cru perdus :

. Touraine sereine, le blog de GC (Guillaume Cingal);
. Images volées des temps enfuis, le nouveau blog de Bernard Alapetite, qui apparaît à plusieurs reprises dans Kråkmo. [1].

  • un "classique" (vieux blogueur) que je n'ai jamais cité ici :

. la page de Pierre Cormary. Je mets le lien vers un billet sur Houellebecq parce que j'aime beaucoup la phrase «C'est le chauffe-eau qui a commencé», mais évidemment, ceux qui suivent mes diverses tribulations comprendront ma tendresse pour cette sobre illustration.

Et toujours mes favoris (ne soyez pas jaloux), Fine Stagione et Weimar.

Notes

[1] 30/12/2012 : ce blog a disparu, mais vous pouvez retrouver son successeur ici

samedi 13 novembre 2010

Eugène Leroy

Exposition Eugène Leroy jusqu'au 4 décembre à Paris : Galerie de France 54 rue de la Verrerie.

Il y a une quinzaine de toiles, parfaitement mises en valeur dans un bel espace.

dimanche 31 octobre 2010

Astuce pour lire mes billets interminables

Vous trouverez sous le pavé "creative commons" une petite icône représentant une imprimante. Cela permet d'obtenir les documents sous format pdf plus lisible à l'écran (qu'il n'est pas obligatoire d'imprimer) et qu'il est possible de sauvegarder sous ce format.

D'autre part, la recherche (dans la colonne de droite) fonctionne, selon la syntaxe google (mots entre guillemets, +, -, etc).

L'indexation est en cours.

jeudi 16 septembre 2010

Le vitrail de Charlemagne

Comme l'année dernière, nous nous sommes retrouvés à Chartres pour la rentrée des "cruchons" (petit groupe de lecteurs des Eglogues ayant pris ce nom par ce qu'ils se réunissent une fois par mois au Petit Broc à Paris boulevard Raspail pour lire L'Amour l'Automne de façon suivie).

Pourquoi Chartres? d'une part parce que deux des participants viennent de Chartres tout au long de l'année et que nous tenons à leur rendre la politesse, d'autre part et surtout parce que nous disposons en la personne de Philippe d'un guide hors pair (hors de pair) de la cathédrale.

L'année dernière, je n'avais pas fait de compte rendu, de peur d'être trop imprécise, de dire trop de bêtises dans tout ce qui ne vaut que par l'exactitude. Quelques temps plus tard je l'avais regretté, mais il était déjà trop tard, trop de temps avait passé pour que je me souvienne de la voix devant les pierres ou les vitraux.
Un an après il reste des bribes, une structure sans les détails. Je me souviens devant la façade occidentale de la symbolique du nombre quarante-deux (trois fois quatorze), nombre de générations entre Abraham et le Christ (Matthieu, 1,1-17), ce qui fait qu'il y a quatorze statues (et non les douze des apôtres que j'aurais spontanément attendu) au portail (plus deux personnages de l'Ancien Testament. Moïse et Isaïe? ou Abraham?).
Identification des arts libéraux dans les petites sculptures autour du portail, rappelant le lieu de réflexion et de querelle (donc de querelle) qu'était la cathédrale; les débats entre les partisans d'une approche de la foi par la raison et ceux, autour de Bernard de Chartres, prônant une approche instinctive, par le cœur et les sentiments. (Sans doute comprenez-vous mieux mon regret de n'avoir pas relaté aussitôt mes souvenirs de cette visite, les détails sont vagues mais le souvenir très fort, puissant).
Je me souviens d'un long commentaire du portail consacré à la Vierge (dans mon souvenir il s'agit de la Vierge, mais le billet que je mets en lien évoque la symbolique de l'autel).

Après cette longue station à l'extérieur, nous fûmes condamnés à aller plus vite à l'intérieur (l'heure du repas étant intangible).
Je me souviens d'un commentaire sur la rose et le portail, et de cette remarque qui m'a tant marquée: de gauche à droite, les couleurs bleues étaient destinées aux Ténèbres et à l'Ancien Testament, les couleurs jaunes au Nouveau Testament et à la Résurrection. Ainsi, rien n'était laissé au hasard, tout était calculé (il me semble qu'il y avait aussi une symbolique des formes des vitraux, carré ou cercle, vie terrestre ou promesse, mais c'est désormais trop lointain).
Premiers vitraux sur notre gauche dans le déambulatoire, quelques mots sur les compromis politiques, théologiques et économiques que représente la fabrication, la création, d'un vitrail. L'ensemble des vitraux compose un véritable programme pédagogique et de propagande.
Vitraux du transept, les nains sur les épaules des géants, Bernard encore, qui n'a rien écrit lui-même d'ailleurs, puisqu'il n'était pas favorable à l'étude intellectuelle (si je suis trop tranchée, je compte sur Philippe pour nuancer et corriger dans les commentaires. Si j'ai fait des erreurs grossières, je modifierai mon billet sans vergogne).
Vitrail de la Belle Verrière. Je suis très touchée par la douceur de la Vierge, et très impressionnée de me rendre compte que si on ne me l'avait pas dit, il m'aurait fallu des heures avant de comprendre que cette impression est due au visage penché de la Vierge (que voyons-nous, que comprenons-nous, seuls?).

Voilà pour l'année dernière.

(Digression 1 : du parking au parvis de la cathédrale, passé devant l’évêché, dont l’un des propriétaire aurait inspiré le personnage de l'avare à Molière (enfin, c'est à vérifier: il s'agit peut-être d'un autre personnage)).

Cette année Philippe nous a proposé un commentaire du vitrail de Charlemagne, mais avant d’y parvenir (ce fut assez long car nous avons digressé à plusieurs reprises. J’espère que Philippe en a tiré la conclusion que nous étions passionnés, et non dissipés) nous avons revu quelques fondamentaux, d’abord à l’extérieur :
- la datation de la flèche romane, le poème de Péguy,
- la flèche gothique, sans doute du même maître d’œuvre que la façade de l’abbaye de la Trinité à Vendôme,
- une évocation de la charpente, désormais en acier depuis que celle en bois a brûlé («et le plomb coulait par les gargouilles, dit la légende.» L'actuelle couverture est en cuivre.)

La façade est bâchée, je suis heureuse que nous ayons pris notre temps devant les portails l’année dernière, ce n’aurait pas été possible cette année. Les vitraux ont été démontés et répartis entre divers ateliers de la région pour être restaurés. Ils sont soumis à la forte pression du vent sur ce promontoire et se déforment. Autrefois, quand ils cassaient, un plomb de casse était ajouté pour faire tenir ensemble le verre cassé, ce qui alourdissait le vitrail et le rendait plus sombre. Ces plombs de casse vont être ôtés et remplacés par de la résine invisible. De même, l’enduit de protection (contre la pollution) mis en place dans les années 80 s’est révélé imparfait (est-ce qu’il se ternit ou est-ce qu’il disparaît ? Je ne me souviens plus) et va être remplacé.

A l'intérieur, le chœur est entièrement libérés des échafaudages qui l'encombraient l'année dernière. Toute la partie supérieure est beige, très belle. Des joints ont été peints en blanc, afin de donner l'aspect de moellons tout en cachant la pierre, le matériau brut, non noble. Il s'agit à 80% du badigeon à la chaux d'origine qui a été mis à jour par les travaux. Les clés de voûte sont peintes en rouge, bleu et or. Cela rend le chœur très clair, très lumineux, d'autant plus qu'il fait beau.

Philippe en profite pour nous rappeler que l'orientation de la cathédrale n'est pas orthodoxe, que le chœur n'est pas orienté plein est, au soleil levant («La religion chrétienne est la religion de la lumière»), symbole de la Résurrection («Les églises sont donc les plus belles le matin, c'est-à-dire quand elles sont fermées») mais selon un axe nord-est, ce qui a pour conséquence qu'elle est illuminée toute l'après-midi et surtout que le soleil atteint le portail nord (nord-ouest en réalité).

Nous nous arrêtons devant les vitraux du portail nord, offert par Blanche de Castille mère de Saint Louis, les bons rois de grande taille, les mauvais petits. Salomon ressemble étrangement aux représentations de Saint Louis. Au centre Sainte Anne (Blanche de Castille?). (Le crâne de Sainte Anne avait été ramené comme relique des croisades). Rappel de ce qu'est l'arbre de Jessé.

Nous n'en finissons plus d'arriver à notre sujet, Philippe consulte sa montre fréquemment, cependant il nous entraîne devant la Belle Verrière, pour en dire quelques mots aux nouveaux venus.
Le soleil illumine les bleus, je comprends enfin pourquoi le bleu de Chartes est si connu: je le trouvais sombre — beau, oui, mais sans rien de particulier.
En fait il s'agit du bleu du XIIe siècle, plus rare, plus cher à fabriquer, plus clair, plus lumineux. «Quand les cathédrales se sont aérées et qu'il a fallu davantage de vitraux, on a cherché une solution moins coûteuse.» Je songe à la TGB dont les vitres devaient être en verre polarisé, comme ceux des lunettes de soleil, pour protéger les livres. Mais il n'y a pas beaucoup de verre sur une paire de lunette, sur la TGB cela représentait une fortune et une prouesse technique: on a préféré installer des volets en bois (exotique, je crois)...

Nous en arrivons à notre objet d'études du jour, le vitrail de Charlemagne[1].
Règle de base: un vitrail se lit de bas en haut, de droite à gauche, sauf cas particulier.
Un programme de vitraux est toujours un compromis, c'est un message à la fois politique et théologique. Le vitrail de Charlemagne côtoie la chapelle de la Vierge, symétriquement se trouve celui qui célèbre Constantin, empereur d'Orient. Ce vitrail a été offert par les peltiers, que l'on voit tout en bas, «mais en l'occurrence ils n'ont pas eu leur mot à dire» (sic: par moment le ton, l'expression, sur lesquels ont été prononcés les phrases me reviennent); c'était un vitrail avant tout destiné à mettre Philippe-Auguste en avant, dans son bras de fer avec le pape qui s'opposait à son divorce.
.2: Charlemagne apparaît en songe à Constantin (apparté sic: pas le même Constantin que tout à l'heure...) qui redoute les Turcs. Le vitrail est une merveille d'équilibre entre stylisation (impossible de tout représenter) et détails (tout est parfaitement identifiable).
3. Constantin demande de l'aide à Charlemagne par l'intermédiaire d'un évêque: rôle primordial de l'Eglise dans l'entourage de l'empereur. Le roi doit être conseillé par l'Eglise. Charlemagne est nimbé car il a été canonisé. (Nous, l'assistance, tombons des nues: Charlemagne canonisé? Oui enfin, cette canonisation a eu lieu pour des motifs douteux, politique; le nimbe n'apparaît pas toujours sur les différents vitraux...)
4. Croisade, bataille pour délivrer Jérusalem.
5. Charlemagne est remercié par Constantin qui lui ouvre son trésor. 6. Charlemagne ne veut rien, sauf des reliques, symbolisées par trois châsses.

7. Charlemagne remet les reliques à Aix-la-Chapelle. Il y a là une volonté d'établir un parallèle, ou tout au moins le suggérer: on peut imaginer que l'ensemble de ce vitrail à Chartres fait pendant aux châsses d'Aix-la-Chapelle.

9. Autre songe. (Je suis frappée par cette construction rigoureuse: trois scènes de sommeil au même endroit dans les trois épisodes successivement racontés.) Cette fois-ci c'est Saint Jacques qui apparaît à Charlemagne. La cathédrale est l'un des chemins du pélerinage (je me rappelle soudain que j'ai vu devant la façade un macaron dans le sol indiquant "Saint Jacques de Compostelle, 16xx km" (1651?)).
8. Charlemagne part pour Compostelle, guidé par la voie lactée (et je me souviens qu'on l'appelait aussi Chemin de Saint Jacques. D'où me vient cette connaissance? Des Lettres de mon moulin, l'histoire de ce jeune berger qui passe une nuit à expliquer les étoiles à la fille de son maître montée lui apporter des provisions?)
10. Charlemagne se met en route, toujours conseillé par un évêque.
11. Charlemagne prie avant la bataille.
12. Bataille. On suppose qu'il s'agit de Pampelune. Grande précision des cavales, lances, casques, château fort.

13. Construction d'une église. Les artisans sont au travail.

14. A nouveau un songe, dit "des lances fleuries": fleurit la lance de ceux qui vont mourir.
15. Bataille. Arbres ou fleurs fantastiques en arrière-plan.
16. La Chanson de Roland. Roland affronte Ferragut en tournoi.
17. Roland tue Ferragut. Il a gagné.
18. Charlemagne retourne en France. Peut-être entend-il l'appel de Roland tombé dans un guet-apens, mais Ganelon le traître, détourne l'attention du roi.

19. Roland tente de fracasser Durandal (apparté à propos de la brèche de Roland: "il est absolument impossible qu'elle est été faite par une épée!") et sonne du cor.

20. Mort de Roland.
21. La nouvelle est annoncée à Charlemagne.
22. Messe de Saint Gilles. Charlemagne n'a pas confessé l'un de ses plus graves péchés (Roland serait son fils incestueux), cependant il est pardonné durant cette messe.

Quelles intentions pouvaient se cacher derrière ce programme de vitraux? Identifier Philippe-Auguste à Charlemagne (le comte de Chartres s'oppose au roi (le comté disparaîtra plus tard et ne sera plus qu'un apanage) mais l'évêque de Chartres est un cousin de Philippe-Auguste et est favorable à sa cause).
Surtout, les croisades avaient entraîné un fort trafic de reliques. Les "vraies" reliques étaient donc certifiés par des "authentiques", des parchemins qui attestaient l'origine de la relique (apparté entre nous: le voile conservé dans la cathédrale vient de Palestine et est un peu postérieur au Christ). On peut considérer que ce vitrail est "l'autentique" du voile de la Vierge, il en est le certificat d'authentification.

Notes

[1] Ce lien explique tout et se suffit, de plus il donne les sources littéraires des légendes. Mais j'aime raconter, les mots jouent comme des pierres de mémoire, ils convoquent des sons et des images. C'est pour cela que je dis parfois que j'écris pour moi seule: ces impressions ne sont pas transmissibles.

mercredi 4 août 2010

Eh bien non, finalement non

Comme quoi j'aurais dû m'en tenir à ma bonne vieille règle: pas de publicité, ne jamais se réjouir à l'avance.

Je serai en charge de Plieux du 23 au 30 août. Avis aux lecteurs voulant égloguer, prendre le pastis ou... visiter le château.

(Les non-lecteurs sont également bienvenus).

Les semaines précédentes vous pourrez y rencontrer un autre personnage du journal afin de vérifier son existence: Rémi Pellet est dans la place durant le mois d'août jusqu'à ce que je le remplace. Je rappelle qu'il est un spécialiste de l'œuvre de Marcheschi.

jeudi 22 juillet 2010

Immigration et sans papiers

Qu'est-ce que ce sujet vient faire ici? Il s'agit pour moi d'affirmer mes convictions face aux positions de Renaud Camus, bien sûr, mais surtout (parce qu'après tout ils sont plus nombreux...) devant ses lecteurs et divers sympathisants politiques (qui sont loin de tous l'avoir lu).

En mars dernier, j'ai été frappée par une remarque de Patrick Cardon [1] qui observait qu'il existait autrefois une forme de tourisme sexuel de pères de famille (comprendre: de pères de famille venant se prostituer dans les ports de Marseille et autres) qui traversaient la Méditerranée quelques semaines pour gagner un peu d'argent discrètement puis rentraient au pays.
Aujourd'hui, s'ils sont parvenus à entrer en France, ils y restent, de peur de ne pas y réussir une seconde fois.
Il y a quelques temps (un an, deux ans?), les premières enquêtes menées en Angleterre montraient que beaucoup d'immigrés d'Europe de l'Est étaient finalement retournés chez eux après cinq ans. (Il y a cinquante ans, sans la Guerre froide, la plupart des immigrés d'Europe orientale seraient rentrés chez eux.)
En résumé, la rigidité du système favorise les installations définitives.[2]

Je suis favorable à la disparition des "sans papiers": que toute personne entrant en France ait un permis de séjour légal, qui lui permette de porter plainte en cas d'esclavage par des patrons iniques ou en cas de violences familiales ou que sais-je encore. Il s'agirait de réduire la zone de non-droit qui s'établit autour d'eux, cette zone d'ombre qui permet des exploitations honteuses.

En contrepartie, il devrait être beaucoup plus difficile d'obtenir la nationalité française. Puisque tous les étrangers auraient une existence légale, il n'y aurait aucune urgence à leur accorder la naturalisation. Dans cette logique, il deviendrait beaucoup plus simple, sans atteinte au sens commun, d'expulser ceux qui ne respecteraient pas les lois.
Reste le cas des enfants nés sur le territoire français. Pour eux je n'ai pas vraiment d'opinion, mais là encore, dans la mesure où ils peuvent être scolarisés gratuitement comme n'importe quel enfant français et qu'ils sont couverts par la Sécurité sociale de leurs parents, il n'y a pas d'urgence à leur donner la nationalité française.
J'aimais bien le fait qu'ils aient dû un moment la demander, poser un acte qui les engageait, je ne sais pas pourquoi cette règle ou loi a été abolie (je n'ai pas fait de recherches, la CJUE (ex-CJCE) est-elle intervenue? De même, qu'on me pardonne (et m'explique) les éventuelles impossibilités juridiques que pourrait comporter mon billet.)

Bien évidemment, une telle mesure aurait d'abord pour conséquence un afflux d'immigrés sans qu'en sens inverse il n'y ait de départs (ou retours): il faudrait le temps (plusieurs années, un ou deux changements de gouvernement) que les gens croient que cette loi ne serait pas changée dans les mois ou années à venir, qu'ils pouvaient retourner chez eux l'esprit tranquille, qu'ils pourraient revenir plus tard s'ils changeaient (encore!) d'avis.
C'est un peu comme la libéralisation des prix en 1986: l'idée était paradoxale, puisqu'il s'agissait de lutter contre l'inflation (la hausse des prix) en laissant chacun libre de les fixer.

Notes

[1] auteur de Tous les garçons s'appellent Ali, que je bloguerai un de ces jours.

[2] Les études montrent que paradoxalement, c'est la fermeture des frontières par Valéry Giscard d'Estaing en juillet 1974 qui a provoqué l'immigration telle que nous la connaissons aujourd'hui, le rapprochement familial devenant la façon simple de venir en France.

lundi 28 juin 2010

Exposition des œuvres de Jean-Paul Marcheschi jusqu'au 10 juillet

Marcheschi expose ses œuvres (quelques œuvres) dans son nouvel atelier, deux pièces aux beaux volumes permettant l'accrochage de plusieurs toiles d'un peu plus d'un mètre de côté (sans compter l'immense fleuve Maroni).
J'ai choisi mes deux toiles préférées, il ne me reste qu'à me trouver une Liliane Bettancourt.

Il suffit de prendre rendez-vous (Osez ! Téléphonez l'après-midi (jamais le matin) à l'un de ces numéros: 01 40 39 03 09 ou 01 40 39 07 72 ou 06 09 56 22 58 ).
Ou tentez votre chance en passant.

ouverture de 14 à 19 heures.
Adresse de l'atelier: 5-7, rue des 2 Boules 75001Paris

Code porte: A1846 Code cour RDC droite: B1407

lundi 17 mai 2010

Le blog de Günther

Je suivais avec fascination les albums de Günther sur Facebook. Thanks God il est passé sur Flickr.
(Thanks God, parce que nous savons que nos "profils" FB peuvent disparaître d'un jour à l'autre, sans explication).

D'autre part, Gunther a ouvert un blog sur l'art de Weimar.

lundi 10 mai 2010

Ricardou : photo volée

5 mai 2010, bibliothèque de l'Arsenal.


vendredi 12 mars 2010

Jeudi de l'Oulipo : l'érudition

La séance sera sous le signe des plagiaires par anticipation, ces auteurs qui ont écrit sous contrainte avant l'oulipo.
Pas de compte rendu, ce n'est pas possible: il faut être précis au mot près, sinon les textes perdent tout leur seul.

mise à jour : cette émission est désormais en ligne.


Quelques indications cependant:

Frédéric Forte lit un extrait de Salmigondis (Mulligan Stew) de Gilbert Sorrentino. Je l'ai noté, car il met ce livre au même niveau que Si par une nuit d'hiver un voyageur et La vie mode d'emploi, ce qui laisse rêveur. Vers la fin de la séance, il nous lira un extrait d'un autre livre, tout juste traduit, La folie de l'or (Gold Fools).
FF nous parlera également d'Oskar Pastior et Lectures avec Tinnitus.

Jacques Jouet évoque Mikhail Gorliouk qui lui écrivait en août 1978 à propos d'un projet de Georges Perec d'écrire un roman quadri-langues, italien espagnol anglais français, grâce au travail commun d'Italo Calvino, de Julio Cortazar, Harry Mathews et de lui-même, Georges Perec. On ne sait ce qu'il advint de ce projet, mais la parution de Si par une nuit d'hiver un voyageur et du Voyage d'hiver, à quelques mois d'intervalle, fait penser que le livre était en cours de réalisation.
J'ai retrouvé (ajoute Jacques Jouet) un texte de Goethe, dans son autobiographie Dichtung and Wahrheit, qui annonce le même projet. (Suit la lecture dudit passage).
Le problème, c'est qu'il est impossible de se faire une opinion: Gorliouk, vrai ou faux nom? Vrai ou faux projet de Perec? Et le texte de Goethe existe-t-il? (pour les germanistes qui voudront chercher: ce texte parle d'une sœur qui écrira en style féminin, d'un frère théologien, d'un plus jeune utilisant le yiddish1.

Marcel Bénabou se lance dans une démonstration compliquée qui revient à dire que "lit" signifie "littérature" dans Proust (et plume, et page), et que donc «Longtemps je me suis couché de bonne heure" (évoquant le lit donc la littérature) est l'utilisation du futur stratagème de Perec reconnaissant la lettre hébraïque "mem" tandis que tout W ou les souvenirs d'enfance parle de la mémoire (lit=> littérature, mem=> mémoire; d'où Proust plagiaire de Perec, si vous suivez. D'ailleurs contrepétrie ("antistrophe") dans le titre A la recherche du temps perdu: A la recherche du père tendu).

Michelle Audin lit un extrait de Vertige des listes d'Umberto Eco. «Soixante-quatorze cases de l'échiquier», entends-je, et je suppose qu'elle s'est trompée à la lecture. Mais non, elle relit plus tard, l'erreur est encore là, elle relit soixante-quatorze. Erreur du traducteur. («Si 99 cases est un clinamen, 74 est une erreur.»)
Elle va vérifier le texte de Dante (il s'agit d'un passage du Paradis) et tombe sur les notes infrapaginales absurdes d'Alexandre Masseron, qui n'aime pas Arnaut Daniel et considère que dix-huit milliards de milliards est infini… Michelle Audin nous fait remarquer qu'entre soixante-quatre et soixante-quatorze, il y a un facteur mille. (Etc.)

Ian Monk et Olivier Salon se sont livrés à des exercices de virtuosité que je ne me risque pas à évoquer. ("les érudits du football… les érudits du shit… les érudits de la physique… et j'ai étudié les tropes, voici donc une mise en tropes (etc.)")

Je crois que c'est Jacques Jouet qui remarqua que la seule consolation au fait de ne pouvoir démissionner de l'Oulipo était de savoir que les autres étaient coincés aussi. Cependant, Jacques Jouet a découvert dans la bibliothèque oulipienne une correspondance de lettres anonymes découpées dans du journal proposant quelques solutions:
- le suicide devant huissier en précisant bien que la seule raison du suicide est la volonté de sortir de l'oulipo;
- l'assassinat (de l'oulipien qui dérange) par l'ensemble du groupe, toujours devant huissier, et toujours en précisant que (etc.). Problème: tous les oulipiens ne seront sans doute pas détenus dans la même prison. Communiquer entre eux à travers la France à coup de cuillères sur les tuyaux…
- ou alors le suicide en groupe, toujours selon les mêmes modalités. Mais alors, que va devenir l'oulipien qui restera? Sera-t-il ronger de remords, cooptera-t-il aussitôt d'autres oulipiens?


1 : Vérification faite ce soir, Gorliouk est un avatar de Jacques Jouet.

vendredi 18 décembre 2009

Quelques sites et blogs

Un billet paresseux pour indiquer d'autres blogs, d'autres lieux...


autour d'un auteur :

  • Sebald, Hilberg, la mémoire, Claude Simon : Norwitch (d'étranges résonnances avec les cours de Compagnon de l'année dernière. Ce billet par exemple en est sans doute une bonne illustration, ou démonstration, ou résumé.)
  • Jean-Jacques Rousseau (plus exactement : le blog qui accompagne le projet théâtral de représenter Les Confessions]

autour des livres

- des photos de livres
- des photos de bibliothèques
- un blog de bibliophile au sens large (l'imprimerie, la reliure, les ventes aux enchères, les statistiques du marché du livre ancien, etc)

- entre les deux, s'attachant aux auteurs oubliés dans des éditions disparues (ou l'inverse, bien sûr): l'éditeur singulier, dont le livre sur les dandys doit pouvoir s'offrir à Noël.

- sinon, une liste de 15 pavés parus dans les années 2000.

et un peu de poésie.

vendredi 20 novembre 2009

La maison de tante Léonie se délabre.

18 novembre : anniversaire de la mort de Proust.
Patrick m'envoie un article de l'Echo républicain, datant sans doute du 16 novembre :

«Nous attendons le sauveur du musée Marcel-Proust.» Cet espoir, Mireille Naturel, secrétaire général de la Société des amis de Marcel Proust, l’association propriétaire des murs et qui gère le musée, l’a énoncé vendredi. Des propos alarmistes à la mesure de l’état de délabrement des bâtiments situés 6 rue du Docteur-Proust, à Illiers-Combray. La façade donnant sur la rue laisse apparaître un revêtement dégradé et des huisseries qui le sont tout autant. Pire! Depuis deux ans, le couloir qui permet d’accéder au salon oriental offre au regard des étais enchâssés dans un mur éventré tandis qu’au plafond un placage dissimule des dégradations tout aussi inquiétantes.

Mais comment en est- on arrivé là ? Avec des recettes tirées des quatre mille entrées annuelles et du fruit des adhésions des membres de la société, l’équipe qui gère l’établissement est uniquement en mesure de faire face à ses charges (masse salariale et frais de fonctionnement). Et c’est un euphémisme, le compte de résultats pour cette même année faisant apparaître un déficit de 782 €. Dans ces conditions le conseil d’administration de l’association se trouve dans l’incapacité de faire réaliser les travaux.

«La somme des devis s’élève à 24000 €», a révélé la secrétaire général. «Bien que la maison soit classée monument historique, les subventions auxquelles nous pouvons prétendre ne couvriraient que 55% de la somme.» La société se trouvant dans l’incapacité de dégager un financement propre, la situation demeure donc figée.
Mireille Naturel ne voit d’issue que dans un soutien financier revu à la hausse par la ville d’Illiers-Combray et le conseil général d’Eure-et-Loir. La première a alloué cette année une subvention de 500 €, alors que le second a versé 6000€. Des collectivités territoriales qui, selon elle, «n’ont pas pris la mesure de notoriété que le musée pourrait procurer à la commune comme au département.»

Cette opinion, le maire (divers droite) de la commune, Jean-Claude Sédillot, l’entend, lui qui a reconnu, le 3 novembre, que «tous les Islériens ne sont pas des Proustiens. Ils ne mesurent donc pas l’intérêt que peut représenter Marcel Proust pour la ville.» Pour autant il a assuré que «nous ne nous désintéressons pas du musée.» Et d’affirmer: «Si nous avons connaissance des dégradations, aucune demande de subvention exceptionnelle ne nous a été transmise.»
Vendredi, au conseil général, Wifried Verna, directeur de cabinet du président, a défendu, quant à lui, une vision à long terme. «Nous sommes d’accord. Il faut faire quelque chose pour ce site magique. Mais nous devons nous inscrire dans un projet de sauvegarde, protection, valorisation et développement.» Un plan dont le déclencheur ne peut être que «le maître d’ouvrage qui n’est autre que la Société des amis de Marcel Proust». Et de rappeler «Si la société se trouve en butte à une carence en définition, le département est prêt à fournir son aide. Cette offre a été transmise.»

Ariel Schwarz

(J'adore ces dernières phrases.)

dimanche 11 octobre 2009

Index des livres et auteurs cités

Ce n'est pas exhaustif: je n'ai relevé que les noms ayant donné lieu à quelques commentaires ou une citation in extenso (pour le reste, la fonction "recherche" du blog suffit, je pense.)
Tentative interrompue en décembre 2009: à partir de janvier 2010, contitution d'un index à partir de tags.
.

  • A

Abreu, Caio Fernado - Petites épiphanies, Camille Claudel, le tournesol

Agefi - mini-jupe et moral économique

Arendt, Hannah - La Crise de la culture, la morale selon Hobbes

Arendt, Hannah - Vies politiques, Angelo Guiseppe Roncalli

Anthologie de la poésie russe pour enfants - extrait de l'introduction, "Le conseil de la souris" de Samuel Marchak, "Leçon de français" de Roman Sef et "L'orange" d'Oleg Grigoriev

  • B

Barthes, Roland - Roland Barthes par Roland Barthes, la bathmologie, si le stéréotype passait à gauche

Barthes, Roland - à propos de S/Z, Barthes poète

Barthes, Roland - notes transcites en écoutant le cours sur Le Neutre: le chagrin de Barthes, la franchise

Baudelaire, Charles - Mon cœur mis à nu, soyons médiocres

Bell, Gertrude - Letters of Gertrude Bell, évoquées dans La Prédominance du crétin, de Frutero et Lucentini

Bioy Casarès, Adolfo - L'Invention de Morel, l'éternité dans la durée d'une semaine

Blanchot, Maurice - La fuite de la vie par l'écriture et la lecture dans «Le Roman, œuvre de mauvaise foi», Les Temps modernes 1947

Blixen, Karen - Nouveaux contes gothiques, le nez, la tragédie, le souci

Block, Lawence - Les fleurs meurent aussi, compte-rendu

Bonnefoy, Yves - Rome 1630, la structure du prestige

Borel, Marie - Priorité aux canards, quelques mots

Borel, Marie - Le monde selon Ben, compte-rendu

Borgès, Jorge Luis - Conférences, les livres, le roman policier

Boulgakov, Michaïl - Le maître et Marguerite, la montée vers la lune

Brasseur, Roland - Le quarante-quatrième jour, compte-rendu, la virgule

Butor, Michel - Passage de Milan, thématique du reflet, de la réflection et de la transparence

  • C

Calimaque - l'enfer surpeuplé

Cavafis, Constantin - Depuis neuf heures

Chandler, Raymond - The long Good-Bye, arrêter de boire

Chevillard, Eric - Le vaillant petit Tailleur, un poisson rouge

Chomsky, Noam - Penser par soi-même

Compagnon, Antoine - Les Antimodernes, critique d'Enthoven; Maistre et Bonald; les conservateurs libéraux en art; les législateurs bébés (de Maistre), la méthode de Thibaudet, le parti de l'intelligence

Conrad, Joseph - Des souvenirs, compte-rendu

Crane, Stephen - Le bateau ouvert, compte-rendu

  • D

Dard, Frédéric - (San Antonio) la défense du français dans Foiridon à Morbac City

Dewitte, Jacques - extraits de "Pouvoir du langage et liberté de l'esprit" in Les Temps modernes, mai 1991 et "Langage et inhumain" in Les Temps modernes, décembre 1996

Dumas, Alexandre - Joseph Balsamo, les femmes ne font pas la cuisine

Durand, Claude - préface à La Campagne de France de Renaud Camus

Duvert, Tony - Le Voyageur, de beaux draps

  • E

Eco, Umberto - Six promenades dans les bois du roman, comment reconnaître un film pornographique

Eco, Umberto - De la littérature, la lecture par imprégnation

édition - la chute de Josiane Savigneau et l'importance des émissions télévisées

  • F

Flaubert, Gustave - vœux de nouvelle année

Force, Pierre - Le problème herméneutique chez Pascal, les degrés ou bathmologie, définition de l'herméneutique, compte-rendu du livre.

Foucault, Michel - Raymond Roussel, compte-rendu

Frutero & Lucentini - La Prédominance du crétin, Gertrude Bell

Fumaroli, Marc - Exercices de lecture, préface

  • G

GAGE - association achrienne s'éloignant du camusisme

Gautier, Théophile - Histoire de la marine, cité par Eugène Sue dans Romans de mort et d'aventures.

Gide, André; Louÿs, Pierre; Valéry, Paul - Correspondances à trois voix, des nouvelles sans conséquence, les choses tues en amitié

Golding, William - Trilogie maritime, citation via un article universitaire.

Grigoriev, Oleg - L'orange

Grossman, Vassili - Vie et Destin, la bonté

Guinzbourg, Evguénia S. - Le vertige, la bonté

  • H

h - aspiré ou pas?

Hadot, Ilsetraut - préface aux Consolations de Sénèque

Haffner, Sebastian - Histoire d'un Allemand, la mode parisienne en 1933, compte-rendu, le père: ce qui ne se fait, l'influence de la littérature, portrait de fonctionnaire, une vie en ruines.

Houppermans, Sjef - Renaud Camus érographe, l'écriture camusienne

Hugo, Victor - La légende des siècles, Sultan Mourad, Eviradnus

Hugo, Victor - Toute la Lyre, le haricot

Hugo, Victor - jugé par Paul Valéry

Huttington - a tort d'avoir raison

  • J

Jonas, Hans - Souvenirs, la tante poète lamentable, la source du Dictionnaire khazar, Husserl inconnu dans sa famille, philosopher en anglais ou en allemand, réception de la philosophie aux Etats-Unis, assimilation et sionisme

Jourde, Pierre - Le crétinisme alpin in Petit déjeuner chez Tyrannie, définition du crétin

  • K

Kavanagh, Dan - The Duffy omnibus

Kierkegaard - Post-scriptum aux Miettes philosophiques, la chance de ne rien devoir aux critiques

Klemperer, Victor - Je veux témoigner jusqu'au bout, assimilation et antisionisme

  • L

Lançon, Philippe - possible auteur de Je ne sais pas écrire et je suis innocent

Lapierre, Nicole - Le silence de la mémoire, à la recherche les juifs de Plock, compte-rendu

Larbaud, Valery - une remarque de Jan Baetens, Allen, la virgule, l'avarice de la province

Larbaud, Valery - 200 chambres 200 salles de bain, compte-rendu

Lec, Stanislaw Jerzy - Pensées, les fautes d'orthographe

Léon, Paul - professeur, auteur d'un article sur le regard à propos de Renaud Camus

Levé, Edouard - Suicide, compte-rendu

Lewis, C.S. - The voyage of the Dawntrader, la mer du bout du monde

Lindqvist, Sven - Maintenant tu es mort, le goût de la guerre

Louÿs, Pierre; Valéry, Paul; Gide, André - Correspondances à trois voix, des nouvelles sans conséquence, les choses tues en amitié

Lucentini & Frutero - La Prédominance du crétin, Gertrude Bell

  • M

Maistre, Joseph de - cité par Jean-Yves Pranchère : personne ne fait son devoir

Manguel, Alberto - le traducteur, conducteur de caravane (préface à 200 chambres 200 salles de bain)

Marchak, Samuel - Le conseil de la souris

Maupassant - musique à Palerme

Mauriac, François - D'un bloc-note à l'autre, Fromentin, la grippe et la virgule

Maurois, André - Les discours du docteur O'Grady, le portugais sans peine, un chien français

Mitchell, Margaret - Autant en emporte le vent, vivre sans réputation

  • N

Nabokov, Vladimir - Ada, Ladore/Mont-Dore, Lucette, ''René'', Chateaubriand, préface de Mary McCathy à Pale Fire

Nabokov, Vladimir - Lolita, définition de la pornographie

Nietzsche - Humain, trop humain, la langue abstraite de la grande culture

  • P

Paasilina, Arto - La forêt des renards pendus, la mort de la mère Jarmanni

Palliser, Charles - Le Quinconce, quelques remarques

Pascal, Blaise - [analyse de sa méthode de lecture|http://vehesse.free.fr/dotclear/index.php?2008/10/17/1129-le-probleme-hermeneutique-chez-pascal-de-pierre-force ] par Pierre Force.

Peeters, Benoît - La bibliothèque de Villers suivi de Tombeau pour Agatha Christie, compte-rendu

Poe, Edgar Allan - The Narrative of Arthur Gordon Pym, compte-rendu

Pound, Ezra - a.b.c. de la lecture , le rouge

Pranchère, Jean-Yves - L'autorité contre les Lumières, compte-rendu avec un focus sur la linguistique et une première bibliographie sur le sujet, personne ne fait son devoir

Proust, Marcel - Du côté de chez Swann, intimité entre l'église et l'âme de Françoise

Proust, Marcel - A l'ombre des jeunes filles en fleurs, Odette écrit (ou peint); le mauvais goût bourgeois et le bon goût paysan; une tête comme un donjon aménagé en bibliothèque; les traits et les idées tiennent de la famille

Proust, Marcel - Lettre du 6 novembre 1908 à Mme Strauss: un écrivain fait sa langue

  • R

Rannoux, Catherine - Les fictions du journal littéraire, identification de sources dans Fendre l'air

Robbe-Grillet, Alain - Les Gommes, les P.T.T.

Roche, Mazo de la - Jalna, bataille de polochons

Rostand, Edmond - Cyrano de Bergerac, une virgule, c'était vous

Roubaud, Jacques - Les animaux de personne, Le mouton à grosses fesses; Le Maki Mococo

Rudnicki, Adolf - Les fenêtres d'or, la fin du ghetto de Varsovie

  • S

San-Antonio - la défense du français dans Foiridon à Morbac City

Santerre, Rémi - L'Ecart, Renaud Camus est Othon

Sartre, Jean-Paul - Nabokov, enfant de vieux, aurait beaucoup trop lu

Savigneau, Josiane - son départ du Monde

Sef, Roman - Leçon de français

Sénèque - Les Consolations, préface d'Ilsetraut Hadot

Sevran, Pascal - Il pleut, embrasse-moi, maniérisme de Renaud Camus, le rêve des lecteurs

Shakespeare, William - La Nuit des Rois, allocation de poils

Starobinski, Jean - Les mots sous les mots, les anagrammes de Saussure, aujourd'hui réédité

Supervielle, Jules - ''La prière de Lola à Saint Antoine

  • T

à propos d'Albert Thibaudet

Todorov, Tzevan - Face à l'extrême, mourir pour la Pologne

  • V

Valéry, Paul; Gide, André; Louÿs, Pierre - Correspondances à trois voix, des nouvelles sans conséquence, les choses tues en amitié, Valéry juge Victor Hugo

van Crevel, Martin - On future war, le goût de la guerre

Vaugelas, Claude (Fabre de) - Remarques sur la langue française utiles à ceux qui veulent bien parler et bien écrire la langue, cacophonie, qu'on et que l'on, les femmes ne sachant pas le latin référence du bon usage de la langue (fort/bien, cela/ça)

Veyne, Paul - Sénèque, certificat médical pour Britannicus

Villon, François - Ballade

  • W

Walzer, Pierre-Olivier Walzer - Paul-Jean Toulet, qui êtes-vous ?, compte-rendu, rapport que l'auteur doit entretenir avec ses personnages

Waugh, Evelyn - Viles Bodies - vol de stylo, compte-rendu

Weil, Jiri - Vivre avec une étoile, la joie et le chat Thomas, Beethoven

Woolf, Virginia - Les Vagues, le 25 juin

Woolf, Virginia - Mrs Dalloway, l'instant présent

Wright, Lawrence - The looming tower, Rousseau et Lénine

  • Z

Zagdanski, Stéphane - résistance de la pensée juive

mardi 8 septembre 2009

Sagesse populaire

Le sot montre à tous le trou dans son tapis, le sage met le pied dessus.

lundi 22 juin 2009

Du poil sur les texticules

On se fait des cheveux quand on est à poil. C'est la barbe! alors on rase les murs. On fronce les sourcils, et si l'on n'a pas un poil dans la main, sans se poiler, on mesure! On mesure le temps qui passe et ne repasse jamais (dommage pour nos chemises). On le mesure au petit poil, le poil étant l'unité de mesure universelle, né dans la soupe primitive trois milliard six cent millions d'années avant Jarry. Ne dit-on pas qu'il s'en est fallu d'un poil de mouche, d'un cheveu, pour que la vie n'apparaisse pas sur la Terre qui n'est qu'une planète poilue.

On a réglé cette affaire au quart de poil. Si cela n'avait pas eu lieu, on l'aurait raté à un poil près. Ratée, dit le rat poilu; loupée, répond le loup à poil.

Pour l'instrument de mesure on a le choix, le temps d'un battement de cil.

[...]

extrait de Viridis Candela n°27, p.52 Carnets trimestriels du Collège de Pataphysique, 21 pédale 134 Ep, vulg. 15 mars 2007

mardi 16 juin 2009

Extrait de la préface des Infréquentables de Juan Asensio

En novembre 2006, Renaud Camus me demandait d’écrire l’article qui devait paraître dans le numéro de la Presse littéraire consacré aux «Infréquentables». Bien qu’ayant quelques réserves personnelles à l’encontre de Juan Asensio, rédacteur en chef de ce numéro, j’acceptai, estimant qu’il s’agissait d’un travail à rendre, et non d’un vœu de perpétuel dévouement à un blogueur que je ne lisais que rarement, et toujours avec surprise, tant sa violence gratuite me paraissait théâtrale et enfantine.

Les relations furent polies. Je savais dès l’origine que nous rencontrerions des problèmes: en effet, malgré ma demande, JA ne me donna pas de nombre de signes à respecter ni de consignes de mise en page comme il est coutume d’en donner (je tiens les mails échangés à disposition, en d’autres termes, je possède les preuves de ce que j’avance). Je mis cela sur le compte de l’inexpérience et prévus des grincements de dents lors de la mise en page définitive. La suite me donna raison: JA se retrouva avec des articles trop longs pour le nombre de pages de la revue et dut en sacrifier quatre.
De même, sa relecture très attentive fut la source d’un peu d’étonnement: il ne semblait pas connaître certaines constructions légèrement vieillies, ni percevoir la très légère ironie ou l’emphase que pouvait produire le fait de les utiliser (là encore, échange de mails disponibles).
Bast, tout cela n’était pas bien grave. J’acceptai quelques corrections par politesse et refusai celles qui touchaient à l’exactitude de ce que je voulais exprimer.

La revue parut, JA voulut que j’en fasse la publicité sur mon blog. Il n’est pas dans la tradition camusienne de faire de l’auto-promotion, mais par politesse toujours, je me pliai à sa demande. Bien entendu, les premières réactions furent la surprise peinée: comment avais-je pu accepter de faire paraître un article sur Renaud Camus aux côtés de Brasillach and co, me demandèrent les lecteurs fidèles? Réponse: Renaud Camus lui-même me l’avait demandé, j’avais écrit un article littéraire et non politique.
Juan Asensio n’était pas content: comment, je ne défendais pas "Les infréquentables"? Eh non, les infréquentables, il faut bien l’avouer, me sont à peu près indifférents (cela se transforma sous sa plume en «Valérie Scigala insulte les autres auteurs de la revue»). D’autres «fidèles», rameutés par JA, vinrent argumenter sur mon blog. (Cela reste pour moi un mystère: comment de grands garçons d’un naturel plutôt agressif peuvent-ils ainsi se laisser mener par le bout du nez par JA? Qu’espèrent-ils, que leur doivent-ils, que comprennent-ils à ses écrits pour ainsi le servir?)
Quoi qu’il en soit, les choses en seraient sans doute restées là sans Didier Goux, qui commença ainsi un article sur son premier blog aujourd’hui disparu:

Je suis plongé depuis ce matin, dans le hors-série de La Presse littéraire. Ce que j'en ai lu jusqu'à présent me semble de bonne tenue et d'harmonieuses proportions. Il est d'autant plus navrant de voir l'édifice partiellement gâché par son narthex, je veux parler de l'article d'ouverture de Juan Asensio, rédigé dans un style calamiteux, d'un pompeux m'as-tu-vuisme, qui mène sa prose jusqu'à la frontière du lisible.

Mortifié, Juan Asensio invectiva Didier Goux et m’appela à son secours.
Las, je ne le défendis pas. Je lui fis quelques remarques polies, le remerciant du travail fourni, etc, mais sur le fond, je lui dis qu’il n’était pas dans mes habitudes de venir au secours de quelqu’un d’inexplicablement agressif et manquant d’élégance morale (Je me cite: «Vous [JA] avez parlé de mon "dégoût", et vous parlez de "pseudo-mâles": voyez-vous, mon dégoût va aux commentaires [1] que vous avez laissés chez Slothorp en d'autres temps, et si c'est cela un mâle, j'appelle cela un mufle. Il est deux qualités que j'apprécie chez les hommes: la gentillesse et l'élégance, l'élégance morale avant tout, une paire de chaussures n'y suffit pas.» (Et si j’en crois mes informateurs, JA est toujours aussi incapable de saisir l’attrait irrésistible d’un Pascal Zamor ou d’un Jean-Yves Pranchère, sachant nous faire partager leurs connaissances ou leurs enthousiasmes sans nous écraser de leur savoir, avec humour et légèreté. Ou alors, sans le comprendre, JA ne le ressent que trop, et c’est ce qui le rend fou : oui, c’est effectivement le plus probable.)

Il y avait bien sûr une autre raison à ma façon de botter en touche : c’est que je partageais l’avis de Didier Goux, et que je ne voulais pas le dire, pour ne pas nuire à la revue et ne pas être discourtoise avec quelqu’un qui avec qui j’avais travaillé dans de bonnes conditions.

Ainsi, je ne dis rien à Juan Asensio de ce que je pensais de sa façon d’écrire.
Mais aujourd’hui, deux ans et demi plus tard, il y a prescription. Une rumeur insistante m’informe qu’il a de nouveau commis un billet haineux (je ne vais jamais sur son site depuis que j’ai compris qu’il vit pour et par ses statistiques ; j’ai hélas des amis moins rigoureux), je vais donc faire un commentaire ligne à ligne d’un extrait de l’introduction qui avait provoqué la remarque de Didier Goux, en retenant les quelques lignes concernant Renaud Camus.

Mon cher Juan, je suis sûre que tu ne m’en voudras pas, car tu écrivais chez Didier le 11 mars 2007: «Je n'ai jamais refusé une critique et je réponds à toutes: je passe mon temps, ici-même, à demander à l'imbécile Gloups qu'il dépasse le stade de l'impression, ce qu'il ne semble pas vraiment parvenir à faire.»
(Et je ne doute pas que ta réponse va être un monument de courtoisie et d’arguments soigneusement pesés, dans le style inimitable (heureusement) qui est le tien.)

Reprenons: malgré son aspect bulldozer, Didier est sans doute bien trop gentil pour «dépasser le stade de l’impression», (la preuve, il t’a pardonné, tandis que de moi, tu n’obtiendras que du mépris tant que tu n’auras pas reconnu publiquement tous tes mensonges), et donc je vais m’en charger, comme je m’étais promis de le faire à ta prochaine agression.

Je commence par donner une vue d’ensemble du texte que je vais commenter, afin que ceux qui ne connaissent pas ton style incomparable puisse s’en faire une première idée, puis je le reprendrai ligne à ligne. Nous constaterons alors que si JA a quelques bonnes idées, il s’acharne à les rendre obscures, et plus étrange, à en prendre le contrepied dans la même phrase, tant et si bien qu’on ne sait plus ce qu’il faut comprendre ni ce qu’il voulait dire.
On est amené à se demander ce qu’il comprend de ce qu’il écrit, et partant de ce qu’il lit. (Mon principal ressenti en lisant JA est la stupeur).

NB : Je souligne sur cette vue d’ensemble les adverbes en -ment, afin de mettre en évidence un tic stylistique juanien. Les italiques et les notes de bas de page appartiennent au texte d’origine.

Conservateur voire réactionnaire (en plus de la méfiance à l’égard des « forces du Progrès » s’ajoute la volonté d’en découdre et, surtout, la vision plus ou moins fantasmée d’une lointaine Origine censée nous assurer la reprise de quelque immémorial Âge d’or) mais surtout esprit religieux, cette première tentative de définition, on le remarque rapidement, est parfaitement incapable de rendre compte de l’ostracisme dont souffre l’infréquentable Renaud Camus, que j’étonnerais sans doute et peut-être même scandaliserait durablement si je lui soufflais, ex abrupto ou plutôt ex cathedra, que ses ouvrages, alors même que leur auteur multiplie avec talent les formes d’écriture et les angles d’attaque, peuvent commodément trouver une place dans la catégorie elle-même sujette à discussion de «logocrates» [2], dans laquelle Georges Steiner enfermait prudemment Joseph de Maistre, Martin Heidegger ou encore son ami Pierre Boutang. Certes, on peut, comme j’ai tenté de le faire dans un article évoquant le superbe Rannoch Moor [3], rapprocher la démarche éminemment cratylienne de cet écrivain de race (tant pis pour les imbéciles que je choquerai en employant ce fort vilain mot), soucieux de ne point tenir une plume pour seulement divertir ses lecteurs, de celle d’un Boutang affirmant dans son Art poétique l’excellence de la langue française. Evidemment, de telles catégories conviennent encore moins à un auteur tel que Frédéric Rolfe, surnommé le baron Corvo, dont la carrière littéraire aussi intense que scandaleuse n’a pu trouver dans ces pages, je le regrette, sa place. Et combien d’autres qui assurément ne peuvent être parqués, à moins qu’on ne fasse fi de la subtilité de leurs œuvres et de leurs propres réserves quant à la propreté de leur cage, dans cette catégorie paradoxale définie par Steiner, un peu trop visiblement pressé de se débarrasser de rivaux qui le fascinent ?

Il y a donc plus disais-je, ou peut-être, puisque la marque de notre époque est de tirer irrésistiblement vers le bas les réalités les plus hautes, ou peut-être, il y a moins. Car enfin, je ne suis pas certain qu’un auteur tel que Renaud Camus accepterait je le répète aussi facilement d’être portraituré de si grossière façon: le «logocrate» fait le pari d’une transcendance, d’abord celle des mots dont il se sert avec respect, ensuite, celle d’un Ailleurs (celui de Joseph de Maistre n’est bien sûr pas le même que Martin Heidegger, qui n’a sans doute lui-même rien à voir avec celui de l’inflexible Pierre Boutang) que les mots reflètent et cachent tout à la fois selon Pascal. Banalement, le logocrate, Steiner l’admet bien volontiers, est d’abord un écrivain de talent, parfois de génie, sa matière est le langage.

Se servir des mots comme d’une pâte qu’il s’agit de faire gonfler, plus qu’une image commode, oriente notre tentative de définition de cette notion décidément floue que constituent les infréquentables vers une dimension stylistique qu’il sera peut-être plus facile de caractériser. Car l’infréquentable est d’abord un écrivain dont le moins que l’on puisse dire est qu’il a quelque style, tant pis si celui-ci est réputé provenir de droite [4] (à moins que tout ce qui vient de ce camp ne soit décidément parfaitement inacceptable). Le cliché, certes seriné depuis des lustres, suffit toutefois à déclencher les foudres de nos petits Jupiter parisiens qui préfèrent aux amples expectorations de Saint-John Perse ou aux puissants versets de Claudel la prose microcéphale de Ponge et de ses milliards de clones tout aussi minuscules : Cioran s’extasiant sur les vertus de la phrase de Joseph de Maistre au point qu’il consacre au sulfureux auteur des Soirées de Saint-Pétersbourg l’un des plus étonnants exercices d’admiration, Georges Steiner défendant Pierre Boutang dont l’œuvre politique, métaphysique et littéraire, cela ne fait aucun doute dans l’esprit des Réelles présences, est une des toutes premières du siècle, voici deux exemples caractéristiques de que nous pourrions appeler une espèce de sidération. C’est que le grand écrivain, ou plutôt l’écrivain véritable [5] se fait de l’écriture une conception éminente, que l’on ne saurait en aucune façon réduire aux ridicules jeux de langue si chers aux tripoteurs de la déconstruction ni même aux maigres sottises oulipistes, fussent-elles enrobées d’une glue où se colleront les bavardes et insignifiantes Cixous, bourdonnant comme quelque mouche zélée autour d’une loupiote à la lueur chiche. L’infréquentable, s’il sait écrire (et nous voyons que cette simple qualité suffit à faire de lui, par avance, un homme enfermé dans un in-pace où les vertueux sans style le tiennent à l’écart), sait aussi que ce don, cette vocation (qui est appel, vocatus, se plaisait à répéter Bernanos), il doit en rendre compte, il en est responsable. Nous revenons ainsi à notre point précédent qui pose problème: la question de la transcendance — pas seulement, donc, celle de la métaphysique [6] — barre systématiquement la conception d’un langage compris non tant comme une construction d’une redoutable complexité dont quelque savant programme informatique chomskien parviendra tôt ou tard à casser le code que comme trace, au milieu des hommes et favorisant leurs échanges (ou créant au contraire une dangereuse cacophonie), du Dieu enfui selon Höderlin ou éclipsé selon Buber.

Affirmer la prééminence du style, c’est-à-dire, d’une écriture travaillant sur sa propre matière spiritualisée, c’est donc poser, peut-être bizarrement, l’existence de Dieu, grammairien par excellence, à moins qu’on ne suppose la présence, étrange, parodique et, pour le dire d’emblée, parfaitement vaine à nos yeux, d’un écrivain choisissant avec une maniaquerie maladive tel vocable érudit plutôt que tel autre à seule fin de ciseler ses bibelots sonores, de tailler dans la substance la plus rare ses décadents émaux et camées qui raviront peut-être quelque futur Des Esseintes collectionneur de pierres rares.

Juan Asensio, "ouverture" des Infréquentables, La Presse littéraire HS n°3, mars 2007, p.12 à 14



Passons maintenant à l’analyse ligne à ligne. J’y mets de la bonne foi, j’essaie réellement de comprendre comment s’articulent les différentes phases du texte.

  • Conservateur voire réactionnaire (en plus de la méfiance à l’égard des « forces du Progrès » s’ajoute la volonté d’en découdre et, surtout, la vision plus ou moins fantasmée d’une lointaine Origine censée nous assurer la reprise de quelque immémorial Âge d’or)

OK. Parlant de qui je connais (Renaud Camus), évoquer l’origine comme âge d’or à retrouver ou à reprendre (pourquoi les italiques ?) est pertinent.

  • mais surtout esprit religieux, cette première tentative de définition, on le remarque rapidement, est parfaitement incapable de rendre compte de l’ostracisme dont souffre l’infréquentable Renaud Camus,

OK pour une part : RC n’est effectivement pas religieux (voir Vigiles p.18)
Cependant je ne comprends pas le rapport entre ostracisme et esprit religieux. Souffrirait d’ostracisme tout esprit religieux, et Renaud Camus n’étant pas religieux, ne devrait pas souffrir d’ostracisme?
Ou: Renaud Camus n’étant pas religieux, l’ostracisme tient à autre chose?
Ce doit être ça, mais dans ce cas, il manque une précision à la phrase de JA: il fallait écrire que RC ne professait aucune foi. Sinon la transition logique est incompréhensible, sans compter qu’il reste à prouver que les esprits religieux souffrent d’ostracisme.

  • que j’étonnerais sans doute et peut-être même scandaliserait durablement si je lui soufflais, ex abrupto ou plutôt ex cathedra,

ex ante, ou plutôt ex nihilo,
entre la poire et le fromage, ou plutôt entre chien et loup,
(J’espère que les pages roses ne disparaîtront pas trop vite des dictionnaires).
(Voilà, JA, les enflures qui nous font sourire, puisque vous vouliez comprendre notre jugement sur votre style.)

  • que j’étonnerais sans doute et peut-être même scandaliserait durablement si je lui soufflais que ses ouvrages, alors même que leur auteur multiplie avec talent les formes d’écriture et les angles d’attaque, peuvent commodément trouver une place dans la catégorie elle-même sujette à discussion de «logocrates»

Pas compris. En quoi est-ce scandaleux?
Pour que RC soit scandalisé, il faudrait 1/ que l’opinion professée soit scandaleuse 2/ que celui qui la professe ait une quelconque importance aux yeux de RC (ce qui reste à démontrer: cf p.318 du Royaume de Sobrarbe, où JA qui attend en vain des remerciements de RC pour une critique qu’il a rédigée, se plaint auprès de l’écrivain de son manque de gratitude. Froidement, RC lui écrit que leurs relations peuvent en rester là ; JA s’incline et présente des excuses.)

  • Georges Steiner donne, comme références communes et incontournables aux auteurs qu’il qualifie de logocrates «le Cratyle, les fragments d’Héraclite et le poème de Parménide», Les Logocrates (L’Herne, 2003), p.14

En quoi être qualifié de « logocrate » est-il scandaleux ?
Cratyle, Héraclite, Parménide : trois philosophes que l’on retrouve dans les premières pages de Du sens. Pourquoi Renaud Camus devrait-il en être « scandalisé durablement » ?

  • dans laquelle Georges Steiner enfermait prudemment Joseph de Maistre, Martin Heidegger ou encore son ami Pierre Boutang.

Pas compris ce « prudemment ». Toute définition serait donc crainte de débordement?
Peut-être. Pourquoi pas.
Qu’est-ce que ça vient faire ici ?

  • Certes, on peut, comme j’ai tenté de le faire dans un article évoquant le superbe Rannoch Moor (note de bas de page :Voir Stalker, texte du 28 juin 2006. Ce texte a été repris sur le site de Renaud Camus intitulé Vaisseaux brûlés: http://www.renaud-camus.net/articles/stalker.html.)

Mouahhaahh.
Il faut savoir que JA terminait son commentaire du 11 mars 2007 chez D. Goux cité supra par : «[…] Camus, est infiniment mieux défendue par un texte CRITIQUE pertinent (par ex. sur Outrepas, sur Rannoch Moor, etc.) que par 10, 100, 1000 ou cent mille si vous le souhaitez sociétés des lecteurs, évidemment animées des meilleures intentions mais... comment le dire sans vous vexer, cantonnées à mes yeux à une joyeuse compagnie toute pressée de recevoir du Maître un sourire, une petite tape sur la tête. »
Mais bien sûr, Juan, mon cher Juanito, tu n’attends pas, toi, de petite tape sur la tête. (Mais sache bien que moi, au contraire de toi, je n’ai jamais, au grand jamais, envoyé un mail à RC pour lui signaler une de mes analyses, un de mes articles parus dans des revues universitaires (ou pour me plaindre de toi !! (lol (mais que tu es drôle, mon bon, que tu es amusant)). Sache que si je n’écris plus sur le forum de la SLRC, c’est aussi pour échapper à l’esprit de cour, à la tentation de la courtisanerie. Sache, mon très cher Juanito, que ce n’est pas sur mon blog que tu retiendras l’attention du Maître: il est fort probable qu’il n’en connaisse même pas l’adresse. (Ah, mon bon Juan, comment peux-tu, pourrais-tu, comprendre cela? Tu es si loin de toute fierté, ou même, de toute recherche de rigueur morale. Ah Juan, qu’il y aurait de choses à t’expliquer.)))

  • Certes, on peut […] rapprocher la démarche éminemment cratylienne de cet écrivain de race (tant pis pour les imbéciles que je choquerai en employant ce fort vilain mot),

Mon petit Juan… ** soupir**
Quand Renaud Camus a choqué avec ce mot de race, il évoquait les juifs, les Français, les Italiens, etc. Il évoquait «le génie de la race». Ne vois-tu pas la différence avec ton «écrivain de race», qui évoque la bête à concours? («Bon chien chasse de race», etc.)
Il ne suffit pas d’utiliser le mot race pour choquer, je suis désolée pour toi.
Et je suis désolée que ton but soit de choquer (que c’est ridicule), et triste pour toi que tu t’abaisses à le souligner par ta parenthèse.

  • cet écrivain de race soucieux de ne point tenir une plume pour seulement divertir ses lecteurs,

Là en revanche, c’est insultant, oui. Comment peux-tu écrire cela quand tu parles de littérature?

  • de celle d’un Boutang affirmant dans son Art poétique l’excellence de la langue française. Evidemment, de telles catégories conviennent encore moins à un auteur tel que Frédéric Rolfe, surnommé le baron Corvo, dont la carrière littéraire aussi intense que scandaleuse n’a pu trouver dans ces pages, je le regrette, sa place.

A qui la faute ? Qui n’a pas été capable de donner à chacun un nombre de signes à respecter ? Qui a remis en page tous les articles faute d’avoir pris la peine de donner des consignes précises à chacun ? (Les professionnels ne corrigent pas, mon bon Juan, ils renvoient l’article en demandant à son auteur de mettre son texte aux normes. Encore faut-il qu’il y en ait. J'ai été désolée pour toi, et stupéfaite, du travail que tu avais ainsi pris sur tes épaules: courageux, mais amateur.)

  • n’a pu trouver dans ces pages, je le regrette, sa place

exemple de syntaxe chantournée inutile.

  • Et combien d’autres qui assurément ne peuvent être parqués, à moins qu’on ne fasse fi de la subtilité de leurs œuvres et de leurs propres réserves quant à la propreté de leur cage,

Je vois bien la métaphore filée de la définition comme cage, mais son utilité m’échappe.
Et qu’est-ce que c’est que cette histoire de propreté ? Un logocrate serait sale, c’est ça?

  • dans cette catégorie paradoxale définie par Steiner, un peu trop visiblement pressé de se débarrasser de rivaux

Ah. Pourquoi ? Est-ce vrai ? Cela manque de précisions, de développement. C’est ici qu’une ou deux phrases de plus seraient utiles, plutôt que remplir la page avec de longs adverbes.

  • de rivaux qui le fascinent. Il y a donc plus disais-je, ou peut-être, puisque la marque de notre époque est de tirer irrésistiblement vers le bas les réalités les plus hautes, ou peut-être, il y a moins.

OK. Ce n’est pas ce que je préfère comme effet de style, mais pourquoi pas.

  • Car enfin, je ne suis pas certain qu’un auteur tel que Renaud Camus accepterait je le répète aussi facilement d’être portraituré de si grossière façon: le «logocrate» fait le pari d’une transcendance, d’abord celle des mots dont il se sert avec respect, ensuite, celle d’un Ailleurs

En quoi faire le pari d’une transcendance serait-il offensant ? En quoi est-ce une portraiture ? En quoi la transcendance serait-elle grossière?
On dirait que ce n'est pas la même personne qui a écrit le début de la phrase et la fin. Que fumes-tu, Juan, à quelle heure écris-tu?

  • le «logocrate» fait le pari d’une transcendance, d’abord celle des mots dont il se sert avec respect, ensuite, celle d’un Ailleurs

Cela me paraît une qualité, pourquoi faut-il considérer cela comme un défaut, se sentir insulté d'être "portraituré"? Je ne comprends pas.

  • d’abord celle des mots dont il se sert avec respect, ensuite, celle d’un Ailleurs (celui de Joseph de Maistre n’est bien sûr pas le même que Martin Heidegger, qui n’a sans doute lui-même rien à voir avec celui de l’inflexible Pierre Boutang)

OK.

  • celle d’un Ailleurs que les mots reflètent et cachent tout à la fois selon Pascal.

Bon. Un peu lourd, mais tant pis. OK.

  • Banalement, le logocrate, Steiner l’admet bien volontiers, est d’abord un écrivain de talent, parfois de génie, sa matière est le langage. Se servir des mots comme d’une pâte qu’il s’agit de faire gonfler, plus qu’une image commode, oriente notre tentative de définition de cette notion décidément floue que constituent les infréquentables vers une dimension stylistique qu’il sera peut-être plus facile de caractériser.

Donc nous passons d’une idée de transcendance à une idée de stylistique.

  • Car l’infréquentable est d’abord un écrivain dont le moins que l’on puisse dire

C’est lourd. Je barre.

  • Car l’infréquentable est d’abord un écrivain dont le moins que l’on puisse dire est qu’il [qui] a quelque style, tant pis si celui-ci est réputé provenir de droite

Eh oui, tant pis.
(Arrête d’avoir l’air content comme un galopin fier d’avoir fait une bêtise quand tu parles d'écrivains de droite: tu n’as plus l’âge, assume tes opinions. Plus personne autour de toi n'est gauchiste, ou change d'amis (si tu en as).)

  • Rappelons que ce truisme est déjà présent sous la plume d’Albert Thibaudet qui écrit, dans Les idées politiques de la France (Stock, 1932) p.32: «Les idées de droite, exclues de la politique, rejetées dans les lettres, s’y cantonnent, y militent, exercent par elles, tout de même, un contrôle, exactement comme les idées de gauche le faisaient, dans les mêmes conditions, au XVIIIe siècle, ou sous les régimes monarchiques du XIXe siècle.» (à moins que tout ce qui vient de ce camp ne soit décidément parfaitement inacceptable).

Disons que si ce qui vient de ce camp est acceptable, tes motifs de colère disparaissent. Dès lors il est impossible que tu puisses envisager qu'on puisse écrire sereinement à droite car tu tiens à pouvoir t'emporter.

  • Le cliché, certes seriné depuis des lustres, suffit toutefois à déclencher les foudres de nos petits Jupiter parisiens

Que disais-je !

  • qui préfèrent aux amples expectorations de Saint-John Perse

Fais attention, tu utilises des mots trop grands pour toi. Tu voulais dire «expirations», I presume.

  • ou aux puissants versets de Claudel la prose microcéphale de Ponge et de ses milliards de clones tout aussi minuscules :

C’est tout à fait gratuit. Quand ta fureur te laissera quelques minutes de répit, lis donc Pour un Malherbe.

  • Cioran s’extasiant sur les vertus de la phrase de Joseph de Maistre au point qu’il consacre au sulfureux auteur des Soirées de Saint-Pétersbourg l’un des plus étonnants exercices d’admiration, Georges Steiner défendant Pierre Boutang dont l’œuvre politique, métaphysique et littéraire, cela ne fait aucun doute dans l’esprit des Réelles présences, est une des toutes premières du siècle, voici deux exemples caractéristiques de que nous pourrions appeler une espèce de sidération.

Ça, c’est bien. Ce mot de sidération, ici: très bien.

  • C’est que le grand écrivain, ou plutôt l’écrivain véritable (Note de bas de page : La différence est de taille puisqu’à mes yeux un écrivain véritable peut se passer, par sa puissance visionnaire, de toute préciosité stylistique trop évidemment recherchée voire, à l’extrême limite, écrire mal. »)

Ce n’est pas que ce soit faux, mais tu veux trop en dire. Si tu devais dire tout ce que tu penses, il te faudrait bien plus de place, et bien plus de rigueur. Ici, il faut choisir. Sinon, tu embrouilles le lecteur, et tu donnes l’impression que ta pensée n’est qu’un immense cafouillage (N'est-ce qu'une impression ?)
Apprends à te faire confiance, prends ton temps, ne dis pas tout si tu n’as pas la place. «Il faut savoir faire des sacrifices».
Comment veux-tu qu’on s’y retrouve quand tu dis en quelques lignes qu’un infréquentable se caractérise d’abord par son style, pour ensuite aussitôt dire qu’il peut écrire mal, cela n’a aucune importance?
Ou alors tu appelles style la puissance de la pensée? Mais alors, dis-le, ne nous force pas à toutes ces déductions, pitié!!

  • C’est que le grand écrivain, ou plutôt l’écrivain véritable se fait de l’écriture une conception éminente,

Ah non, finalement, ce n’est pas que la puissance de la pensée, c'est malgré tout l'écriture.

  • une conception éminente, que l’on ne saurait en aucune façon réduire aux ridicules jeux de langue si chers aux tripoteurs de la déconstruction ni même aux maigres sottises oulipistes, fussent-elles enrobées d’une glue où se colleront les bavardes et insignifiantes Cixous, bourdonnant comme quelque mouche zélée autour d’une loupiote à la lueur chiche.

Mais si, mais non, je ne sais plus. Bref, l'écriture n'est pas un jeu sur le langage, c'est cela l'opinion que tu veux défendre?
Plusieurs remarques :
1/ tu connais bien mal le travail de RC. Je te recommande La Tour de Babil, de Pierssens. Sache que RC est fasciné par les fous du langage, Wolfson, Mallarmé, les anagrammes de Saussure, etc.
2/ Les mots féminins en u prennent un e sauf bru, glu, tribu. (Bled, école primaire. Mais tu es trop jeune, je sais. C’est bon pour cette fois.)
3/ Que vient faire ici cette pauvre Cixous? Tu as encore voulu trop en dire.

  • L’infréquentable, s’il sait écrire (et nous voyons que cette simple qualité suffit à faire de lui, par avance, un homme enfermé dans un in-pace où les vertueux sans style le tiennent à l’écart),

Donc finalement il n’écrit pas mal? (Décidément, je m’y perds).

  • sait aussi que ce don, cette vocation (qui est appel, vocatus, se plaisait à répéter Bernanos), il doit en rendre compte, il en est responsable. Nous revenons ainsi à notre point précédent qui pose problème

C’était bien, Juanito, cette idée de responsabilité. Mais «qui pose problème», il faut vraiment toute ton inconscience pour l’oser. Je n’en reviens pas. Ne sais-tu pas qu’il a existé des années 70, et que quelques scies sont depuis lors à éviter?
Renseigne-toi, je t’en prie, j’ai honte pour toi.

  • la question de la transcendance — pas seulement, donc, celle de la métaphysique (note de bas de page : « L’homme métaphysique est par nature réactionnaire », Dominique de Roux, Immédiatement (L’Âge d’Homme, coll. Mobiles, 1980), p.85)

Hum. Si je comprends bien, il faut reprendre ton raisonnement à l’inverse : l’infréquentable étant réactionnaire (cf. supra), il est métaphysique. Mais il est plus que métaphysique, il est appelé par une transcendance (avoue que je fais des efforts pour te suivre).

  • la question de la transcendance barre systématiquement la conception d’un langage compris […] comme trace, au milieu des hommes et favorisant leurs échanges (ou créant au contraire une dangereuse cacophonie), du Dieu enfui selon Höderlin ou éclipsé selon Buber.

Le verbe «barrer» ici… hmm.
Intéressant, mais je viens de considérablement alléger ta prose. Je redonne la version originale :

  • la question de la transcendance barre systématiquement la conception d’un langage compris non tant comme une construction d’une redoutable complexité dont quelque savant programme informatique chomskien parviendra tôt ou tard à casser le code que comme trace, au milieu des hommes et favorisant leurs échanges (ou créant au contraire une dangereuse cacophonie), du Dieu enfui selon Höderlin ou éclipsé selon Buber.

Il ne faut pas chercher à écrire compliqué pour avoir l’air intelligent. Ce n’est pas une bonne idée, crois-moi. On n’impressionne que les sots, les autres se détournent.
Transcendance et responsabilité, tu tenais quelque chose. A creuser (mais parle-ton encore des infréquentables, ne glisse-t-on pas vers la littérature? Ainsi que je l'ai écrit, il est probable que l'infréquentabilité soit tout simplement la marque de la littérature, et non d'un bord politique.)

  • Affirmer la prééminence du style, c’est-à-dire, d’une écriture travaillant sur sa propre matière spiritualisée, c’est donc poser, peut-être bizarrement, l’existence de Dieu, grammairien par excellence,

Intéressant à nouveau. Sais-tu que cela pourrait s’appliquer à Théâtre ce soir? (remarque anachronique, bien sûr).

  • à moins qu’on ne suppose la présence, étrange, parodique et, pour le dire d’emblée, parfaitement vaine à nos yeux, d’un écrivain choisissant avec une maniaquerie maladive tel vocable érudit plutôt que tel autre à seule fin de ciseler ses bibelots sonores, de tailler dans la substance la plus rare ses décadents émaux et camées qui raviront peut-être quelque futur Des Esseintes collectionneur de pierres rares.

Et voilà, tu venais de dire quelque chose d’intéressant, et tu gâches à nouveau tout.


Mon petit Juanito, tu as beaucoup de travail devant toi. Précise ta pensée et méfie des grands mots. Cette lecture m’a tant épuisée que je n’ai même plus le courage de me moquer.

Je précise cependant quelques points:
1/ Si tu cries à la victime, tant mieux, cela me fera plaisir.
2/ Si tu appelles RC à témoin, grand bien te fasse. Réfléchis cependant, tu ne vas faire que l’agacer. Si ton but, avec la pudeur qui te caractérise, est d’apparaître à tout prix dans son journal, continue.
3/ Menace d’attaques judiciaires si tu veux. Pour ma part, j’ai pris quelques mesures conservatoires. Je t’attends sereinement sur ce terrain si tu le souhaites. Les juges n’ont pas si souvent l’occasion de rire.
4/ Songe que Paris est petit et que nous nous reverrons.

Je t’embrasse, mon bon Juanito. J’espère que tu es soulagé, je t’ai enfin répondu, je me suis enfin occupée de toi. Tu vois que je ne suis pas si méchante.

Notes

[1] On m'informe le 24 juillet 2009 que ces commentaires ont disparu. Je conserve néanmoins un échange de mails à ce sujet avec JA, qui m'expliquait les dessous desdits commentaires. Bien entendu, ce mail ayant un caractère privé, je ne le publie pas. (Je remarque au passage que le billet de Slothorp ne précédait que de quelques jours ma rencontre live avec JA, ce qui explique la fraîcheur de mes impressions défavorables lors de cette rencontre.)

[2] Georges Steiner donne, comme références communes et incontournables aux auteurs qu’il qualifie de logocrates «le Cratyle, les fragments d’Héraclite et le poème de Parménide», Les Logocrates (L’Herne, 2003), p.14

[3] Voir Stalker, texte du 28 juin 2006. Ce texte a été repris sur le site de Renaud Camus intitulé Vaisseaux brûlés.

[4] Rappelons que ce truisme est déjà présent sous la plume d’Albert Thibaudet qui écrit, dans Les idées politiques de la France (Stock, 1932) p.32: «Les idées de droite, exclues de la politique, rejetées dans les lettres, s’y cantonnent, y militent, exercent par elles, tout de même, un contrôle, exactement comme les idées de gauche le faisaient, dans les mêmes conditions, au XVIIIe siècle, ou sous les régimes monarchiques du XIXe siècle.»

[5] La différence est de taille puisqu’à mes yeux un écrivain véritable peut se passer, par sa puissance visionnaire, de toute préciosité stylistique trop évidemment recherchée voire, à l’extrême limite, écrire mal.»

[6] «L’homme métaphysique est par nature réactionnaire », Dominique de Roux, Immédiatement (L’Âge d’Homme, coll. Mobiles, 1980), p.85

jeudi 11 juin 2009

Estonie : traces

Tandis que nous prenons un verre après la fin du colloque sur le kitsch, Tanel Lepsoo (professeur à l'université de Tartù en Estonie) se penche :
— Qu'est-ce que tu lis ?
Il feuillette Si par une nuit d'hiver un voyageur, à la recherche d'une page :
— Tu vois, ce nom, Vorts Viljandi, je ne sais pas où Calvino est allé chercher cela, mais c'est le nom d'une ville et d'un lac d'Estonie.
Il rit et continue :
— Tu connais Vendredi ou les limbes du Pacifique, de Tournier? A la fin, Vendredi rencontre un compagnon qui s'appelle Jaan Neljapäev. Ça veut dire Jean Jeudi, en estonien.

jeudi 30 avril 2009

Manuscrits du Moyen-Âge et manuscrits littéraires modernes

Il y a à peu près un an, j'ai découvert qu'il existait une "Société des manuscrits des assureurs français" (SMAF). Comme je devais avoir l'air vivement intéressée, on me proposa un catalogue de l'exposition des manuscrits qui s'est tenue en 2001 à la Bibliothèque nationale.

Les assureurs français présentent aujourd'hui le catalogue des collections de la "Société des manuscrits des assureurs français". C'est une première. Cette publication accompagne l'exposition de ces manuscrits - pour la seconde fois cette fois-ci après celle de 1979 - à la Bibliothèque nationale de France.

Créée en 1978 à l'initiative de Guy Verdeil alors Président du GAN et en étroite concertation avec Messieurs Georges Le Rider, Administrateur de la Bibliothèque nationale et Pierrot, Directeur des Manuscrits de cette même institution, la SMAF rassemble dans son capital une grande partie des sociétés et mutuelles d'assurance de la place. Elle constitue un prototype intéressant de coopération Etat-industrie au service d'une politique nationale de gestion et de défense du patrimoine national des manuscrits anciens et modernes.

Notre souci est aujourd'hui de faire connaître le fonds de la SMAF aux assureurs, à leurs clients, aux bibliophiles et au grand public, et de leur faire prendre conscience du type de contribution que la profession des assureurs a apporté et est susceptible encore d'apporter à la conservation et à la recherche sur le patrimoine littéraire national, au service de la politique que souhaitent mener la Bibliothèque nationale et la Direction des Manuscrits.

Extrait repris en quatrième de couverture de l'introduction de Jean-Jacques Bonnaud, Président de la SMAF.

Je m'attendais à une brochure souple d'une centaine de pages, c'est en fait un livre magnifique de 350 pages emplies de photographies d'enluminure et de pages de cahiers, décrivant l'histoire de chaque manuscrit médiéval présenté et offrant des extraits des manuscrits modernes (un important fond Céline, Colette, Claudel, etc).

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A titre d'exemple, la SMAF possède les lettres inédites de Gide à Francis Jammes :
139 LETTRES, BILLETS ET CARTES AUTOGRAPHES SIGNÉES. Les lettres sont montées sur des feuillets de papier crème montés sur onglets en 3 volumes in-4 (230 x 180 mm) demi-maroquin bleu turquoise avec coins, étuis (Devauchelle).

TRÈS IMPORTANTE CORRESPONDANCE INÉDITE qui dresse un passionnant tableau de la vie littéraire au tournant du siècle.
Elle retrace l'amitié de toute une vie entre les deux écrivains, quelque divergents que soient leur esprit et leurs idées. Leurs œuvres littéraires respectives tiennent une grande place dans leurs propos.
Cette correspondance commence en 1895 et durera en dépit de quelques brouilles jusqu'à la mort de Jammes en 1938. Gide et Jammes, tous deux âgés de vingt-cinq ans, devinrent amis en 1893 mais ne se rencontreront pour la première fois qu'en avril 1896 à Alger ; ils ne s'étaient vus auparavant qu'en photographies mais se tutoyaient déjà. Leur longue amitié subira des périodes de troubles et des ruptures, notamment vers 1916 lorsque Jammes eut connaissance des mœurs scandaleuses de Gide, qui heurtaient profondément ses convictions chrétiennes, et en 1925 lorsque Gide vendit à Drouot sa bibliothèque, y compris des manuscrits de Jammes que celui-ci lui avait dédicacés (la partie Jammes comprend 33 numéros : éditions originales dédicacées, grands papiers, quelques lettres et manuscrits). Notons ici que Jammes ne fut pas le seul à être choqué et l'on cite volontiers l'anecdote de Régnier envoyant un ouvrage à Gide avec cette dédicace : ''Pour votre prochaine vente''.
La dernière lettre datée est écrite à la suite d'une lettre de condoléances de Mathilde Roberty du 9 juillet 1938 (Madeleine est morte le 17 avril 1938).

Une correspondance de 280 lettres échangées par Gide et Jammes fut publiée par Robert Mallet, chez Gallimard en 1948. Aucune des lettres ici présentes n'y figurant, nous sommes donc en présence de lettres restées inconnues de Robert Mallet ou qu'il avait écartées pour des raisons de discrétion, d'opportunité ou de contrainte éditoriale. Robert Mallet n'avait pas eu connaissance d'une lettre de Gide à madame Victor Jammes (8 avril 1900) et n'en avait pu citer qu'un extrait recopié par Mme Jammes (elle se trouve ici sous le numéro 67).
Entre juillet 1895 et l'automne 1897, de nombreuses lettres sont écrites sur papier de deuil encadré de noir (Gide a perdu sa mère le 31 mai 1895). Il n'est cependant pas fait mention de ce décès dans les lettres ; dans l'une d'elle Gide évoque en revanche le récent mariage de sa sœur.

Cher Monsieur, qui dorénavant m'appellerez cher ami tel est le début de cette correspondance qui allait durer un quart de siècle et dans laquelle les travaux littéraires des deux écrivains tiennent une grande place. Au fur et à mesure de leur relation, les termes par les quels Gide s'adresse à son ami évoluent: Cher monsieur (une seule fois au début - puis cher ami (assez souvent) puis cher vieux, cher faune, mon faune préféré, très cher et grand, etc…

extrait du catalogue p.235 et 236

Exemple de lettre de Gide à Jammes.

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Liste des acquisitions des manuscrits modernes :

Law. Lettres au prince deTingry. Hôtel Drouot, 21 juin 1979.
Voltaire. Lettre à M. Delille. Hôtel Drouot, 7 mai 1981.
Voltaire. Lettre à d'Alembert. Hôtel Drouot, 6 mai 1981.
Voltaire. Lettre à sa nièce. Hôtel Drouot, 6 mai 1981.
Restif de la Bretonne. L'Enclos et les oiseaux. Librairie Valette, 20 août 1981.
Napoléon. Expédition d'Egypte. Hôtel Drouot, 13 décembre 1982.
Bernadotte. Lettres militaires. Hôtel Drouot, 8 décembre 1980.
Dietrichstein. Lettres au comte de Niepperg. Hôtel Drouot, 28 février 1979.
Musset. Lettre à madame Joubert. Hôtel Drouot, 9 novembre 1979.
Sand. Lettre à Louis Blanc. Hôtel Drouot, 6 avril 1981.
Flaubert. Littérature-Esthétique. Hôtel Drouot, 12 décembre 1985.
Apollinaire. Les Peintres cubistes. Librairie Jean Hugues, bibliothèque Renaud Gillet, 5 novembre 1981.
Apollinaire. La Femme assise. Hôtel Drouot, bibliothèque Jacques Guérin,4 juin 1986.
Aragon.Traité du style. Librairie Jean Hugues, bibliothèque Renaud Gillet, 5 novembre 1981.
Aragon. L'Entrée des succubes. Librairie de l'Abbaye, 4 décembre 1980.
Breton. Les Vases communicants. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 23-24 mars 1981.
Breton. Autobiographie. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 23-24 mars 1981.
Camus. L'Etat de siège. Hôtel Drouot, 28-29 février 1979.
Céline. Guignol's band. Hôtel Drouot, 28 février 1979 et 28 juin 1985.
Céline. Guignol's band II, Le Pont de Londres. Hôtel Drouot, 9 juin 1980.
Céline. Féerie pour une autre fois II, Normance. Hôtel Drouot, 19 juin 1984.
Céline. Guignol's band II et Féerie pour une autre fois. Madame Destouches, 6 décembre 1985.
Céline. D'un château l'autre. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 13-15 juin 1983.
Claudel. Œuvres et correspondances dont l'Echange, Connaissance de l'Est, L'Homme et son désir, famille Claudel, janvier 1980.
Cocteau. Le Cap de Bonne-Espérance. Hôtel Drouot, 12 juin 1987.
Cocteau. Opium. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 13-15 juin 1983.
Colette. Lettres à Germaine Patat. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 13-15 juin 1983.
Colette. Lettres à Maurice Goudeket. Madame Goudeket, 8 mai 1981.
Eluard. L'Amour la poésie. Libraire Jean Hugues, bibliothèque Renaud Gillet, 5 novembre 1980.
Gide. Lettres à Francis Jammes. Hôtel Drouot, 24 novembre 1981.
Giono. Correspondance avec Simone Tery. Hôtel Drouot, 9 juin 1980.
Jacob. Le Cornet à dés. Librairie Jean Hugues, bibliothèque Renaud Gillet, 5 novembre 1980.
Jacob. Cahier de méditations. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 23-24 mars 1981.
Jarry. Messaline. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 13-15 juin 1983.
Maeterlinck. Lettres à Florence Perkins. Londres, Sotheby's, 23 mars 1981.
Montherlant. Lettres à Jeanne Sandelion. Hôtel Drouot, 12 décembre 1985.
Montherlant. Lettres à Alice Poirier. Hôtel Drouot, 12 juin 1984.
Montherlant. Don Juan. Hôtel Drouot, 12 juin 1984.
Pagnol. Cinématurgie. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 13-15 juin 1983.
Péguy. Les Récentes œuvres de Zola. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 13-15 juin 1983.
Pieyre de Mandiargues. Cartolines. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 23-24 mars 1981.
Prévert. Souvenirs de famille. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 23-24 mars 1981.
Renard. Lettres à Maurice Pottecher. Hôtel Drouot, 12 juin 1984.
Rolland. Lettres à Frans Masereel. Hôtel Drouot, 12 juin 1984.
Saint-Exupéry. Lettres à Consuelo. Hôtel Drouot, 6 juillet 1984.
Sartre. La Putain respectueuse. Librairie de l'Abbaye, 29 avril 1981.
Sartre. Notes pour la morale. Hôtel Drouot, 7 mai 1981.
Sartre. Notes autobiographiques et sur le théâtre. Hôtel Drouot, 7 mai 1981.
Sartre. La Mort dans l'âme. Hôtel Drouot, 12 juin 1984.
Sartre. Les Mots. Hôtel Drouot, 7 mai 1981.
Surréalisme. Au grand jour. Hôtel Drouot, bibliothèque Sickles, 23-24 mars 1981.

jeudi 12 février 2009

Les archives de Guy Debord ne quitteront pas la France (pour le moment)

JO du jour

Avis no 2009-01 de la Commission consultative des trésors nationaux
NOR : MCCF0902409V
Saisie par la ministre de la culture et de la communication en application de l’article 7 du décret no 93-124 du 29 janvier 1993 modifié relatif aux biens culturels soumis à certaines restrictions de circulation,
Vu le code du patrimoine, notamment ses articles L. 111-2 et L. 111-4 ;
Vu le décret no 93-124 du 29 janvier 1993 modifié relatif aux biens culturels soumis à certaines restrictions de circulation, notamment son article 7 ;
Vu la demande de certificat d’exportation déposée le 30 septembre 2008 relative aux archives personnelles (ensemble de manuscrits et de documents divers) de Guy Debord, vers 1950-1994 ;

La commission régulièrement convoquée et constituée, réunie le 21 janvier 2009 ;

Après en avoir délibéré,
Considérant que les biens pour lesquels le certificat d’exportation est demandé sont un ensemble exceptionnel d’archives personnelles de Guy Debord (1931-1994), essayiste et réalisateur français, principalement connu pour avoir été le fondateur de l’Internationale situationniste, mouvement de pensée avantgardiste dans le sillon des courants dadaïste, surréaliste et lettriste ; que cet ensemble est composé de manuscrits et de documents divers, triés et organisés par Guy Debord, qui n’a conservé que les pièces considérées par lui comme essentielles pour la compréhension de son œuvre ; que les dossiers constitués contiennent l’ensemble des états préparatoires puis définitifs de ses oeuvres, des premiers jets sur fiches jusqu’aux épreuves corrigées, en ce qui concerne les ouvrages, et au découpage, en ce qui concerne les films, notamment pour son ouvrage majeur, La Société du spectacle (1967) ; que ces archives, couvrant les années 1950 à 1994, sont demeurées encore largement inexploitées et représentent un matériel précieux pour la recherche ; que ces documents, qui illustrent le processus créatif complet de la pensée de l’auteur, permettent d’appréhender sa façon assidue de travailler, sa grande érudition et son style, héritier des plus grands classiques, mis au service de son analyse critique de la société moderne ; qu’il faut souligner la rareté d’un tel fonds intégral, resté dans un parfait état de conservation, dans la mesure où il n’en existe aucun dans les collections publiques françaises recouvrant si largement un même courant de pensée ; que cet ensemble s’avère unique pour l’étude de la genèse de l’oeuvre de Guy Debord, l’un des penseurs contemporains les plus importants, et capital dans l’histoire des idées de la seconde moitié du XXe siècle ;
Qu’en conséquence cet ensemble d’oeuvres présente un intérêt majeur pour le patrimoine national du point de vue de l’histoire et de l’art et doit être considéré comme un trésor national ;
Emet un avis favorable au refus de certificat d’exportation demandé.

Pour la commission :
Le président,
E. HONORAT

samedi 10 janvier 2009

Catcheur poilu



Jim Londos & Herbert Hoover par Miguel Covarrubias (grâce à Gunther).

(Je me souviens de discussion à l'hôtel du Bastard, Didier et Denis faisant l'anthologie des tableaux du XVIIe et XVIIIe siècle comportant des poils masculins... Nous en étions à l'armagnac (région oblige) et c'était très amusant.)

mardi 23 décembre 2008

Jean-Pierre Bobillot: le film

Suite au cours de ce mardi, Jean-Pierre Bobillot est passé en studio enregistrer quelques minutes de poésie sonore:

mercredi 17 décembre 2008

Des éditions difficiles à trouver

Mon habituel blog à Paris signale que cinquante éditeurs seront présents à la Halle Saint-Pierre du du 10 décembre 2008 au 5 janvier 2009.

Les éditions L’Œil d’or et les éditions Passage Piétons invitent cinquante éditeurs :



À Rebours ; Anacharsis ; Art&fiction ; La Barque ; La Belle Gabrielle ; Bleu autour, Cause des livres ; Circa 1924 ; Chasse au Snark ; Cochon pendu ; Colophon ; Compagnie Créative ; Cochon pendu ; Cosa nostra ; Des Cendres ; La Diseuse ; Diantre !; Fondeur de briques ; L’Échappée ; L’Épure ; L’Escampette ; Frédéric ; Ginko ; Grandir ; Grèges ; Harpo & ; Image Son & Compagnie ; In 8 ; Isabelle Sauvage ; Lettr’ange ; Lirabelle ; L’Idée bleue ; Mare Nosrtum ; Michel Houdiart ; Monsieur Toussaint l’Ouverture ; Nuit Myrtide ; Organic ; Pegg ; Plonk et replonk ; Poursuite ; Recoins ; Ritagada ; Rougerie ; Le Passager Clandestin ; Le Sonneur ; Solo ma non troppo ; Trouvères & compagnies ; Vedrulla ; Yvette & Paulette ; Zédélé ; Zinc ; Zoom

lundi 8 décembre 2008

Lecture suivie de L'Amour l'Automne

N'ayant atteint que la page 17 au bout de deux heures, nous remettons ça mardi 16 décembre 2008 à 20 heures, toujours chez Rémi Pellet.

Si vous êtes intéressé, contactez-moi par mail: je vous enverrai les notes concernant la première séance, l'adresse précise de Rémi et le code de l'entrée. (Rémi offre de quoi grignotter en début de séance, je lui ai proposé de passer cette fois-ci au saucisson et camembert (pour que ce soit plus simple à préparer) mais je ne suis pas sûre qu'il osera (les camusiens l'impressionnent).)

dimanche 16 novembre 2008

Critique express

Nous sommes debout dans le métro 14, pas trop tassés. Ma voisine ouvre un Gallimard collection blanche, La meilleure part des hommes, de Tristan Garcia. Le titre à lui seul me fatigue déjà, avec son accroche marketing soigneusement calculée.

Elle en est au début, cinq millimètres de pages lues, à peu près. Machinalement, je lis quelques lignes par-dessus son épaule.
Je suis atterrée. Diminutifs ridicules utilisés à toutes les phrases (comme si l'auteur ne connaissait pas les pronoms personnels), situations du niveau des romans contenus dans les cahiers centraux de Femmes d'aujourd'hui et Bonne soirée que lisaient mes tantes vieilles filles en 1977 — modernisées grâce au sida…
C'est ça la collection blanche?

samedi 15 novembre 2008

Ça c'est un slogan

Sur le sac plastique donné par la librairie allemande à côté de Beaubourg s'affiche en gros caractères la phrase:

« Lesen gefährdet die Dummheit».


soit à peu près : Lire menace la bêtise.

vendredi 24 octobre 2008

Le poil, c'est la santé

Le mouvement, né en Australie il y a cinq ans et qui a essaimé dans plusieurs pays anglo-saxons et en Espagne, semble relever de la plaisanterie. Il s'appelle Movember. M comme Men et comme Move, bouger, agir ; et la suite comme dans November, car c'est en novembre que cela se passe.
Au début du mois prochain, donc, les participants vont se raser de près puis, jour après jour, se laisser pousser la moustache la plus voyante possible. Une revendication de leur action, bien sérieuse, qui consiste à recueillir des fonds en faveur de la santé masculine, et plus particulièrement de la lutte contre le cancer de la prostate et la dépression.
Les hommes, selon les promoteurs de Movember, n'ont pas conscience des problèmes de santé qui les menacent ; le vrai mâle est considéré comme un dur, qui ne va pas voir le médecin pour de petits bobos ni ne se soumet à des examens réguliers. C'est cette image que les 200 000 « Mo Bros » veulent changer. Et, à ce jour, ils ont recueilli 30 millions de dollars, qui vont à des recherches et à des programmes de prévention.

extrait de l'éditorial de Renée Carton dans Le Quotidien du médecin du 20 octobre 2008

jeudi 9 octobre 2008

Proust et Mantegna

L'exposition est l'occasion d'observer le tableau Saint Christophe décapité (accroché habituellement au musée Jacquemart André), de s'approcher pour vérifier qu'un personnage de la galerie a bien un œil percé par une flèche et de se souvenir de l'analyse époustouflante de Sophie Duval.

mercredi 8 octobre 2008

Atelier de lecture : L'Amour l'Automne

La question de Bashô dans les commentaires du billet précédent m'amène à vous proposer quelque chose : y aurait-il parmi les lecteurs de ce blog quelques personnes intéressées à une lecture/explication live de L'Amour l'Automne?

Il suffirait que nous soyons cinq ou six (ou plus, bien sûr), que nous trouvions un lieu (je m'en charge, j'ai déjà une idée (un lieu en plein centre de Paris avec bibliothèque camusienne incorporée), une date et une heure. Chacun amènerait son livre L'Amour l'Automne et on commencerait une lecture suivie. Je fournirais les quelques pistes que j'ai pu trouver et mes angles de lecture, vous fourniriez les vôtres, et nous essaierions de dédramatiser la lecture de ce genre de texte qui semble en traumatiser certains.

Y a-t-il des personnes intéressées dans la salle? Bien entendu, si un provincial devait se manifester, ses souhaits en terme de date et d'horaire seraient prioritaires (répondre directement dans les commentaires ou par mail).

mardi 26 août 2008

Bibiographie extensive recueillie à Cerisy

Dans l'ordre d'apparition dans mes notes, reclassés par catégorie.
Cette bibliographie est à la fois moins que complète et plus que complète : quand mes notes étaient floues (titre, auteur), j'ai essayé de préciser les références par des recherches sur internet, si je n'ai rien trouvé, je n'ai pas repris l'article ou l'ouvrage que j'avais noté sur mon cahier; à l'inverse, certains titres proviennent de discussion hors communication.
Il manque les catalogues d'exposition et les livres d'art laissés à notre disposition par Bernardo Schiavetta pour feuilletage. J'ai manqué d'à-propos.


Théorie

- Jean-Louis Shefer, Scénographie d'un tableau.
- Jean Petitot, "Saint-Georges : Remarques sur l'Espace Pictural" in Sémiotique de l'Espace.
- Aristote, Métaphysique.
- Luigi Pareyson, Esthétique. Théorie de la formativité (sans doute le livre le plus important de la communication de Jacinto Lageira).
- Gilbert Simondon, L'individuation à la lumière des notions de forme et d'information.
- Georges Didi-Huberman, La Ressemblance informe, ou Le gai savoir visuel selon Georges Bataille (L'informe selon Georges Bataille sera toujours cité comme n'étant pas ce dont on parle ici.)
- Paul Valéry, «Degas Danse Dessin».
- Saint Augustin, Les Confessions.
- Georges Bataille, «Dictionnaire critique», article «informe» in Documents.
- Atlas de littérature potentielle.
- La littérature potentielle.
- Marcel Bénabou, «La Règle et la contrainte» in Pratiques.
- Jacques Roubaud, «L'Auteur oulipien» in L'Auteur et le manuscrit.
- Friedrich Schlegel, cité dans L'Absolu littéraire. Théorie de la littérature du romantisme allemand.
- Georges Perec, «A propos de la description», dans Espace et représentation. Actes du colloque d'Albi.
- Roland Eluerd, La pragmatique linguistique.
- Erwin Panofsky, La perspective comme forme symbolique et autres essais.
- Gilles Philippe et coll., Flaubert savait-il écrire ? : une querelle grammaticale (1919-1921) (trouvé dans une liste en fin d'un volume de la même collection).
- Roland Barthes, " Littérature et discontinu " in Essais critiques.
- Jean Clair, Sur Marcel Duchamp et la fin de l'art.
- Leonardo Sciascia, Actes relatifs à la mort de Raymond Roussel.
- Marthe Robert, Roman des origines et origines du roman.
- Roland Barthes, La chambre claire.
- Jean-Claude Pinson, Habiter en poète.
- Jean Baudrillard, L'autre par lui-même (un article sur l'anagramme? A vérifier).
- Benjamin S. Johnson, "Asimetrias. Una entrevista con César Aira".
- "La nouvelle écriture" - à propos de César Aira.
- Georges Bataille, Œuvres complètes I.
- Mariano Garcia, ''Degeneraciones textuales: Los generos en la obra de César Aira.
- Laurent Jenny, "L'automatisme comme mythe rhétorique." in Une pelle au vent dans les sables du rêve.
- Ruth Lorand, Aesthetic Order.
- Jean-François Lyotard, L'inhumain, causerie sur le temps.
- Jean-Claude Milner et François Regnault, Dire le vers.
- Jean-Pierre Bobillot, Trois essais sur la poésie littérale.
- Philippe Forest, Histoire de Tel Quel.
- Giorgio Agamben, Qu'est-ce qu'un dispositif ?.
- Gérard Genette, Esthétique et poétique.
- Paul Guillaume, La psychologie de la forme.
- Hervé Le Tellier, Esthétique de l'Oulipo.
- Georges Poulet, Les Métamorphoses du cercle.
- Robert Greer Cohn, L’Œuvre de Mallarmé : Un Coup de dés, traduit par René Arnaud, Les Lettres, 1951.
- Jean-Nicolas Illouz, L'offrande lyrique ou L'éloge lyrique.
- Isidore Isou, Introduction à une nouvelle poésie et à une nouvelle musique.
- Isidore Isou, Traité de bave et d'éternité.
- Paul de Man, The Epistemology of Metaphor, in Critical Inquiry, Vol. 5, No. 1, Special Issue on Metaphor (Autumn, 1978), published by The University of Chicago Press.
- Francis Ponge, Pour un Malherbe.
- Gaston Bachelard, L'air et les songes.
- Jacques Bouveresse, Prodiges et vertiges de l'analogie.
- Miguel de Unanumo, Vie de Don Quichotte et de Sancho Pança.
- Aristote, Mimésis


Prose

- Georges Perec, Je suis né.
- Georges Perec, W ou le souvenir d'enfance.
- Jacques Roubaud, Le Grand Incendie de Londres. Récit, avec incises et bifurcations.
- Paul Fournel, Besoin de vélo.
- Paul Fournel, Les Athlètes dans leur tête.
- Edouard Levé, Suicide.
- Jacques Jouet, La République de Mek-Ouyes.
- Honoré de Balzac, Eugénie Grandet.
- Jean-Paul Sartre, La Nausée.
- Virginia Woolf, The Waves.
- Georges Perec, Un homme qui dort.
- Peter Handke, L'angoisse du gardien de but au moment du penalty.
- Renaud Camus, Rannoch Moor.
- Renaud Camus, Les Demeures de l'esprit.
- Maurice Roche, Je ne vais pas bien, mais il faut que j'y aille.
- Maurice Roche, Compact (en couleur aux éditions Tristram).
- William Faulkner, The sound and the Fury.
- Robert Musil, L'homme sans qualité.
- Michel Butor, Mobile.
- Harry Mathews, Conversions (conseillé par Christophe Reig, si on ne doit lire qu'un seul Harry Mathews).
- César Aira, Le Manège (conseillé par Chris Andrews, si on ne doit lire qu'un seul César Aira).
- César Aira, Les nuit de Flores.
- François Dufrêne, Le Tombeau de Pierre Larousse.
- Georges Perec, La Vie mode d'emploi.
- Marcel Bénabou, Un aphorisme peut en cacher un autre, BO n° 13, 1980.
- Jacques Jouet, Anet et l'Etna.
- Julien Gracq, La forme d'une ville.
- Jacques Jouet, Navet, linge, Oeil-de-vieux.
- Jacques Jouet, Trois pontes.
- Italo Calvino, Le Baron perché.
- Jacques Jouet, L'amour comme on l'apprend à l'école hôtelière.
- Jean-Marie Gleize, Film à venir.
- Jean-Marie Gleize, Léman.
- Jean-Marie Gleize, Les chiens noirs de la prose.
- Edouard Levé, Autoportrait.
- Miguel de Cervantes, Don Quichotte de la Manche.
- Martianus Capella, Les noces de Philologie et de Mercure.
- Aulu-Gelle, Les Nuits attiques.
- Robert Coover, Noir.
- Antoine Volodine.
- Leonardo Padura Fuente (polars à La Havane. intercours).
- Jean-Bernard Pouy, Le jour de l'urubu (intercours. Roland Brasseur m'a donné trente-six raisons d'assassiner son prochain).
- Peter Carey, La véritable histoire du gang Kelly (intercours. J'ai demandé à Chris Andrews de me conseiller un auteur australien).


Poésie

- Georges Perec, Quinze variations discrètes sur un poèmes connus (variations sur "Gaspard Hauser chante", de Verlaine).
- Jacques Jouet, Poèmes de métro.
- Jacques Jouet, Poèmes du jour.
- Timothy Steele, The Color Wheel.
- Rebel Angels: 25 Poets of the new formalism.
- Ron Silliman, Albany Blue Carbon.
- Jackson Mac Low, Thing of Beauty: New and Selected Works.
- Christian Bök, Eunoia.
- "Language" Poetries: An anthology, dir. Douglas Messerli.
- Michelle Grangaud, Gestes.
- Michelle Grangaud, Memento-fragments.
- Michelle Grangaud, Stations.
- Michelle Grangaud, Jacques Jouet, Jacques Roubaud, La Bibliothèque de Poitiers.
- Georges Perec, Les Ulcérations.
- Raymond Roussel, Nouvelles impressions d'Afrique (postface de Jacques Sivan aux éditions Al Dante. édition en couleur selon le vœu de Raymond Roussel. «Il ne faut pas couper les pages» assène Hermès Salceda sans que rien n'étaie ses dires. (Je l'ai interrogé sur ce point: il persiste)).
- Dominique Fourcade, Xbo.
- Ian Monk, Plouktown.
- Ivan Ch'Vavar, Höderlin au Mirador.
- Ivan Ch'Vavar, Post-poèmes.
- Jacques Jouet, Fins.
- Dante, Le Paradis.
- Bob Perelman, The Future of Memory d'après le film The Mandchurian candidate.
- Charles Bernstein, Girly Man.
- Charles Bernstein, Islets/Irritations.


Livres d'art et de photos

malheureusement très incomplet
- L'informe, mode d'emploi. Catalogue de l'exposition au centre Pompidou.
- Donald Kuspit, California New Old Masters.
- Denis Roche, Forestière amazonide.
- Denis Roche, Ellipse et laps.
- Denis Roche, Photolalies.
- Thibault Cuisset, La Rue de Paris.
- François Maspero, Les Passagers du Roissy-Express.
- Sophie Calle, Suite vénitienne.
- Edouard Levé, Amérique.
- Edouard Levé, Reconstitutions.
- Edouard Levé, Angoisse.
- Edouard Levé, Fictions.

samedi 23 août 2008

La mort de Tony Duvert

Jeudi. Le journal traîne sur la table du petit déjeuner. La première page m'apprend la mort de Tony Duvert.

Tony Duvert a été retrouvé mort à son domicile de Thoré-la-Rochette. Le mercredi 20 août au matin, un voisin remarque que la boîte aux lettres déborde. Dans ce village de 880 habitants, presque personne ne connaît Tony Duvert, mais il est réputé solitaire.
Sédentaire, son absence surprend son voisin. Il prévient le maire, qui alerte immédiatement la gendarmerie de Vendôme. Arrivés sur place, les gendarmes n'ont pas de réponse et font appel aux pompiers pour forcer une fenêtre et entrer dans le domicile. Ils y trouvent le corps de Tony Duvert, décédé (selon eux) depuis au moins un mois. [...]

La Nouvelle République, 21 août 2008

mardi 5 août 2008

Carte postale, toujours

Pour tous ceux qui arrivent ici en demandant "comment écrire une carte postale", un bonus.

mardi 29 juillet 2008

Pataphysique

J'avais repéré ici (via Planes) l'existence de Carnets trimestriels du Collège de Pataphysique consacrés au poil (l'autre collection, à côté de celle de virgules), sans réussir à trouver d'adresse pour se les procurer.

Grâce à Elisabeth, c'est chose faite:
Collège de pataphysique
51A, rue du Volga
75020 Paris

lundi 28 juillet 2008

Hétéronyme

J'ai profité de Cerisy pour me faire préciser la différence entre pseudonyme et hétéronyme.

Un pseudonyme permet de cacher une identité. Exemple : Emile Ajar
Un hétéronyme permet de multiplier les identités. Exemple: Pessoa


Mais après tout, cela fait peut-être partie de ces choses que tout le monde sait sauf moi.

lundi 21 juillet 2008

Citations glanées hors cadre durant ces quelques jours

(Ce ne sont que des citations à peu près, pour le plaisir).

— «De l'ordre même dans les orgies!», comme disait Madame de Saint-Ange dans La Philosophie dans le boudoir. (Bernardo Schiavetta1 tentant de rétablir le calme avant une communication).

— «Elle est bonne!» (C'est du Queneau) (précision d'Alain Chevrier reposant son verre d'eau au cours de sa communication sur Ivar Ch'Vavar et Ian Monk).

— Dans L'école des sirènes, la maîtresse dit aux jeunes filles: «Pour se tenir droite, il suffit de savoir trois choses: je suis belle, j'ai un secret, je suis aimée». (encore Bernardo, au début de sa communication le dernier jour, tandis qu'il avait demandé à une belle jeune femme blonde de se tenir dos à dos avec lui en mimant des gestes précieux de la main).



Note
1 : auteur de cette folie que j'ai dû repérer en 2004 et qui a joué son rôle dans ma décision d'assister à ce colloque malgré les problèmes d'organisation que cela posait.

samedi 19 juillet 2008

Ma coloc

L'inconvénient de ce genre de colloque, c'est qu'on contemple son blog en se demandant à quoi bon. On hésite à fermer la porte doucement pour ne réveiller personne et prendre (enfin) un livre pour enfin lire d'un peu près.

Bon.

Je partageais ma chambre avec Elisabeth, metteur en page de la revue Formules. A partir de son blog, vous trouverez ses poèmes (elle a tout de même réussi à se faire mettre à la porte (à sa grande joie) en écrivant des "sonnets de bureau" (par exemple) (la contrainte est d'écrire les quatrains le matin, les tercets l'après-midi (nous avons eu droit à une lecture éblouissante, en fait, la poésie nécessite des techniques théâtrales) (c'est une contrainte temporelle, est-ce une contrainte oulipienne?)))

lundi 7 juillet 2008

La littérature via Netvibes : concentré de liens

Je sais que certains ne sont pas pressés de s'intéresser aux fils RSS… Heureusement il n'est pas nécessaire de s'y intéresser pour s'en servir: voilà quelques liens vers des pages publiques de Netvibes:


Evidemment, d'une page à l'autre il y a des recoupements : si ça vous agace, il ne vous reste qu'à créer votre propre page publique… et à en indiquer l'adresse en commentaires.
(Gvgvsse, Zvezdo et d'autres n'auraient pas un équivalent musical à nous conseiller ?)


ajout : et puis ça qui est un agrégateur littéraire hors Netvibes (et qui recoupe forcément les trois autres).

vendredi 13 juin 2008

Impératif

Que personne ne soit vu sans un livre à la main.

Herbert, successeur de Guillaume de Champeaux (si j'en crois mon voisin, car j'ai mal entendu).

mardi 10 juin 2008

Quelques explications

Je recentre ce blog sur les livres et sur Renaud Camus; j'effectue une sorte de retour aux origines puisque tout cela a commencé quand j'ai claqué la porte (du forum) de la SLRC.

Historiquement, ce blog a vu le jour le 26 mai 2006. Je recopie ici à mes heures perdues certains billets de la SLRC, car je suis obsédée par la conscience de l'éphémère internautique. Les premiers billets du blog sont donc datés d'août 2002, traces de mes premières interventions sur internet.
La catégorie "SLRC, anté-blog" disparaîtra au cours des prochains mois, au fur à mesure de la création de nouvelles catégories qui me permettront de circuler plus rapidement entre les œuvres du Maître [1]. Je songe également à un index "bricolé" à partir de la structure ordinaire de ce blog (car je ne vais pas me lancer dans l'informatique: j'utilise ce que j'ai à disposition).
En un mot, je transforme ce blog en ce qu'il n'aurait jamais dû cesser d'être: un outil à ma main.

Enfin, son adresse changera prochainement pour devenir vehesse.org.

A suivre.
(Bashô et Patrick, deux commentateurs occasionnels, pourraient-ils me laisser un commentaire avec une adresse mail?)


Notes

[1] Non, ce mot n'est pas à entendre au premier degré (ainsi que le croient certains!)

mercredi 9 avril 2008

Distractions

Devant l'étagère des bibliothèques vertes où A. vient de prendre un Langelot (elle cherche celui qui raconte l'arrestation de Monsieur T, mais je ne suis pas sûre que Monsieur T ait jamais été arrêté), j'ouvre machinalement Les cinq sous de Lavarède:
— Réfléchissez, Monsieur Lavarède !
— C'est tout réfléchi. Jamais, jamais !
J'emporte Les cinq sous de Lavarède, à lire entre les pages de Mrs Dalloway que je lis entre deux endormissements dans le RER et celles de La Maison à vapeur que je lis quand je pense à les imprimer et que je ne les oublie pas sur les étalages des boutiques de souvenirs à touristes.

Normalement, c'est le cours d'Antoine Compagnon que je devrais être en train de transcrire.

mercredi 19 mars 2008

Six

Comme je suis prétentieuse, je n'avais pas l'intention de répondre à la chaîne qui court actuellement, sur "six choses que vous ne savez pas", ou "auriez voulu savoir", ou "auriez préféré ignorer", puisque je n'avais pas été interpelée personnellement.
Mais finalement, c'est trop tentant, selon la très pertinente analyse d'affordance. Je vais donc prétendre répondre à l'invitation d'un bourgeois, en inventant une contrainte de plus (pour que cela soit plus facile): je réponds autour de six "premières fois" de livres:

1/ Le premier livre que j'ai lu était une histoire de princesse et de grenouille (ou crapaud, plus vraisemblablement). J'avais cinq ans, je lisais parfaitement puisque j'avais déjà une année de CP derrière moi, et l'institutrice de cet autre CP nous lisait chaque jour un chapitre d'une histoire de prince transformé en crapaud. Je voulais connaître la fin, prenant mon courage à deux mains, je lui avais demandé le livre qu'elle m'avait prêté pour un week-end.
Aujourd'hui, je suis émerveillée d'avoir commencé en littérature avec l'archétype des contes de fée.

2/ J'ai commencé à lire des SAS en quatrième, parce que ma mère avait déclaré devant moi à des amis à elle, faisant à son habitude comme si je n'existais pas et ne pouvais l'entendre: «J'espère bien qu'elle ne lit pas de SAS!»
Le mardi soir, pendant que mes parents allaient suivre d'illusoires cours de bridge, je dénichais quelques SAS cachés tout en haut du placard du bureau. La semaine suivante je les y replaçais. Le filon s'est vite épuisé.

3/ Je ne sais plus quel livre j'ai lu pour la première fois en anglais. The Mill on the Floss semble le plus probable: une professeur s'était entichée de moi en seconde; quand je lui avais demandé de me prêter un Dos Passos (42e parallèle, de mémoire), elle avait jugé cela inconvenant, et m'avait prêté un George Eliot (que j'avais lu je ne sais comment, vu mon niveau de l'époque), et plus tard offert The House of the Seven Gables relié en rouge (je n'ai pas dépassé la page 60). Après mon bac, j'ai lu The Turn of the Screw. Bizarrement, je ne considère aucun de ces livres comme mon premier livre en anglais. Mon premier livre en anglais, c'est The illustrated man ou The Great Gatsby. Je ne sais plus lequel des deux j'ai lu d'abord — j'ai prêté et perdu le premier, le second n'était pas à moi.

4/ La même imprécision entoure ma première "vraie" BD (ie, ni Goscinny, ni Hergé): La Ballade de la mer salée, rue Monsieur le Prince à Paris, ou les Passagers du vent, à Blois, pendant un été de stage chez Poulain (le chocolat)? La chronologie veut que ce soit Corto Maltese, mais les souvenirs se disputent la primauté.

5/ Le premier livre de philosophie que j'ai lu est Temps et récit I, de Ricœur, en 1985. Quand je l'ai relu, en 1991, il m'a paru beaucoup plus facile.

6/ La première nouvelle de Borgès que j'ai lue était incluse dans la préface de L'Ange de l'histoire, de Stéphane Mosès, un livre sur Franz Rosenzweig, Benjamin et Scholem. C'était en janvier ou février 1995. Cette nouvelle raconte l'histoire d'un condamné à mort. Au moment de son exécution, le temps se suspend pour qu'il puisse finir l'œuvre de sa vie.


Je prie Tlön de poursuivre, avec pour contrainte six films, et Skot, avec pour contrainte six odeurs (râle pas, c'est juste un prétexte pour s'y mettre).
Et Guillaume (contrainte: six souvenirs autour de Nuruddin Farah) et Guillaume (contrainte: Balzac ou Dickens).

jeudi 6 décembre 2007

J'attends le plombier

En vérifiant l'orthographe du nom de Fernand Reynaud Raynaud, je suis tombée sur Le douanier.

Là j'ai rien compris à ce qu'il a voulu dire. J'en ai conclu qu'il était bête.


Le plombier, en bonus.
(Mine de rien, le plombier n'arrive pas).

lundi 24 septembre 2007

Rédiger une adresse

Beaucoup d'internautes de passages arrivent ici en posant la question "comment rédiger une adresse?" (alors que je ne réponds qu'à la question «Comment rédiger une carte postale?»).
La réponse matérialiste à cette question se trouve ici.

Une réponse plus complète et plus "française" se trouve dans Parlez mieux, écrivez mieux, ce livre désuet datant de 1974 édité par Reader's Digest.

L'adresse

Monsieur, Madame, Mademoiselle sont de jolis mots: ils méritent d'être écrits en entier devant le nom de votre correspondant; bannissez donc les abréviations pour ces trois mots, réservez-les plutôt aux avenues (av.), boulevard (bd) et autres squares (sq.): elle sont alors tolérables.
Faites précéder le nom du destinataires de l'initiale de son prénom ou du prénom entier. Si vous écrivez à un couple, c'est l'initiale du prénom (ou le prénom) du mari qu'il faudra écrire après Monsieur et Madame (jamais Madame et Monsieur [...])
Le prénom entier devra figurer s'il y a une Geneviève et une Gabrielle, un Georges et un Gaston, dans la même famille et à la même adresse; cela pour éviter toute confusion.
Si vous destinez la lettre à toute la famille, vous pouvez écrire sur l'enveloppe:
Monsieur et Madame R. B...
et leurs enfants

Si votre correspondant porte un titre, celui-ci doit en principe figurer sur l'enveloppe; mais peut-être ne souhaite-t-il pas le voir mentionné, pour des raisons diverse; renseignez-vous discrètement. Les titres de noblesse, le titre de docteur, les grades militaires précèdent toujours le nom. On écrira donc:
Madame la Comtesse de N...
Monsieur le Baron et Madame la Baronne de P...
Monsieur le Docteur H...
Madame le Docteur F
Monsieur le Colonel et Madame V...
Plus familèrement, on pourra écrire:
Comtesse de N...
Baron et Baronne de P...
Docteur F...
Le Docteur et Madame H...
Colonel V...
Le Colonel et Madame V...

Notez que, pour les militaires à la retraite, on ne mentionne le grade que pour les officiers supérieurs (commandant, lieutenant-colonel, colonel dans les armées de terre et de l'air, capitaine de corvette, de frégate ou de vaisseaux dans l'armée de mer) et les officiers généraux (général dans les armées de terre et de l'air, contre-amiral, vice-amiral, amiral dans l'armée de mer).
Les autres titres ou les professions qui équivalent à un titre sont placés au-dessous du nom:
Monsieur P. S...
Avocat à la Cour

Monsieur X...
Secrétaire perpétuel de l'Académie française

Docteur C...
Médecin-chef de l'hôpital de Nevers

Monsieur A. P...
Président du comité de lutte contre l'alcoolisme
Ce dernier exemple est à la limite de l'acceptable, car il est bien long; de même, si votre correspondant possède plusieurs titres, n'en mentionnez qu'un: le plus important.

Ecrivez le nom et l'adresse sur l'enveloppe aussi lisiblement que possible, non seulement pour faciliter le travail des P.T.T., mais aussi par courtoisie envers le destinataire. Si votre écriture est peu lisible, utilisez des capitales d'imprimerie.
[suivent les recommandations des P.T.T., données en lien au début de ce billet].
Si vous écrivez à l'étranger, le nom du pays doit être rédigé en français, sous le nom de la ville, du district, du comté, etc.
Mrs C. W. JOHNSON
80 St. Stephen's Road
NORWICH NOR 90 09 S
GRANDE-BRETAGNE

Si vous écrivez poste restante, sachez que votre correspondant doit avoir au moins dix-huit ans, qu'il lui faudra présenter une pièce d'identité et payer une légère surtaxe.

Si vous n'êtes pas sûr que votre correspondant se trouve à l'adresse indiquée (déménagement, vacances, déplacement prolongé, etc.), portez la mention«Prière de faire suivre», soulignée deux fois, en haut et à gauche de l'enveloppe.

Adresse de l'expéditeur

Sauf pour vos lettres mondaines, il est très recommandé de mentionner votre propre adresse, ainsi que votre nom, au dos de l'enveloppe, discrètement et lisiblement. Cette précaution évitera à votre lettrede tomber au rebut, si l'adresse de votre correspondant est incomplète, mal libellée ou inexacte. Au surplus, le destinataire saura, avant même d'ouvrir son courrier, qui lui écrit.

Votre correspondant habite chez un tiers

Il se peut que l'adresse à laquelle vous expédiez votre lettre ne soit pas l'adresse personnelle de votre correspondant. Vous la libellerez alors ainsi:
Monsieur C.V....
aux vons soins de Monsieur G...
7, rue Thiers
45000 ORLÉANS
La formule «aux bons soins de», la plus correcte, peut cependant être remplacée par «chez» ou par c/o, abrégé de l'anglais care of.

lundi 10 septembre 2007

Les livres pour enfants et les livres pour vieillards

La question avait été soulevée ici, dans les commentaires:

il y a une chose avec laquelle je ne suis pas d'accord (et c'est J.K. Rowling qui l'a dit, dès les premiers tomes, quand on lui a reproché de faire des trusc un peu violents pour des enfants :) ce [la saga Harry Potter] ne sont PAS des livres pour les enfants [...]

Personnellement, je ne comprends pas plus la catégorie "livres pour enfants" que celle, si elle existait, de "livres pour vieillards".

Si les Harry Potter ne sont pas des livres pour enfants, ce sont des livres ratés, ou disons, des livres qui n'existent pas.
Avec son habituel goût de la provocation, Orimont fait un parallèle avec "les livres pour vieillards", supposant la catégorie impossible.

Je vais esquisser une réponse en deux temps, d'une part pour soutenir que les livres pour enfants existent, mais qu'on peut sans doute étendre la catégorie à tout ce que j'appellerais "para-littérature", et d'autre part que je conçois parfaitement "des livres pour vieillards", qui sont tout simplement les livres de la maturité.
Ne faites pas de ces quelques réflexions une profession de foi, il ne s'agit que de quelques pistes rapidement jetées.

Je caractériserais la littérature pour enfants (ou les livres pour enfants: les deux sont ici confondus) par une forme : un récit linéaire s'acheminant vers une fin le plus souvent heureuse et morale, et par une qualité plus difficile à définir : la vitesse de lecture.
Le livre pour enfants se lit vite, très vite, les mots ne résistent pas à un lecteur adulte entraîné (et c'est bien pour cela que de nombreux lecteurs français qu'on imaginerait pas lire Harry Potter le lisent en anglais : ainsi le texte résiste davantage. (Seraient-ils capables de le lire en français?))
Cette caractéristique est partagée par les romans de gare, les romans policiers, les romans de cape et d'épée, les romans de science-fiction... tous livres de lecture agréable, mais qui ne "résistent" pas, qui ne se lisent que dans un sens, tendu vers leur dénouement, et sont donc peu nourrissants.
Bien entendu, il s'agit d'un critère éminemment subjectif, et il conviendrait peut-être davantage de parler d'âge "littéraire" du lecteur: il est tout à fait possible d'imaginer des lecteurs d'un âge biologique avancé coincé à un âge littéraire enfant ou adolescent ou midinette.

Certains s'en moquent ou s'en désolent. Il me semble que c'est juste une question de temps, de parcours, d'éducation du goût, comme dans tous les arts: tout n'est pas accessible immédiatement, mais une fois qu'on a pris goût au meilleur, il est difficile de faire machine arrière. Cependant, on garde toujours beaucoup d'indulgence pour ses premières lectures : il est logique et sain que l'affection pour un texte ne soit pas uniquement une affaire de jugement esthétique, mais qu'un livre se charge de souvenirs de lecture.

Certains lecteurs atteignent des "âges littéraires" avancés. Leurs lectures sont donc des "lectures de vieillards". Ce sont des textes qui ne racontent rien, ou pas grand chose («Ceux qui lisent un livre pour savoir si la baronne épousera le vicomte seront dupés», écrivait déjà Flaubert en 1879), qui ne sont pas tendus vers leur fin mais entièrement contenus dans le présent de la lecture, des textes dont l'épaisseur se déploie dans chaque phrase, chaque paragraphe, si bien qu'ils peuvent être longs à lire, parce qu'on regarde par la fenêtre, on rêve, on se souvient, on réfléchit, on soupèse... Pensez à Borges, par exemple. Dans cet âge de la maturité, les romans perdent de leur importance en tant que roman, récit ou "histoire", le lecteur ayant appris que la vie est plus foisonnante que le plus palpitant des romans: ce qu'il recherche, c'est un éclairage, une mise en ordre du monde (y compris pour en souligner l'absurdité (cf. Beckett, par exemple)), la reconnaissance de certains motifs ou au contraire la désorientation. Lectures de la maturité, sans aucun doute, même s'ils peuvent toucher de "jeunes" lecteurs: ce sont quoi qu'il arrive des livres qu'on relit.


PS: il me faut mentionner les lecteurs qui lisent vite des livres destinés à être lus lentement, ou plus lentement, — et s'en targuent. Personnellement, se vanter de "lire vite", comme un exploit, Claude Simon ou Henry James, me semble bien plus incompréhensible (et infantile, de mon point de vue) qu'un goût pour Amélie Nothomb ou une tocade pour Harry Potter ou l'héroïc fantasy.

samedi 11 août 2007

Parmi mes réplique préférées

— Entre nous, à quoi penses-tu en général ?
— A Montauban, on devrait jamais quitter Montauban !

Michel Audiard, Les tontons flingueurs

jeudi 24 mai 2007

Encore de la publicité

Un texte d'Olivier Bruley chez Dominique Autié.


Et puis, rien à voir, Pasfolle. (J'avais été très frustrée, elle a quitté le Texas au moment où je commençais à la lire régulièrement. Puis Vendôme, Pékin... Le blog s'est tu. Elle est revenue. Son énergie et son écriture me font un bien fou. Je lui souhaite tout le bien qu'on peut souhaiter à quelqu'un.)


Ouahh, je découvre Tlön en pyjama (de satin en plus) ! Mdr !

samedi 19 mai 2007

Parcours en 6 x 4 livres

Pour une fois, voilà un questionnaire qui fait vraiment plaisir. Quatre, c'est tout de même peu, à chaque fois.

D'abord puisqu'il faut bien commencer :
Méthode Boscher ou La journée des tout petits, M Boscher.

Les 4 livres de mon enfance :

Ce sont plutôt des séries.

  • Les filles de Malory school d'Enid Blyton (six livres en bibliothèque rose)
  • Les chroniques de Narnia de C.S. Lewis (enfin, les deux tomes traduits en français à l'époque, les cinq autres en anglais, à 20 ans...)
  • Langelot
  • Le bracelet de vermeil et la saga du prince Éric de Serge Dalens dans la collection Signes de piste

Entre l'enfance et l'adolescence :

  • Le Seigneur des Anneaux
  • Anouilh et Giraudoux (avec une prédilection pour Ondine)
  • La Chartreuse de Parme
  • Jules Laforgue

Les 4 écrivains que je lirai et relirai encore :

Simone Weil, Evguenia Guinzburg, Baudelaire, Renaud Camus

Les 4 auteurs que je ne lirai probablement plus jamais :

Ce ne sont pas des auteurs.

  • San-Antonio (mais je veille jalousement sur ma collection)
  • SAS
  • Les anthologies érotiques de Pauvert (parce que je suis enfin délivrée de l'obsession de "ne pas paraître coincée", que je m'en fous et que je peux enfin dire que tout cela me navre par son côté factice, par l'aspect prévisible de la volonté de faire dans l'inattendu et l'inouï (mais je ne regrette pas de les avoir lues, très utile.))
  • La série des Fondation d'Asimov

Les 4 premiers livres de ma liste à lire :

Une chose est certaine: quels que soient les malheureux livres que je vais désigner, il y a peu de chance pour que ce soient eux que je lise effectivement dans les jours qui viennent. L'expérience m'a appris que je ne peux pas me tenir à une liste, et qu'il suffit que je prévois une chose pour que j'en lise une autre.

  • Le tome II du Journal de Travers
  • L'Amour l'Automne
  • Cours de philosophie en six heures et quart, de Witold Grombrowicz
  • prendre le temps de finir les quatre ou cinq tomes restants de l'Histoire des deux Restaurations du vicomte de Vaulabelle

Les 4 livres que j'emporterais sur une île déserte :

Donc disposant d'un temps infini, je suppose (je préfère une cellule de moine, je déteste la chaleur).

  • Un roman policier en allemand acheté il y a une éternité pour "me remettre à l'allemand" : Happy birthday, Türke, de Jakob Arjouni
  • La Divine comédie en version bilingue (puisque je suppose que je vais avoir beaucoup de temps)
  • Shakespeare également en bilingue
  • Les poèmes de Baudelaire dans la Pléiade

Les derniers mots d'un de mes livres préférés :

Je suis malade et n'ai plus longtemps à vivre. J'emporte de nombreux secrets avec moi, Janey. Ce que je suis et ce que j'aurais pu être.
Je ne suis pas aussi noire qu'on m'a dépeinte. Je veux que tu le croies.
Mes yeux m'ont privée du plaisir que je pouvais prendre à regarder ta photo. Je ne peux plus voir pour écrire. Je dois te dire quelque chose. Si jamais tu viens ici, répare ma vieille maison et ne manque pas d'aller trouver le général Allen, de Billings. C'est un bon ami.
Il y a quelque chose que je devrais te confesser, mais je ne peux tout simplement pas. Je l'emporterai dans ma tombe : pardonne-moi et songe que j'étais solitaire.

Calamity Jane, Lettres à sa fille (1877-1902), coll Points virgule.

La fille de Calamity Jane reçut ces lettres dix ans après la mort de sa mère, apprenant du même coup qu'elle était adoptée.


Je passe le relais à Guillaume et in girum.

ajout le 19 mai 2007

Zut alors, c'est vraiment un jeu cruel, à voir les réponses des uns et des autres il y a tant de noms qui remontent. Je crois que j'ai lu toute la bibliothèque verte et les plus grands classiques de la bibliothèque rose, et la Rouge et or souveraine, et la collection Fantasia... Je m'ennuyais beaucoup, beaucoup, beaucoup. Ensuite je suis passé aux Pearl Buck, aux Cronin, à Troyat, à tous les poches des années 50 et 60 aux tranches colorées qu'on trouvait chez les amis de mes parents (chez moi il n'y avait rien. Je n'ai pas choisi, c'était le goût des autres, ou leurs études: Sartre, Claudel, Mauriac... Jack London, bien sûr. Bah, il y en a vraiment trop.

samedi 31 mars 2007

Au poil

Le Palais de Tokyo accueille ce week end «les états généraux du poil»[1], sur une proposition du Collège de pataphysique. Ce Collège créé en 1948 prône la philosophie du Dr Faustroll, un personnage imaginé par Alfred Jarry (1873-1907). La pataphysique donne des solutions imaginaires à des problèmes qui ne se posent pas. Parmi les divers intervenants scientifiques, Catherine Vidal, directrice de recherche à l'Institut Pasteur, dissertera sur «la modification des cellules cérébrales quand le poil pousse dans la main». Claude Gudin, biologiste du végétal[2], nous apprendra tout sur «la pilosité des femmes jalouses» et Pascal Picq (Collège de France) nous éclairera sur «Bosse-de-Nage et la mutation PCR». Bosse-de-Nage était le souffre douleur simiesque du Dr Faustroll à qui ce dernier avait greffé la peau des fesses sur le visage. Le cinéaste Fernando Arrabal et le compositeur Bernard Lubat interpréteront pour la première fois en public un air composé pour l'occasion : «le chant du cheveu», en hommage à la cantatrice chauve d'Eugène Ionesco. Ce concert sera précédé par «Poils bretons», interprété par le duo celtique composé de Yann Fanch Kemener et d'Aldo Ripoche. Tandis que Jean-Christophe Averty, grand innovateur du petit écran présentera une série de chansons «le poil et les poilus» et que bien d'autres artistes célébreront le poil dans toutes ses dimensions.

Isabelle Brisson, in Le Figaro du 30 mars 2007


PS: pour se procurer le numéro de la revue, écrire ici.

Notes

[1] 13, av. du Président-Wilson, Paris, du 30 mars à 14 h au 1er avril 2007, entrée 6 euros.

[2] Une histoire naturelle du poil, Éditions du Panama.

samedi 24 mars 2007

Angelina Jolie

J’aime Angelina Jolie. Evidemment, c’est beaucoup plus banal qu’aimer les mitocondries, mais tant pis, j’assume.

La première fois que je l’ai vue, cela devait être dans Une vie volée, avec cette folle de Winona Ryder. L’histoire se déroule dans un asile psychiatrique pour adolescentes déboussolées (anorexie, tentative de suicide, violence, etc). Le film était nul, je crois, mais j’avais découvert Angelina Jolie. Elle était folle à lier, débordante de vitalité, drôle, violente et incontrôlable. J’ai cherché son nom et l’ai retenu.
Plus tard j’ai dû la voir dans Sept jours et une vie. J’adore ce film, l’histoire est très simple : Angelina est une jeune journaliste ambitieuse, un clochard lui prédit qu’elle va mourir dans sept jours. Faut-il y croire, que va-t-elle faire de ces sept jours?
Les quelques minutes où une troupe de CRS faisant barrage à des manifestants bat la mesure sur Satisfaction chanté a capella par une Angelina Jolie joliment beurrée se classent très haut dans mes moments préférés de cinéma.
J’ai également traîné des amis à Lara Croft II. Ce sont encore des amis, mais désormais ce sont eux qui choisissent les films : c’était naze grave.

Imaginez mon plaisir à découvrir un long article à elle consacré par le supplément de L’Express du 8 mars :

Elle sort tout juste du tournage de Lara Croft, Tomb Raider et elle vient de découvrir le Cambodge. Elle a alors cette idée saugrenue de fuguer du décor. De s'aventurer dans les villages. L'expérience prend des allures de révélation : pays dévasté, champs truffés de mines antipersonnel, pauvreté, orphelinats... C'est Siddhârtha quittant pour la première fois son palais et qui se voit frappé en plein coeur par la misère du monde. «J'ai mesuré à quel point j'étais ignorante : je ne savais rien de ce qui se passait en dehors des Etats-Unis.» Le jeune prince devient Bouddha, la jeune Américaine frappe à la porte du HCR, c'est pareil: «J'ai cherché à m'améliorer, en devenant moins égoïste, moins futile.» Dans la foulée, elle adopte un enfant orphelin, un petit garçon cambodgien qu'elle appelle Maddox. Entre la jeune femme et le bébé se noue une histoire d'amour. Elle achète une maison et des terres au pays, finance des villages et des réserves, se met à l'étude de la culture khmère et du bouddhisme, dénonce l'industrie de l'armement, les mines antipersonnel... Elle fait Siddhârtha et Lara Croft à la fois.
Enragée volontaire, elle n'y gagne pas que des amis. Avant de se coller un pavé diplomatique sur la langue, elle ne se gêne pas pour dire tout le mal qu'elle pense du gouvernement américain et de sa politique étrangère. Elle fait pire. A la fin de septembre 2001, elle envoie 1 million de dollars au Pakistan, dans les camps de réfugiés afghans. Elle sait ce qui se passe là-bas, elle y était quelques semaines plus tôt: «Ces gens allaient mourir ou geler à mort.» La réaction est immédiate : un flot de lettres d'insultes et de menaces de mort. «Quand j'ai envoyé l'argent, le pays avait déjà donné 275 millions de dollars pour les victimes du World Trade Center, plaide-t-elle. J'ai été triste une seconde, avant d'être vraiment en colère.»
[…]
Elle a divisé son budget en trois : un tiers pour ses dépenses, un tiers pour ses enfants, un tiers pour donner. Elle gagne des sommes folles, et heureusement.
[…]
Elle exploite son capital de notoriété, et elle redistribue les bénéfices. On peut regretter que les foules sentimentales prêtent plus de crédit à une actrice qu'à un directeur d'ONG. On peut regretter que l'émotion soit un levier plus efficace que la raison. On peut regretter que les dons privés remplacent l'argent public. Mais c'est comme ça. Elle avance sans se poser de questions paralysantes. Une fois qu'on a vu, dit-elle, on n'hésite plus. Fille de Babylone touchée par la grâce, Angelina Jolie est l'incarnation laïque et contemporaine de la rédemption. Une sorte de saint Augustin, sans Dieu mais avec une grande bouche.
[…]

Cette plume alerte est celle de Marie Desplechin.

mardi 13 février 2007

Et maintenant une page de publicité

Le 21 février paraîtra un numéro hors-série de la revue La presse littéraire consacré aux «Écrivains infréquentables».



samedi 10 février 2007

Réponse à une question que je ne m'étais jamais posée

Vu dans un bac de livres en solde : Où s'embrasser à Paris : le guide des meilleurs endroits.

samedi 9 décembre 2006

Ce qu'on apprend à nos enfants pendant que nous avons le dos tourné

— Mon fils est devenu fou !
— Ce sont les pauvres qui sont fous ! Les riches sont excentriques !
— Balthazar est excentrique à lier !

Picsou hors-série, avril 1998 (la graisse est d'origine.)


(Je sais, je sais. Ça traînait dans les WC.)

lundi 14 août 2006

Conseils de rédaction

Il y a quelques jours j'ai été émue par cette requête Google: "comment écrire une belle lettre d'amitié". Depuis, les requêtes de ce type ("écrire cartes de vacances", "quoi écrire sur une carte") se multiplient.

Je vais donc ajouter un conseil personnel aux conseils de Parlez mieux, écrivez mieux:

Si vous ne savez quoi écrire, choisissez un détail, une anecdote, survenus dans les les six ou douze dernières heures. Evitez absolument de vouloir résumer au dos d'une carte postale les six derniers mois à un ami à qui vous ne donnez jamais de nouvelles : aucun événement survenu dans les six derniers mois ne vous paraîtra assez important pour être raconté six mois après, et vous aurez l'impression de n'avoir rien à dire.
En revanche, le pastis du midi précédent fera un très bon sujet, une fois que vous aurez précisé où, quand, avec qui, en faisant quoi, vous l'avez bu.
Le curieux de ce conseil, c'est que de fil en aiguille vous vous retrouverez rapidement à en avoir trop à raconter, dans l'obligation d'écrire sur toute la carte postale, d'en commencer une deuxième, de courir acheter des enveloppes au Monoprix du coin...

(L'écriture entraîne l'écriture, ici vous aurez droit à une citation de Paul Valéry quand je serai rentrée chez moi, promis.)


ajout le 16 août 2007 (tout vient à point à qui sait attendre.)

Ricardou parle du «simple entrain d'un porte-plume»:

J'entre dans un bureau où quelque affaire m'appelle. Il faut écrire, et l'on me donne une plume, de l'encre, du papier qui se conviennent à merveille. J'écris avec facilité je ne sais quoi d'insignifiant. Mon écriture me plaît. Elle me laisse une envie d'ECRIRE. Je sors. Je vais. J'emporte une excitation à écrire qui se cherche quelque chose à écrire.
Paul Valéry, Tel Quel II, Littérature, cité page 65 de Pour une théorie du Nouveau roman, de Jean Ricardou


A voir

La photo du jour.

vendredi 11 août 2006

Déclaration d'amour à réciter un tournesol à la main

«Princesse, je...
D'abord, comment allez-vous, euh... ça va, moi aussi, ça va bien...
J'ai... vu cette fleur et j'ai pensé à vous parce qu'elle est jolie et... moi c'est vrai je n'aime pas beaucoup ce qui est joli mais je me suis dit que vous, vous l'aimeriez parce que vous, vous êtes jolie...
Mais je vous aime bien quand même, hein, c'est que je...
Ahhh, que c'est difficile...!»

J'adore ce passage de Shreck (I). Son air piteux, son "Ahhh, que c'est difficile". Je pense souvent, lors de malentendus, de gaffes, d'impairs, alors qu'il n'y avait que de la bonne volonté de part et d'autre : "Ahhh, que c'est difficile".

dimanche 30 juillet 2006

Comment écrire une carte postale?

Lors des longs étés chez mes grands-parents, je lisais donc tout ce qui me tombait sous la main. En particulier, il y avait chez ma tante — vieille fille qui vivait chez ses parents — un livre des éditions Selection du Reader's Digest, Parlez mieux, écrivez mieux.
J'ai beaucoup lu ce livre. Il m'horrifiait (comment apprendre à lire vite (c'était de l'arnaque, on ne lisait pas plus vite, on lisait en diagonale: cela me choquait beaucoup), il me ravissait (Comment s'adresser à une abbesse (Révérendissime Mère ou Madame la Prieure) ou à un Contre-amiral (les hommes écriront Amiral, les femmes écriront Amiral ou Monsieur), il était très instructif (Lettre d'un jeune homme pour demander à une jeune fille s'il peut la revoir).
J'ai cherché, et acheté, ce livre il y a environ un an. (Peu à peu je peuple ma bibliothèque de tous les fantômes qui ont enchanté mon enfance.)

Finalement, c'était davantage un guide des bons usages qu'un livre de syntaxe. Il était écrit dans un style délicieusement désuet, bien que datant seulement de 1974.

Il donnait donc quelques règles de politesse et de bon sens dans un chapitre intitulé "Petits secrets d'une lettre réussie":

- L'installation : «Attendez d'avoir le temps d'écrire, attendez d'être installé correctement chez vous : à une table ou à un bureau, avec un éclairage suffisant [...]»

- Le papier à lettre : «Le choix d'un papier à lettres s'apparente, toutes proportions gardées, à celui d'un vêtement. Outre qu'il témoigne de votre goût, votre papier à lettres doit s'harmoniser avec votre écriture; si elle est large et tassée, vous choisirez un format presque carré; si au contraire elle est haute et pointue, mieux vaudra adopter un format franchement rectagulaire. [...]
La sobriété est de rigueur, surtout pour les hommes : sobriété du format, sobriété de la couleur. Proscrivez les papiers lignés, parfumés, dentelés ou de forme bizarre.[...]
Lorsque vous avez trouvé le papier qui vous convient, restez-y fidèle; ce sera déjà la marque de votre personnalité, et votre correspondant ne sera pas insensible à cette constance.[...]»
(Du papier à lettres comme du parfum...) It's so cute.

- Avec quoi écrire ? : «Si vous n'avez qu'un simple crayon à portée de la main, remettez votre lettre à plus tard.
Le stylo à bille peut, au pis aller, convenir si l'on est sûr de ne pas choquer son correspondant. [...] Le stylo à pointe de feutre, ou de nylon, est utilisable [...]. Reste le stylo à plume, recommandable sans réserve et qui peut-être employé avantageusement dans tout les cas.»

- L'encre : «Il n'y a guère que quatre possibilités, à moins de vouloir étonner par son audace (et par son goût) : noir (le plus classique), bleu-noir (un peu triste), bleu (le plus moderne, le plus gai), violet (un peu désuet).»

Suivait un ensemble de règles et de recommandations sur la pagination, l'écriture («une belle écriture est un don du ciel qui se fait, semble-t-il, de plus en plus rare; la faute en est peut-être au stylo à bille, plus sûrement à notre hâte chaque jour accrue [...]»), la date, l'adresse et le nom, l'en-tête, la marge...



Il y avait un chapitre sur la correspondance rapide : "Les secrets d'une carte postale bien tournée", qui commençait par une ode à la carte postale :

La carte postale est d'un emploi aisé, on la trouve presque partout, elle n'exige pas d'enveloppe (nous y reviendrons). Le peu d'espace qu'elle concède à notre inspiration justifie l'absence d'en-tête ou de formule compliquée et proscrit le roman fleuve. Elle porte en elle-même son message implicite : «Nous sommes en vacances (ou en voyage), mais vous voyez, nous ne vous oublions pas.»
Si bien qu'elle est entrée dans les mœurs, comme les vœux de bonne année, à cette différence près qu'elle obéit à notre bon plaisir, non aux convenances ou aux servitudes sociales et professionnelles, et que sa forme est libre.
Ainsi n'enverrons nous de cartes postales qu'à ceux qui nous sont chers, à un titre ou à un autre. C'est là un joli symbole d'amitié et une coutume à cultiver dans un monde où les gestes gratuits sont si rares.

Suivaient des conseils :
- le choix de la carte postale

Vous commencez par la choisir. Attention ! Votre goût est en cause.
Evitez donc les cartes postales dites humoristiques ou grivoises, généralement bêtes à pleurer, à moins que l'un de vos amis ne collectionne ces chefs d'œuvre de vulgarité : en ce cas, vous pourrez écrire au verso «à titre de curiosité»... et mettre sous enveloppe. [...]

- le texte : «Cinq écueils majeurs guettent le texte» :

-La banalité grossière des «Meilleurs souvenirs» [...] Non! Faites un effort, un détail vécu, croqué sur le vif, même si vous parlez du temps, vous sauvera de cette désolante médiocrité:
La chaleur nous condamne à la sieste : tant mieux ! [...]
- La prétention. Trop de gens considèrent la carte postale comme un signe extérieur de richesse; ils en écrivent beaucoup s'ils vont au Mexique, peu s'ils passent leurs vacances en Dordogne.[...]
- Le pédantisme. Vos cartes postales doivent plaire et non vous faire valoir.
- La tristesse. Si le mauvais temps vous rend maussade et grognon, remettez votre courrier de vacances à plus tard. Ayez pitié de vos amis; n'écrivez pas :
Nous comptons les jours, c'est notre seule distraction. Nous serions mieux à la maison par ce temps; Pierrot a même attrapé un rhume...
Il est préférable de rester gai, optimiste, même s'il pleut des cordes et si le menu de l'hôtel laisse à désirer :
Nous concentrons nos efforts sur la cueillette des champignons et la chasse aux escargots...
L'Irlande a un charme prenant sous la pluie. Chaussés de bottes, sanglés dans nos imperméables, nous allons partout!
- La négligence ou la paresse, que traduit le style télégraphique.

[...] Enfin, n'écrivez pas n'importe quoi : n'oubliez pas que votre prose voyage «à visage découvert» sous d'innombrables yeux dont certains peuvent n'être pas discrets. Alors pas d'épanchements sentimentaux, pas de secrets intimes, sinon en mettant votre carte sous enveloppe.



Et voilà: simple, non?
Vous pouvez m'envoyer des cartes postales, je réponds toujours, c'est une manie contractée jeune, à cause d'un livre : Parlez mieux, écrivez mieux.

complément

voir au 14 août

mercredi 19 juillet 2006

La lecture pour se connaître

C'était absurde, cette foi d'Owler en l'efficacité publique de la littérature. La littérature est intransitive. Interpréter un texte, c'est interpréter ce texte. Et rien d'autre. Ceux d'entre nous qui pratiquaient l'art de lire n'étaient nullement meilleurs, plus sages, plus heureux ou plus réconciliés que quiconque. Au contraire. Nous étions au mieux plus ironiques, plus cyniques, plus irrévérencieux. Plus désarmés aussi, plus proches de la folie. Je pensai à la bande à Fagan, au «dernier verre» que j'avais manqué en route. Nous étions tous de bons lecteurs, nous nous adonnions tous à la littérature, chacun à notre manière. Mais quoi de nos vies? Nous étions tous, chacun à sa façon, inadaptés, égarés, sur de nombreux points méprisants de nous-mêmes. Nous pouvions être aussi mesquins ou arrivistes que les autres. Qu'avait-elle fait pour nous, la littérature? Elle nous avait détachés, nous avait dégoûtés de la société, nous avait exclus d'une certaine manière. Elle nous avait rejetés dans une position défensive et nous avait donné le sentiment impuissant de la futilité de l'aspiration et de l'ambition. Elle nous avait entretenus dans l'idée que nos concitoyens étaient décidément bien cons, sûrs d'eux, puérils à s'énerver pour un rien – des aveugles combattants dans un trou noir. Qu'avait-elle fait pour nous, la littérature? Elle nous avait au moins donné des mots pour répondre au monde, pour le neutraliser, pour nous protéger. Au mieux elle nous avait averti d'une chose, rien de bien important en vérité, la relativité et l'instabilité des catégories par lesquelles nous prétendons nous définir. Elle nous a évité, je suppose, de prendre dramatiquement à la lettre le cœur de tragédie plus ou moins futiles. Nous étions au moins des métaphores les uns pour les autres. «Ah, tu me connais! avait dit un jour Fagan quand je m'étonnais de sa réconciliation avec Logan après une brouille, je pardonne la folie.» Était-ce à quoi Owler voulait en venir? Que la littérature peut nous aider à pardonner la folie et à nous défier des ruses de notre aveuglement à nous prendre pour les masques que nous portons? Je n'en étais pas sûr.

Robert Harrison, Rome, la pluie (sous-titré A quoi bon la littérature?), p.157

Ce que n'a pas prévu ce texte, c'est l'inverse : l'impossibilité de pardonner à ceux qui ne sont pas fous...


la relativité et l'instabilité des catégories par lesquelles nous prétendons nous définir : quelques lignes avant ce passage se trouve cette phrase : «Il nous faut apprendre l'art de la lecture pour devenir meilleurs lecteurs de nous-mêmes.»

Cela me fait penser que j'ai trouvé une piste qui pourrait me permettre de "mieux me lire". Il y a deux jours, lisant Ricardou pour la première fois, je suis tombée sur ce passage :

Il s'ensuit, plus généralement, que tout refus de la stricte dénomination porte atteinte au récit. Or, nous le savons, le refus de dénommer est une des caractéristiques principales des textes de Nathalie Sarraute. Aspirant à transmettre ce qu'elle appelle l'innommé, elle en fait un innommable. Elle prend grand soin de ne pas lui donner de nom : ce serait le figer, perdre sa spécificité au profit de la banalisation d'un langage convenu.
[...] Si cette procédure est systématique chez Nathalie Sarraute, elle est loin d'être absente chez plusieurs autres Nouveaux Romanciers. Claude Simon l'a utilisée à sa façon, par exemple dans La route des Flandres, en multipliant les rafales de participe présents et d'adjectifs qualificatifs : «le canon sporadique frappant dans les vergers déserts avec un bruit sourd monumental et creux comme une porte en train de battre agitée par le vent dans une maison vide, le paysage tout entier inhabité vide sous le ciel immobile, le monde arrêté, figé s'effritant se dépiautant s'écroulant peu à peu par morceaux comme une bâtisse abandonnée, inutilisable, livré à l'incohérent, nonchalant, impersonnel et destructeur travail du temps» (p.314)
On le voit, sarrautiennes ou simonniennes, telles séries qualificatives rejoignent le phénomène des variantes.

Jean Ricardou, Le Nouveau Roman, Points-seuil, p.141 et suiv

Sarrautiennes ou simonniennes : mes nouveaux romanciers préférés, ou plus exactement les seuls que je lis avec plaisir, uniquement par goût, et non "pour les avoir lus". Il faut donc croire que je suis du côté de l'innommable. Amusant, cela corrobore mon goût pour le style sans ponctuation de L'Inauguration de la salle des Vents.
(Mais qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire d'un tel constat ?)

D'un autre côté, comment expliquer mon goût pour Proust, celui qui me paraît capable de tout nommer, celui à qui les mots ne paraissent jamais manquer ?

dimanche 16 juillet 2006

Les explications de textes, quel intérêt ?

Certains me demandent quel est l’intérêt de lire ainsi que je le fais, de décrypter ainsi les mots, de chercher les références, de faire de l’analyse de texte et de se poser des questions encore et toujours.

Honnêtement, je ne sais pas. D’une certaine façon, ça n’a pas d’intérêt en soi, ça n’a aucune importance.
Peut-être.

La question que je me pose, moi, qui n’est pas la même mais qui rejoint celle-ci, est : Quel est l’intérêt d’exposer sur le net mes petites découvertes ? Qui cela peut-il bien intéresser, cela ne paraît-il pas un peu ostentatoire, n’est-ce pas mortellement ennuyeux ?

A cela, deux ou trois lecteurs de RC ont eu la gentillesse de répondre (je les remercie d’avoir pris ma question au sérieux et de ne pas l’avoir prise pour un geste de coquetterie). Leur réponse, sans qu’ils se soient concertés (d’ailleurs ils ne se connaissent pas), est la même, à peu près : parce que je ne lis pas comme eux, parce que je cherche des choses qu’ils ne cherchent pas, et que cela les intéresse de prendre connaissance de mes petites découvertes sans avoir à chercher, surtout qu’ils ne chercheront pas (dans la mesure où ils sont moins fous et moins obsessionnels que moi, ajouté-je in petto).


Ce que ne peuvent savoir ceux qui me demandent « quel intérêt ? », c’est qu’ils me reposent le sujet d’une dissertation de première. A cette question, j’avais répondu à peu près : « aucun », et pour remplir les quatre pages requises, j’avais parlé de démembrement, écartèlement, dépeçage et autre torture, au grand désarroi de ma professeur de français (Madame Squinabol, merveilleuse professeur de français, à qui je dois d’avoir appris à lire) qui s’ingiénait à nous apprendre l’analyse de texte linéaire.

En y repensant, je crois que c'est son obstination qui a fini par me convaincre, non pas que cela présentait un intérêt, mais que c'était intéressant. Je me souviens de mon progressif émerveillement (non, ce ne fut pas une révélation, ce fut une lente persuasion) à m'apercevoir que tout passage d'un "grand" auteur présentait une unité interne telle qu'il se suffisait à lui-même. Je me souviens du corrigé d'un commentaire de texte qui portait sur le repas qu'offre Gervaise exactement au milieu de L'Assommoir, ou de l'étude de l'incipit de l'Education sentimentale, je me souviens des "trucs" (car ce sont des "trucs", des ficelles), de la façon de passer le texte à travers plusieurs filtres, d'abord les sensations (quelles couleurs, quels bruits, quelles odeurs, quels goûts?), puis le narrateur, les temps employés, la présence ou l'absence de dialogues, je me souviens de l'interdiction absolue de "sortir" du texte, c'est-à-dire de faire référence à l'avant ou l'après, sauf en troisième partie, sauf en conclusion... C'était magique, on arrivait toujours à dire quelque chose, à pondre quelques pages!

La clé de tout cela, "l'intérêt", je l'ai compris par hasard, deux ans plus tard, en écoutant une conversation à la cantine entre deux khâgneuses. J'étais assise à leur table. L'une expliquait à l'autre qu'on venait de leur rendre un devoir sur Stendhal, et que tout le monde avait de mauvaises notes :
— Mais enfin, avait tempêté la professeur, personne n'a vu que ce texte était drôle?
— Et c'était vrai, ajouta la khâgneuse, j'avais eu envie de rire. Mais je n'avais pas osé l'écrire.»
Ça m'a fait un choc. Stendhal drôle? On avait le droit de trouver Stendhal drôle? On n'était pas obligé de l'entourer de déférence? Et on avait le droit, et même le devoir, de l'écrire?

Et c'est ainsi que j'ai compris "l'intérêt" de l'analyse, ou plutôt son but. L'analyse n'est que seconde. En premier vient la sensation. L'analyse permet dans un second temps, doit permettre dans un second temps, de cerner d'où naît la sensation, et le sens.

Finalement, je dirais en souriant, car il ne faut pas prendre ces mots trop au sérieux, que l'analyse de texte est peut-être davantage une analyse du lecteur que du livre (sans compter que le lecteur parle davantage de lui que du livre), elle est peut-être davantage l'analyse de ce qui nous fait hommes capables de comprendre les mêmes sentiments et les mêmes sensations derrière les mêmes mots, et donc l'analyse du sens, de la naissance, de l'émergence, du sens.
L'analyse de texte, j'en ai le soupçon persistant, n'est que l'astuce qu'ont trouvé des amoureux de littérature pour parler de littérature. C'est une lettre à l'aimée, c'est une lettre qui parle de l'aimée, c'est la possibilité d'écrire et encore écrire en sortant du simple bavardage, en s'appuyant sur le texte pour en faire le témoin et la dernière preuve de tout ce qu'on avance.

Quid de la liguistique et de la structure? Je me souviens de la première fois, en cours de philosophie, où j'ai entendu parler de signifiant et de signifié, et de la première fois où j'ai entendu parler d'analyse structurelle des contes (le gentil, le méchant, la quête, la récompense, etc), je me souviens d'avoir réellement compris ce qu'était un narrateur et des personnages grâce à des cours de cinéma donnés par Jean Collet,...
Il s'agit sans doute moins de comprendre une esthétique, "le beau", davantage de comprendre les structures de nos pensées et de nos sentiments. Cela me convient parfaitement.

Comment dire? Vous pouvez dépecer votre poste de radio, le décomposer en transistors, résistances et condensateurs, être capable de le construire ou de le réparer, savoir qu'il décode des ondes : jamais vous ne répondrez exactement à la question "Pourquoi, comment, retransmet-il des paroles émises à des kilomètres de là?". Il reste toujours de l'inexplicable. Toutes les explications de texte du monde n'ont finalement comme ambition que de faire reculer, mais également de rendre plus évident, plus inatteignable, ce reste.


A quoi bon chercher les références des Eglogues?
Imaginons que vous vous promeniez dans Paris sans rien connaître de l'histoire de Paris. Paris vous plaira sans doute, s'il fait beau, si les filles ou les garçons sont jolis, si vous pouvez rêver à la terrasse d'un café.
Si vous savez qui est Jeanne d'Arc quand vous êtes place des Pyramides, si vous savez ce que représente l'Arc-de-Triomphe, si vous avez une idée de ce que sont le Val-de-Grâce ou les vestiges de l'enceinte de Philippe-Auguste, si vous pensez aux tableaux que contient un musée en passant devant sa façade, Paris n'en sera pas plus beau objectivement, et pourtant, vous l'aimerez davantage. Il vous appartiendra un peu, vous serez devenu complice. Vous ne penserez pas à tout ce que vous savez, mais vous le saurez.
Si vous ajoutez à toutes ces connaissances des souvenirs personnels, si un café, une rue, rappelle un souvenir, si vous connaissez parfaitement les moindres ruelles d'un quartier, le plaisir de se promener dans ce quartier, inexplicablement, sera accru. Il y a un plaisir de la reconnaissance, de la connivence, de la possession ("mon" quartier).
C'est cela que je tente avec les Eglogues: j'en dresse la cartographie. J'explore, je découvre, je comble quelques blancs de la carte, en sachant parfaitement qu'il en restera. Mon plaisir est celui des explorateurs. Mon plaisir est d'accroître ma complicité avec l'œuvre, de la connaître en ses méandres.
Je mets mes petites découvertes sur le Net pour le cas, dans l'espoir, que cela puisse être utile à quelques autres, dans l'espoir que nous soyons plus nombreux à être plus heureux (une bonne dose d'idéalisme dans tout cela, c'est exact.)


Il y a une autre raison, plus secrète, à mon amour des Eglogues : je crois aux coïncidences. J'expérimente régulièrement les coïncidences; je ne peux que croire aux coïncidences. Comment pourrait-il en être autrement alors que rédigeant plus ou moins mentalement ce billet, j'entends à midi ce passage qui évoque la puissance d'une citation, le besoin compulsif d'en retrouver la source :

Mais justement, en citant ainsi un vers isolé on décuple sa puissance attractive. Ceux qui étaient entrés ou rentrés dans ma mémoire, au cours de ce dîner, aimantaient à leur tour, appelaient à eux avec une telle force les pièces au milieu desquelles ils avaient l'habitude d'être enclavés, que mes mains électrisées ne purent pas résister plus de quarante-huit heures à la force qui les conduisaient vers le volume où étaient reliés les Orientales et les Chants du Crépuscule. Je maudis le valet de pied de Françoise d'avoir fait don à son pays natal de mon exemplaire des Feuilles d'Automne, et je l'envoyai sans perdre un instant en acheter un autre. Je relus ces volumes d'un bout à l'autre, et ne retrouvai la paix que quand j'aperçus tout d'un coup, m'attendant dans la lumière où elle les avait baignés, les vers que m'avait cités Mme de Guermantes.

Du côté de Guermantes p.549 - Pléiade tome 2 (1954)

samedi 1 juillet 2006

Une levée supplémentaire

En vérifiant l'orthographe de "s'époumoner" dans le TLFi pour le billet sur Jack Bauer (étrange verbe : un "n" ou deux, avec apparemment la recommandation d'en mettre deux si c'est un "e" qui suit, sans que cette règle soit obligatoire), j'ai trouvé une définition de trick, ce qui ajoute à ma perpléxité : trick au sens camusien est-il dérivé de l'anglais ou du français?

Le mot appartient à la sphère du jeu, avec des connotations d'habileté, de succès et de tricherie.
Qu'il puisse se prononcer "tri" est un cadeau inattendu et non sans humour pour les camusiens.


Je recopie ici la définition du trick donné par le TLFi:

TRICK, subst. masc.
JEUX (whist, bridge). Levée supplémentaire, que l'on fait en plus des six levées qui constituent le devoir. Les levées se nomment aussi Tricks: chaque trick que l'on fait au-dessus de six fait gagner un point (M. LEBRUN, Manuel des jeux de Calcul et de Hasard, 1827 ds Fr. mod. t. 16 1948, p. 212).
- Compter trois de trick. "Faire trois levées supplémentaires" (Lar. 20e).

Prononc. et Orth.: [TRIK]. Homon. trique. LITTRÉ: tri, tric; Lar. Lang. fr.: trick "on rencontre parfois la forme altérée tri"; ROB. 1985: trick ou tric. Prop. CATACH.-GOLF. Orth. Lexicogr. 1971, p. 311: trik, tri. Plur. des tricks. Étymol. et Hist. 1773 (Mercure de France, janv., 44 ds HÖFLER Anglic.), attest. isolée; 1814 ([Ch. BOUVARD], Nouvelle Académie des jeux, ou Règles des jeux du wisth, du boston... etc., 68, ibid.); 1872 (LITTRÉ, s.v. tri: Au jeu de whist, faire le tri, avoir le tri, faire une levée de plus que la partie adverse. On dit quelquefois tric). Empr. à l'angl. trick « ruse, artifice frauduleux » d'où « astuce, moyen habile » att. comme terme de jeux de cartes dep. 1599 (NED) pour désigner une main puis une levée, notamment une levée supplémentaire permettant d'assurer le point, appelée odd trick ou overtrick (v. NED, s.v. odd A I 1 et NED Suppl.2, s.v. overtrick). L'angl. est empr. au Moy. Âge à une forme normanno-pic. corresp. au fr. triche*. Bbg. ARNOULD (Ch.). Termes de jeu. Fr. mod. 1948, t. 16, pp. 211-212. BONN. 1920, p. 160.

mardi 25 avril 2006

Qu'est-ce qui vaut la peine ?

Je ne connais qu'un critère d'excellence: combien de lectures le livre supporte-t-il? Une, deux, dix? Le plaisir augmente-t-il à chaque lecture et s'enrichit-il de tout ce qu'on a lu par ailleurs? Chaque lecture donne-t-elle envie de relire tous les livres pour mieux saisir le jeu des parties avec l'ensemble?

lundi 3 avril 2006

Marcheschi au musée Denys-Puech de Rodez.

Et donc j'y étais, non sans une vague appréhension et une sorte d'ironie intérieure (du type "A Dieu vat"), puisque j'accompagnais Rémi Pellet qui m'avait appris le vernissage et gentiment proposé de partager sa voiture tout en m'avertissant "C'est la première fois que je vais revoir Renaud Camus, l'atmosphère sera peut-être un peu tendue".

Par hasard (? ce point n'est pas très clair, mais sans importance), Jean-Paul Marcheschi a pris une chambre dans le même hôtel que RP, ce qui fait que nous le rencontrons dans le hall. Jean-Paul nous invite à venir prendre un thé au bar d'à côté, invitation que j'accepte tandis qu'RP préfère aller acheter un parapluie. — Je suis sûr qu'il va pleuvoir, il me faut un parapluie, je déteste me mouiller.
— Mais comme vous êtes bien élevé, vous abriterez les dames, et vous vous mouillerez quand même.
Plus tard, il pleuvra, et RP me dira avec satisfaction "J'avais raison" et je penserai "moi aussi".

Je prends donc un thé avec Flatters et cigarettes a-camusiennes (non mais). Il est pressé, il a rendez-vous dans dix minutes au musée, il est à Rodez depuis mardi, il me dit que tout le monde a été charmant, et que comme la conservatrice du musée était malade, il a pu visiter la ville sans cornac. Il a l'air très satisfait de ce qu'il a pu y découvrir.
Il me parle un peu du musée que j’ai vu en arrivant, une bâtisse de deux étages pas très grande mais bien proportionnée, avec de curieuses statues au niveau du haut des fenêtres du deuxième étage, des chiens dorés. Comme je sais que sont exposés des pétrés, je lui parle de la lumière (les pétrés selon moi ne donnent leur meilleur qu’à la lumière naturelle), il m’apprend que le musée n’est électrifié que depuis dix ans, et que le musée dispose d’un très bel éclairage naturel.

JPM file à son rendez-vous, RP arrive avec son parapluie. Nous gagnons le musée à pied.



La salle d’exposition fait tout l’étage. Le thème en est les bagnes de Cayenne. En face de l’escalier se trouve une première série de bagnards, couchés. Imaginez une série de silhouettes grandeur nature, dans ces poses torturées qui semblent naître de la cire, douze bagnards silhouettes blanches sur fond noir, arc-boutées ou bandantes, les bras souvent figés à l’équerre comme des poupées ou des mannequins dans un geste de défense ou d’imploration. Cela évoque parfaitement la souffrance, la douleur, et je ne sais si cela naît des tableaux, mais ce que je ressens le plus, au milieu de tous ces tableaux de bagnards, c’est la solitude infinie de chacun au milieu des corps de tous les autres. Est-ce parce que les bagnard ont taille humaine et qu’ils sont chacun enfermés dans les limites de leur tableau, dans la nuit de leur toile individuelle; ou est-ce parce que je ne peux imaginer cette condamnation, cet emprisonnement, que comme une immense solitude dans la promiscuité ?

A gauche se trouvent d’autres bagnards, debouts, à droite des pétrés. Je fais cette expérience si commune de la re-connaissance, ce sont les tableaux que je connais déjà qui me plaisent le plus, ils se distinguent des autres par je ne sais quoi d’amical, ils m’accueillent, pensée pour Proust et Bergson. C’est la première fois que je vois autant de bagnards d’un coup, je crois qu’ils n’étaient pas destinés à une telle présentation initialement, ils devaient être répartis dans les cellules même du bagne de Cayenne. «Faire masse» leur convient bien (à mon avis, d’autres personnes sont plus hésitantes sur ce point); comment donner à imaginer 52000 bagnards si ce n’est par le nombre, nombre cependant suffisamment petit pour qu’on puisse encore avoir la notion claire de l’individualité de chaque silhouette, individualité clairement marquée par la taille et la posture de chacune, individualité qui permet au tableau de renvoyer le spectateur à sa condition humaine et qui permet au spectateur de s'identifier au tableau: si nous étions bagnards, nous serions cela.

Dans la partie gauche se trouvent les pétrés. Ce sont des tableaux construits cire sur cire, c’est l’épaisseur de la cire, le nombre de couches de cire dans des teintes et des fluidités différentes qui constituent le tableau, ce qu’il y a à voir. C’est très étrange, je suis sûre qu’un pétré pourrait se retrouver à la poubelle: «Cette toile est fichue, elle est pleine de cire.»
Ce sont mes toiles préférées, elles sont très lentes à se dévoiler, elles demandent du temps et une lumière naturelle. C’est à peine nous qui les regardons, c’est plutôt elles qui viennent à nous, elles rayonnent doucement, elles nous atteignent, les détails se dégagent lentement. Elles me font penser aux icônes, ce sont des toiles qui invitent à la méditation, qui la provoque. Je suis très heureuse de voir les deux immenses pétrés que j’avais déjà vus dans l’atelier de JPM pendus sur le mur du fond du musée: le fleuve Maroni, je crois. J’aurais bien aimé les voir en plein jour, ce sera mon regret.

Des pétrés ont été abîmés pendant le transport, on dirait qu’on a appuyé des caisses lourdes dessus, il y a de profondes lignes dans la cire, le visage d’une madone est divisé en trois, un Christ en croix est marqué de plusieurs de ses indentations. Collection particulière, propriétaire(s) indigné(s) et surtout malheureux. Et pourtant, il me semble que ces outrages vieillissent les tableaux, leur donnent davantage de charme. Enfin bon, ça m’est facile de penser cela, ces pétrés ne sont pas à moi, ce n’est pas moi qui ressent l’impression de mutilation et d’irréversible que je sais que je ressentirais.

La conservatrice du musée fait un discours de présentation, je l’entends mal, certains amis de JPM le trouvent plutôt (voire tout à fait) nul et semblent très énervés par l’absence du maire, représenté par son adjoint. Il est vrai que ces deux-là (la conservatrice et l'adjoint au maire) lisent à peu près le catalogue édité pour l’occasion, mais enfin... Luc et là, et Jimmy Rodriguez, et Mme Lloan, et Madeleine Gobeil, et Renaud Camus (sans Pierre).
J’apprends qu’il y aura demain des lectures de Pascal Quignard, et que Jean-Paul (Bayol) sera là :
— Vous ne restez pas ? Pascal Quignard donne une lecture demain.
— Vous ne restez pas ? Jean-Paul Bayol arrive demain.
— Vous ne restez pas ? Moi qui comptais vous faire visiter la ville et ses environs...

Non je ne reste pas. Il fallait prévenir ! Le temps de me tromper de dessert et de décommander une soupe d’agrumes pour la remplacer par une poire, et je file.

mercredi 7 décembre 2005

Prosélytisme littéraire

Angle d'attaque:
— Vous avez une cigarette? (oui, j'en ai presque que pour en donner.)
Il l'allume. C'est la grève du RER D, beaucoup de monde. Extrêmité de quai pour pouvoir lire tranquille.
— C'est bien ce que vous lisez?
Blanc. Je ne sais pas quoi dire. (Je lis Projet pour une révolution à New-York.)
— Euh...
Il se penche pour regarder le titre.
— Ça a l'air bien. C'est intéressant? Ça raconte quoi?
— Ben euh...
— Vous avez peur que je ne comprenne pas?
Eh zut, je vais le vexer si je ne lui explique pas Projet pour une révolution à New-York! Bon.
— Eh bien, il y a plusieurs histoires, mélangées.
— Ah, c'est des nouvelles?
— Non, vraiment mélangées, on ne sait jamais laquelle on lit. C'est compliqué.
— Ah. Moi je lis des histoires, vous savez, des livres où on choisit la page où on veut aller pour continuer l'histoire...
— Le livre dont vous êtes le héros?
— Oui, c'est ça.
(Tiens, au fait) — Eh bien, ça ressemble à ça, mais comme si on avait enlevé tous les chapitres, toutes les indications, et tout mis ensemble d'un seul bloc sans rien expliquer.
— C'est bizarre. Ça vous plaît?
— Non.
Il me regarde, interloqué:
— Mais pourquoi vous le lisez alors?
(Bonne question.) — Parce que d'autres ont écrit après ça et à partir de ça. Ç'était assez connu, entre 1950 et 1970. Maintenant on en écrit moins. (Je ne veux pas prononcer le mot Nouveau Roman. Je me sens gênée, il est gentil, si par hasard ça l'intéressait vraiment, il faudrait remonter si loin).

Il tend la main : Je peux le voir?
Il prend le livre, le feuillette, je repasse mentalement les premières scènes, euh..., il me le rend:
— On dirait une histoire où on arrive au milieu
(Je suis contente) — Oui, c'est exactement ça, pas de début, pas de fin (je me lance) Ecoutez, si ça vous intéresse vraiment... Vous avez entendu parler de Marguerite Duras? (J'essaie de prendre la plus connue et un titre qu'il puisse retenir et trouver facilement.)
— Non.
— Elle est morte il y a quelques années. Essayez Le Vice-consul.
— Consul... consulat?
— Oui, vice-consul.
— Comme vice-président?
— Oui.
— Mais à quoi ça sert? Ça apprend quelque chose?
— Pas vraiment, ou... ça fait réfléchir à comment on lit d'habitude, ce qu'on attend d'habitude d'une histoire... Ça permet de se rendre compte.
— C'est comme une expérience alors. Moi j'aime que ça soit pratique, comme Sun sho, vous connaissez?
— Ça me dit quelque chose (oui, mais je n'y crois pas trop.)
— Oui, L'Art de la guerre C'est très intéressant pour le commerce.
(??? Euh...)

Il a fini sa cigarette. Il jette le mégot sur les rails. Il s'en va.

A votre avis, quel pourcentage de chance y a-t-il qu'il lise Le Vice-Consul?

PS: Projet pour une révolution à New-York est au cœur de Travers.

lundi 14 novembre 2005

Hypotèse sur la critique

La critique littéraire existe-t-elle ? Est-elle possible ? Aucun système de critique littéraire n'a jamais été retenu par la postérité. Mieux, tout système de critique littéraire apparaît nécessairement comme la tête de turc obligée de la génération qui le suit, et sans espoir de repêchage ultérieur. Les Faguet d'aujourd'hui se moquent des Faguet d'hier, confortablement installés dans la charrette même qui est en train de les conduire, comme leurs prédécesseurs, à la guillotine. Les grandes œuvres, à l'instar de ces reines qui font régulièrement exécuter à l'aube leurs amants d'un soir, étendent avec ponctualité raides morts sur le terrain leur ration périodique de cadavres critiques.

Jean-François Revel, Sur Proust

La critique (littéraire) n'a sans doute nulle autre raison d'être que de gloser à l'infini sur le texte aimé; ce serait finalement une sorte de lettre d'amour. Si cette hypothèse est juste, il est sans doute normal que chaque lettre (chaque système critique) ne survive pas à celui qui l'a écrite, chacun préférant écrire sa propre lettre d'amour que reprendre celle du voisin.

D'autre part, ou plutôt de ce fait, la critique est, peu ou prou un acte d'appropriation, et chaque critique aimerait réussir à prouver que lui seul a compris l'œuvre, et que c'est ainsi qu'il faut la comprendre et l'aimer. Il y a dant tout cela beaucoup de jalousie, de besoin d'être reconnu et préféré. J'imaginerais plus volontiers des amants qui s'assassinent les uns les autres qu'une reine qui envoie à l'échafaud l'amant tombé en disgrâce.

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