Arkona par lui-même était alors un endroit parfaitement désert et désolé; nous passâmes la nuit dans une grange à Purgaten, le plus proche village de ses environs. Nous nous levâmes de bonne heure et partîmes pour cette pointe la plus extrême, au nord, de la terre allemande, où l'horizon est formé aux trois quarts par la grande, la libre mer baltique, où l'on peut distinguer, dans le brumeux lointain, à l'ouest, les parois crayeuses de Moën, l'île danoise. Tout à l'opposé de la Subbenkammer, Arkona est aussi vaste et plat et désolé que la première est haute, boisée et de formes en constante rupture. Cette longue ligne de murs crayeux aux bizarres anfractuosités, couverts par endroits de myriade de nids de sternes, la large grève où s'amplifiait le bruit, avec ses éboulis de silex à perte de vue, et la vaste surface grise de la mer: tout cela me donnait l'étrange impression d'une nature primordiale intacte et authentique.

Carl Gustave Carus, Voyage à l'île de Rügen, p.56-57, éditions Premières Pierres, traduction Nicole Taubes