Pour moi, c'était un récit de Borgès, peut-être venu des Mille et une nuits. Voici une autre source, soufie cette fois (il est entendu que ce n'est pas incompatible).
Un habitant de Bagdad avait gaspillé son héritage et se trouvait dans le dénuement. Après qu'il eut adressé à Dieu d'ardentes prières, il rêva qu'il entendait une voix lui disant qu'il existait dans la ville du Caire un trésor caché à un certain endroit. Arrivé au Caire sans argent, il résolut de mendier, mais il eut honte de le faire avant que la nuit fût tombée. Comme il errait dans les rues, il fut saisi par une patrouille qui le prit pour un voleur et le roua de coups avant qu'il ait pu s'expliquer. Il y parvint enfin, et raconta son rêve avec un tel accent de sincérité qu'il convainquit le lieutenant de police. Celui-ci s'écria: «Je vois que tu n'es pas un voleur, que tu es un brave homme; mais comment as-tu pu être assez stupide pour faire un aussi long voyage en te basant sur un songe? Moi, j'ai rêvé bien souvent d'un trésor caché à Bagdad, dans telle et telle rue, dans la maison d'un tel, et je ne me suis pas mis en route pour cela.» Or, la maison qu'il mentionnait était celle du voyageur. Ce dernier, rendant grâce à Dieu que la cause de sa fortune fut sa propre erreur, retourna à Bagdad où il touva le trésor enfoui dans sa maison.

Mathnawî VI, 4206 s. ; - texte aussi cité dans : Eva de Vitray-Meyerovitch, Rûmî et le soufisme, Seuil coll. "Maîtres spirituels" n°41, 1977, p.16