Eça de Queiroz a écrit une version portugaise des ''Lettres persanes'', mais sans tricher: il écrivait réellement de Paris, il était réellement portugais, et ses articles étaient destinés au Brésil.

Il fut consul à Paris de 1888 jusqu'à sa mort, en 1900, à Neuilly. Ces seules dates suffisent à retenir l'attention: les ''Lettres de Paris'' nous décrivent l'atmosphère de la jeunesse de Proust.

Ses articles sont fins, drôles et éclectiques, construits le plus souvent selon un motif de retournement: la thèse en début d'article s'oppose exactement à celle de la fin. Le plus amusant et le plus intéressant est sans doute la variété des sujets abordés : la politique internationale (Guillaume II "le velléitaire de l'action", l'Italie et la France et le complexe de l'Italie, la Russie et la France et la reconnaissance de la France), le journal (qui permet d'acheter des idées), Sarah Bernarht (obligée de reconnaître "avec stridence" son génie lors d'un déchirant examen de conscience), la démission de Casimir Périer, un magnifique hommage à Sadi Carnot, le souvenir de la Commune qui s'estompe difficilement, les attentats anarchistes, la colonisation (seule façon pour les Français d'apprendre la géographie) et les duels:

— Alors, le duel? Il y a eu mort d'homme ?
— Non, répond quelqu'un d'une table du fond. Il y a eu mort d'âne.
— Quoi! Paul est mort?
Et Paul qui sirotait gaillardement son grog à côté, se lève la crinière hérissée et l'injure aux lèvres... Et de là un nouveau duel, également au pistolet.

Eça de Queiroz, Lettres de Paris, p.31



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